Alors que la loi sur les usages licites du cannabis vient d’être définitivement adoptée au Parlement et n'a plus qu'à être publiée au Bulletin officiel, il est utile de rappeler que les autorités marocaines planchent sur les applications industrielles de cette plante depuis plus d’une décennie.
Dès 2009, en effet, une commission composée notamment de l’Institut national de recherche agronomique, de la Gendarmerie Royale, ainsi que des départements de la Santé, de l’Agriculture et de l’Industrie, a mené des expérimentations, dans plusieurs régions du Royaume, sur des variétés de cannabis exemptent de THC.
«Nous avions testé 4 variétés dans 4 régions, en l’occurrence, Agadir, Sefrou, Tadla et Sidi Allal Tazi, et nous sommes parvenus à prouver que ces variétés plantées au Maroc ont un taux de THC proche de zéro, conformément à ce qui est autorisé en Europe», affirme dans une déclaration pour Le360, Omar Sefrioui, administrateur d’une société privée qui a participé aux essais, en marge d’un séminaire organisé récemment à Tanger sur le chanvre fibreux.
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Après ces essais préliminaires concluants, plusieurs projets pilotes ont testé les applications industrielles du chanvre fibreux, notamment dans le bâtiment. «En 2014, nous avons construit 14 villas en béton de chanvre, dans le cadre d’un programme de l’OCP dans la ville de Benguérir», souligne notre interlocuteur.
Le béton de chanvre est un matériau qui résulte du mélange de la chaux avec de la chènevotte, c’est-à-dire de la paille de chanvre. Ce béton aux nombreux avantages se distingue par sa grande légèreté. Et il permet de répondre aux exigences des réglementations thermiques.
«Par la suite, nous avons travaillé sur tous les débouchés industriels possibles pour le chanvre, comme le plastique, le papier, l’alimentaire à travers le CBD, ou encore le textile. Il y a aujourd’hui un réel engouement pour le chanvre cotonneux qui peut remplacer le coton», indique Omar Sefrioui.
Des revenus en plus pour les fellahsA en croire cet expert, la culture du chanvre industriel dans les régions précitées, qui ne sont pas des zones où le cannabis est historiquement cultivé, devrait permettre d’accroître significativement les revenus des fellahs.
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Pour une producteur de betterave par exemple, dont la culture s’arrête vers le mois de mai et dont les revenus s’élèvent à près de 9.000 dirhams l’hectare annuellement, il lui est possible d’enchainer avec la culture du chanvre industriel, qui lui rapportera, d’après les études réalisées sur le terrain, jusqu’à 18.000 dirhams l’hectare de revenus supplémentaires, en seulement 2 mois.
Pour ce qui est de la région Nord du Maroc, où le cannabis est historiquement cultivé, on s’achemine vers des cultures de chanvres à très haute valeur ajoutée, explique Sefrioui. Ces régions devraient ainsi se spécialiser dans le chanvre thérapeutique et le chanvre dit «bien-être», une filière en plein boom actuellement en Europe.