Alger a refusé de réactiver le Gazoduc Maghreb-Europe malgré plusieurs tentatives européennes

Depuis la rupture du contrat avec Sonatrach en octobre 2021, l'ONEE s'approvisionne sur le marché international du GNL pour alimenter la centrale électrique de Tahaddart.

L’Algérie se serait opposée à la réouverture du Gazoduc Maghreb-Europe (GME), malgré des démarches menées ces derniers mois par plusieurs pays européens pour relancer son exploitation en direction de l’Espagne. L’information a été rapportée par le média spécialisé en énergie «Attaqa», basé à Washington, puis relayée par plusieurs titres de presse espagnols.

Le 18/11/2025 à 12h27

«Au cours des derniers mois, l’Algérie a rejeté la proposition de reprise de l’exportation de gaz naturel vers l’Espagne via le gazoduc Maghreb-Europe, qui traverse le territoire marocain», révèle Attaqa, citant des sources bien informées. Le flux du GME est interrompu depuis le 31 octobre 2021, date à laquelle Alger avait décidé unilatéralement de ne pas renouveler le contrat d’acheminement conclu avec l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) et la Sonatrach.

Attaqa souligne que l’Algérie a refusé plusieurs tentatives de «prise de contact» ou de «test des intentions», jugeant le dossier totalement clos dans le contexte de la crise diplomatique et du différend autour du Sahara marocain.

Toujours selon ces sources, l’Espagne et plusieurs partenaires internationaux auraient proposé d’utiliser à nouveau le GME afin de diversifier les routes d’acheminement du gaz algérien vers l’Europe, tout en y voyant un possible levier de normalisation progressive des relations avec le Maroc.

En contrepartie, estime Attaqa, «le Maroc pourrait bénéficier d’une partie des volumes transportés, à un prix potentiellement inférieur au gaz actuellement importé via l’Espagne, estimé à environ 4 à 5 dollars par million de BTU».

Attaqa indique avoir sollicité un commentaire auprès de Sonatrach, sans obtenir de réponse.

Depuis la rupture du contrat avec Sonatrach, le Maroc a tourné définitivement la page du gaz algérien. L’ONEE s’approvisionne désormais sur le marché international en passant par les infrastructures espagnoles: gaz naturel liquéfié (GNL), regazéification puis transfert en flux inversé dans le GME vers les centrales de Tahaddart et Aïn Beni Mathar, toutes deux exploitées par l’ONEE.

Les importations marocaines de gaz ont fortement augmenté en 2025, selon des données compilées par Attaqa. Entre le 1er janvier et fin août 2025, le Maroc a importé environ 6,73 TWh, contre 6,29 TWh durant la même période en 2024.

Sur le seul mois d’août 2025, les volumes ont atteint 992 GWh, soit le niveau mensuel le plus élevé de l’année.

Le média espagnol Okidiario confirme cette dynamique et cite les données de Cores, organisme de surveillance du système énergétique ibérique: «Les exportations de gaz espagnol vers le Maroc sont en hausse et atteignent des niveaux records. Le Maroc est désormais la deuxième destination du gaz espagnol, après la France.»

Parallèlement, le Maroc déploie une feuille de route ambitieuse pour renforcer son infrastructure gazière. Celle-ci prévoit, dans une première phase, la mise en place d’un terminal GNL doté d’une unité flottante de regazéification (FSRU) au port de Nador West Med, la construction d’une centrale à cycle combiné (CCGT) d’une capacité de 1.200 MW, ainsi que de nouveaux gazoducs reliant le futur terminal méthanier au GME.

L’appel à manifestation d’intérêt lancé en avril 2025 a suscité un vif intérêt, avec plus de 80 opérateurs y ayant répondu. Le lancement de l’appel d’offres est attendu d’ici la fin du mois de novembre.

Par Wadie El Mouden
Le 18/11/2025 à 12h27