Exportations des fruits et légumes: à quand un retour à la normale ?

Les exportateurs espèrent une reprise «urgente» mi-avril des exportations vers l'Afrique des tomates, oignons et pommes de terre. DR

L’amélioration des conditions climatiques devrait tirer vers le haut la production des fruits et légumes. Alors qu’une offre suffisante est attendue dès la mi-avril sur les marchés nationaux en tomates, oignons et pommes de terre, les exportateurs espèrent une reprise «urgente» des exportations.

Le 13/03/2023 à 20h03

Tomates, oignons, pommes de terre, poivrons … après une saison «dure», l’adoucissement du climat laisse les producteurs exportateurs espérer un retour à la normale. Ceux-ci, faisant état d’une amélioration de la production, estiment qu’il est temps de lever «d’urgence» les restrictions à l’export.

«Si la baisse de la production imposait un ajustement entre les besoins intérieurs et les exportations, aujourd’hui, les indicateurs sont au vert», indique une source à l’Association des Producteurs et Producteurs Exportateurs des Fruits et Légumes (APEFEL), contactée par Le360.

Une production «suffisante» en tomates dès la mi-avril

Une amélioration de la production des tomates était constatée dès la mi-février, selon la même source, qui fait état d’une augmentation de 30% de la production, par rapport aux mois de décembre et de janvier. «Après une forte chute des volumes journaliers de récoltes, qui sont passés de 1.200 kilogrammes par hectare de serre à 500 kilogrammes à partir du mois de janvier, la production se rapproche actuellement de ses niveaux normaux», souligne cet interlocuteur.

La raison de cette hausse de la production ? L’amélioration des conditions climatiques, avec des températures qui se rapprochent des niveaux idéaux pour le développement des tomates. «Dans la région de Souss-Massa, les températures varient actuellement entre 13 et 18 degrés durant la nuit et entre 17 et 27 le jour, avec un taux d’humidité de 70 % dans les serres. Ce sont les conditions les plus favorables à la croissance de la tomate», explique Mustapha Aouragh, expert agronome, joint par Le360.

Qu’en est-il des autres légumes ?

Les productions d’autres légumes, notamment les piments et les poivrons devraient également suivre la même courbe ascendante, affirme l’expert agronome. Pour ce qui est des pommes de terre et des oignons, cet interlocuteur indique que ceux-ci devraient être disponibles en quantités importantes sur les marchés à compter du mois de mai.

«Actuellement, c’est principalement la région de Casablanca-Settat qui fournit les pommes de terre au marché national. La récolte de celle-ci devrait commencer, à partir du mois de mai, dans d’autres régions, notamment à Boulemane et à Guigou», détaille-t-il, précisant que les pommes de terre produites dans ces régions devraient continuer à alimenter le marché jusqu’en août.

De même, les récoltes des oignons devraient commencer dès la mi-mai dans les régions de Meknès et Ain Taoujdat et atteindre leur pic en août, garantissant ainsi un approvisionnement suffisant des marchés, ajoute l’expert.

Les exportateurs à bout de souffle

Dès «l’annonce» en début février de la limitation des exportations marocaines des fruits et légumes vers l’Europe et la suspension de celles vers l’Afrique, les exportateurs marocains se sont retrouvés entre l’enclume d’une décision gouvernementale «qui manque de visibilité», et le marteau des engagements vis-à-vis des clients qu’ils risquent de perdre, regrette notre source à l’APEFEL.

Aujourd’hui, la production est en amélioration, «il est temps de rouvrir la voie aux exportations des tomates vers l’Europe. Cela est même urgent, vu que les opérateurs ont subi d’énormes pertes en raison des restrictions», clame la même source.

Une demande que partagent également les exportateurs marocains des légumes vers l’Afrique. «La situation des exportateurs se fragilise de jour en jour. En plus de ne pas pouvoir honorer leurs engagements avec leurs clients, les opérateurs n’arrivent même pas à payer leurs fournisseurs au Maroc ni à couvrir leurs dettes et charges», s’indigne Mohamed Zemrani, président de l’Association des exportateurs vers l’Afrique.

Et de poursuivre : «Après avoir pris unilatéralement la décision de suspendre les exportations vers les pays africains, la tutelle est revenue pour mettre en place un quota de 20 tonnes par jour pour les tomates, alors que les exportations des pommes de terre et des oignons, deux produits stratégiques, sont toujours à l’arrêt».

Les 20 tonnes, soit un camion par jour, représentent les quantités devant être acheminées par l’ensemble des opérateurs vers la Mauritanie, le Sénégal, le Mali, la Gambie, Burkina Faso et le Niger, précise Mohamed Zemrani, soulignant que «ce quota est dérisoire, par rapport aux 100 ou 150 tonnes exportées par jour auparavant».

Une levée des restrictions est-elle possible ?

Les exportateurs, craignant de perdre leurs parts dans des «marchés stratégiques» et soucieux de la «crédibilité de l’origine Maroc», appellent ainsi à une reprise urgente des exportations. Une mesure «envisageable», selon Mustapha Aouragh.

Pour ce qui est des tomates, l’expert s’attend à ce que la production revienne à des niveaux normaux et à ce que ce fruit soit bientôt disponible en quantités «abondantes» et à des prix bas sur le marché local, laissant aux exportateurs «2 à 3 mois de pleine capacité jusqu’à la fin de la saison des tomates».

Néanmoins, nuance le même expert, il faudrait attendre avant de relancer les exportations des pommes de terre et des oignons. «Le marché est actuellement approvisionné principalement grâce aux stocks, permettant de répondre à la demande intérieure», souligne-t-il.

Rappelons que, dès début février, les exportations des fruits et légumes ont été limitées voire suspendues pour certaines destinations. Alors qu’aucune annonce officielle n’a été faire à cet égard, les exportateurs contactés par Le360, affirment que des «directives orales ont été données par des canaux officieux». Ces mêmes sources critiquent «le manque de communication, (les) ayant mis dans une position délicate vis-à-vis (de leurs) clients».

Par Lina Ibriz
Le 13/03/2023 à 20h03