Invité cet après-midi du Conseil national de l’entreprise (CNE) de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du commerce et de l’économie verte et numérique, a décliné les grandes lignes de la stratégie industrielle 2021-2023.
Cette stratégie s’appuie sur les atouts traditionnels de la plateforme industrielle marocaine (positionnement géographique, main d’œuvre, accords de libre-échange, infrastructures et logistique, etc.), mais aussi sur «la réactivité, l’agilité, et l’efficacité dont ont fait preuve les compétences marocaines durant la période de pandémie», a souligné le ministre. Ce dernier a en effet constaté que la crise sanitaire avait révélé au grand jour la capacité confirmée des industriels marocains à fabriquer, dans l’urgence, des produits et des équipements aux normes internationales.
«Cette période a généré des entrepreneurs qui ont confiance en eux», a insisté le ministre. «Nous avons tendance au Maroc à dénigrer ce que l’on sait faire. Or j’ai découvert que nos opérateurs, dans des moments difficiles, ont fait des choses invraisemblables», a-t-il ajouté, faisant référence à la fabrication de masques, de respirateurs et de caméras thermiques, grâce à la coopération «exemplaire» entre les industriels locaux, les universités et les pouvoirs publics. «Cette pandémie nous a donné une leçon: nous pouvons faire de la qualité, de la technologie, tout en étant compétitifs», a-t-il poursuivi.
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L’autre enseignement majeur sur lequel veut capitaliser la tutelle concerne le processus de relocalisation en cours de la production mondiale, suite à la perturbation des chaînes d’approvisionnement au plus fort de la crise sanitaire.
«Une tectonique des plaques est en train de s’opérer. Les donneurs d’ordre qui ont subi les impacts de la pandémie sont en train de revoir la localisation de leurs sites industriels. Il y a une fenêtre de tir pour le Maroc. C’est maintenant et tout de suite qu’il faut que nous gagnions de nouveaux marchés», a affirmé le ministre.
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Ces «leçons» de la crise ont guidé l’élaboration du plan de relance industriel concocté par le département de l’Industrie. Ce plan est décliné en 5 objectifs stratégiques:
- Accompagner les filières industrielles et renforcer leur intégration, afin de démultiplier la création de richesses et d’emplois;
- Développer l’entrepreneuriat industriel et favoriser l’émergence d’une nouvelle génération d’industriels;
- Se positionner comme un partenaire international stratégique dans le contexte de resserrement des chaînes de valeur;
- Décarboner la production industrielle pour améliorer la compétitivité du secteur et renforcer son attractivité;
- Inscrire le secteur industriel national dans une démarche d’innovation.
Substitution aux importations: 34 milliards de dirhams de gains attendusLa substitution aux importations est au cœur de la stratégie industrielle post-Covid-19 du Maroc. «Nous arrivons à faire de la substitution de qualité identique, voire meilleure, et moins chère que ce que nous importons habituellement. Même moi, je n’y croyais pas», s’est exclamé Moulay Hafid Elalamy (MHE).
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Très concrètement, après une analyse détaillée des importations sur 16 filières industrielles, et un recensement des capacités dormantes du tissu industriel national, le ministère s’est fixé un objectif de substitution de 34 milliards de dirhams à l’horizon 2023, sur un total de 183 milliards d’importations en 2019. Le potentiel à l’export de cette stratégie est, lui, estimé à 17 milliards de dirhams, tandis que les emplois susceptibles d’être créés pourraient atteindre 100.000. Cette stratégie, au final, pourrait avoir un impact positif sur la balance commerciale de l’ordre de 51 milliards de dirhams d'ici 2023.
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Dans ce contexte, la commande publique et la préférence nationale doivent agir comme des catalyseurs. A ce propos, le ministre a insisté sur la nécessité de la transparence dans le choix des promoteurs, avec des appels à projets ouverts, et des règles claires. «Il n’y aura pas de copinage. Tout le monde doit avoir sa chance», a promis le ministre.
MHE a en outre révélé qu’une première vague d’appel à projets de l’Etat, auxquels les industriels nationaux pourront postuler, sera lancée de manière imminente.
«Une première banque d’une centaine de projets sera mise en ligne dès vendredi 25 septembre sur le site du ministère», a-t-il fait savoir, ajoutant que son département s’est fixé un objectif d’au moins 500 projets lancés d’ici le quatrième trimestre de 2021.
Le soutien de l’Etat au tissu industriel se manifestera également à travers une série de mesures incitatives. Il s’agit, entre autres, de subventions aux nouveaux investissements, de la mise à disposition du foncier industriel à des tarifs compétitifs, ou encore de la mobilisation d’offres de financement dédiées, en partenariat avec le secteur bancaire national.
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Notons enfin qu’un autre aspect important du plan de relance industriel porte sur l’amélioration de l’empreinte carbone de l’industrie marocaine. Il s’agit de positionner le Royaume comme une base industrielle décarbonée. L’idée est de mobiliser une partie des énergies renouvelables du Maroc au service d’un ancrage industriel.
«Nous sommes capables de décarboner notre industrie, avec des coûts moins chers que l’énergie fossile. D’autant que l’Europe, qui représente 75% de nos exportations, a voté la taxe carbone», a souligné MHE.
Au final, a conclu le ministre, «le Maroc doit capitaliser sur sa capacité d’innovation et sur les acquis du Plan d’accélération industrielle pour saisir les opportunités d’un marché mondial en pleine mutation».