Pour soutenir les futurs propriétaires, le gouvernement compte revoir sa politique d’aide à l’accès au logement dès l’année prochaine. Annoncée parmi les grandes orientations de la note de cadrage du Projet de loi de finances (PLF) 2023, l’exécutif étudie désormais la possibilité de «remplacer les exonérations fiscales accordées aux promoteurs immobiliers, par une aide financière directe aux ménages».
D’après l’exécutif, cette nouvelle approche s’explique notamment par la nécessité de faciliter l’accès à un logement décent à l'ensemble des familles marocaines et la «difficulté» de mesurer l’impact économique et social des exonérations fiscales accordées aux promoteurs immobiliers.
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Selon le dernier rapport sur les dépenses fiscales (manque à gagner lié aux dérogations fiscales) accompagnant le PLF 2022, les activités immobilières représentent à elles seules 22% des dépenses fiscales de l’Etat, soit 6,5 milliards de dirhams, dont 670 millions de dirhams accordés aux promoteurs immobiliers.
Ce changement de cap intervient également suite à la fin des programmes de logements sociaux, avec l’échéance fin 2020 des exonérations fiscales accordées aux promoteurs. Si des appartements économiques à 250.000 dirhams sont toujours disponibles sur le marché, c’est que plusieurs conventions ont été signées avant cette date, et que les projets concernés n’ont pas encore été achevés.
Près de 100.000 logements sociaux devraient encore être livrés d’ici fin 2026 selon les dernières données communiquées par la ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, Fatima-Zahra Mansouri, en début d’année.
Alors que le gouvernement n’a pas encore communiqué de détails quant à la mise en œuvre de cette aide directe, une approche basée sur le dialogue et la concertation avec les différentes parties concernées sera adoptée, a-t-on cependant indiqué.
Contacté par Le360, le vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), Mustapha Allali a salué cette mesure, assurant que la fédération a déjà émis une proposition à même de remplacer le programme de logement social, arrivé à échéance.
«C’est une bonne initiative, les gens croient que les exonérations accordées au secteur immobilier profitent aux promoteurs, alors que ce n’est pas le cas. Le prix d’achat d’un logement social est fixé à la base à 290.000 dirhams et non pas 250.000 dirhams. La différence de 40.000 est versée par l'Etat sous forme de TVA pour réduire le prix du logement et soutenir les ménages. C’est une bonne chose de donner l’aide directement aux acquéreurs pour que les promoteurs ne soient plus pointés du doigt», explique-t-il.
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Mustapha Allali souligne néanmoins qu’une aide directe ne suffirait pas à relancer les ventes du secteur dans ce contexte de crise, d’autant que le pouvoir d’achat à la fois des classes sociales défavorisées et moyenne a été réduit au cours de cette conjoncture.
«Ce qui pourrait réellement booster le secteur, ce sont des initiatives encore plus osées, comme la réduction des droits d’immatriculation à la conservation foncière et la baisse des taux bancaires pour les crédits à l’habitat. On est tous frappé par la crise économique, le pouvoir d’achat des ménages est ébranlé, il faudra donc agir sur tous les leviers pour les encourager à acquérir un logement», explique-t-il.
Aniss Benjelloun, président du pôle promotion immobilière à la FNPI, est du même avis. Selon lui, le grand défi à relever par l’ensemble des parties prenantes est de réussir à mettre à la disposition des consommateurs des logements à des prix qui ne dépassent pas les 7000 dirhams/m².
«Peu importe les dispositions que le gouvernement devra prendre pour accompagner les acquéreurs, il faut faire en sorte qu’on puisse produire et vendre des logements entre 5000 et 7000 dirhams le m² pour la classe populaire et moyenne. C'est le seul moyen de garantir aux Marocains un accès au logement adapté à leur pouvoir d’achat», détaille-t-il.
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Pour ce faire, le promoteur immobilier explique qu’il faudra réagir sur trois grandes problématiques auxquelles fait face le secteur, et qui concernent la flambée du prix des matières premières, le prix du foncier et la fiscalité du secteur.
«La situation du secteur est très difficile, il y a trois grosses problématiques à régler pour relancer les ventes de l’immobilier à savoir la hausse spectaculaire des prix des matériaux de construction qui nous empêche d’avoir une visibilité même sur le court terme, le coût du foncier toujours élevé et la lourde fiscalité qui handicape le secteur et renchérit le prix de vente au consommateur final», énumère Aniss Benjelloun, selon lequel «contrairement aux autres secteurs, on est obligé de passer par la case enregistrement et conservation foncière, la taxe sur les terrains non bâtis sans parler des autres taxes communales, des régies, des agences urbaines... Tout cela est supporté au final par le consommateur».