Jantes en aluminium: l’UE lance la charge contre les industries «made in Morocco»

L’usine de jantes du chinois Citic Dicastal, dans la zone franche de Kenitra

L’usine de jantes du chinois Citic Dicastal, dans la zone franche de Kenitra.

La Commission européenne impose des taxes allant jusqu’à 31,4% sur les roues en aluminium marocaines, accusant Rabat de subventions illégales. De quoi inaugurer un nouvel épisode de tensions commerciales activées par une commission qui semble cibler davantage les produits supposés bénéficier d’un soutien financier à la fois du Maroc et de la Chine, dans le cadre de l’Initiative ceinture et route.

Le 16/03/2025 à 13h00

Les exportations marocaines commencent à susciter des tensions en Europe, notamment dans le secteur des roues en aluminium. La Commission européenne a récemment pris une décision qui risque d’affecter cette industrie florissante: elle a imposé des droits compensateurs sur ces importations en provenance du Maroc, invoquant la nécessité de protéger les producteurs européens et leurs 16.600 emplois contre ce qu’elle considère comme des «pratiques commerciales déloyales».

Selon la Commission européenne, le Maroc accorderait des subventions et des facilitations aux producteurs de roues en aluminium, leur permettant de proposer des prix plus compétitifs que ceux des fabricants européens. Les nouveaux droits imposés varient ainsi en fonction de l’origine des financements. Ils sont de 5,6% pour les producteurs bénéficiant uniquement des subventions marocaines et de 31,4% pour ceux bénéficiant d’un soutien financier à la fois du Maroc et de la Chine, dans le cadre de l’Initiative ceinture et route (BRI).

Ces droits compensateurs viennent s’ajouter aux droits antidumping déjà en vigueur depuis le 12 janvier 2023, qui oscillent entre 9% et 17,5%.

L’origine de cette nouvelle sanction remonte au 3 janvier 2024, date à laquelle l’Association des fabricants européens de roues (AEFR) a déposé une plainte auprès de la Commission européenne. L’association dénonçait des subventions financières et fiscales attribuées aux producteurs marocains, leur permettant de commercialiser leurs produits à des prix inférieurs aux coûts de production.

En réponse à cette plainte, la commission a ouvert une enquête antisubventions le 16 février 2024. À l’issue de celle-ci, elle a conclu que le gouvernement marocain soutenait son secteur automobile par le biais de subventions incompatibles avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), notamment des prêts à taux préférentiels et des exonérations fiscales. De plus, l’enquête a révélé que l’un des producteurs marocains bénéficiait de financements chinois directs via la BRI.

Un conflit commercial répété

Face à ces accusations, le ministère marocain de l’Industrie et du Commerce a fermement rejeté les conclusions de l’enquête européenne. Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie, a défendu la compétitivité des roues en aluminium marocaines, affirmant qu’elles respectent les normes de qualité exigées par le marché européen. Il a également rappelé que les accords de libre-échange entre le Maroc et l’Union européenne prévoient la suppression progressive des droits de douane sur les produits industriels, ce qui devrait normalement faciliter le commerce bilatéral.

Cependant, ces arguments n’ont pas suffi à infléchir la décision européenne. Selon les conclusions de l’enquête, les importations marocaines ont fortement augmenté entre 2020 et 2023, passant d’une part de marché de 2% à 9%, avec des prix inférieurs de 16% à ceux des producteurs européens. L’UE estime que cette progression rapide, combinée aux subventions jugées «injustifiées», cause un préjudice économique à son industrie.

Cette nouvelle mesure s’ajoute, doit-on le rappeler, à une première enquête antidumping qui avait déjà été ouverte le 17 novembre 2021 sur les roues en aluminium marocaines. En janvier 2023, la Commission européenne avait instauré des droits antidumping définitifs allant de 9% à 17,5% sur ces importations.

Par Youssef Bellarbi
Le 16/03/2025 à 13h00

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