Il en est des hommes comme des Etats.
Friedrich Nietzsche écrit dans «Le Gai Savoir» cette remarque à l’encontre d’un homme qui l’a trahi:
«Ta rage, tes crachats, tes blasphèmes
Exténuent ma patience et mon cœur.
Décide-toi librement
A avaler incontinent
Un crapaud gras, sans cérémonie!
Remède contre la dyspepsie.
Même une trahison a besoin d’être digérée, sauf que là, elle sera longue, difficile et douloureuse».
Il est des expressions éculées qu’il faudra éliminer de notre vocabulaire: «peuple frère» par exemple. Ça ne veut rien dire. La fraternité se vit entre deux individus. Les peuples, c’est comme la foule. Des personnes anonymes qui peuvent manifester pour des valeurs ou des slogans. Elles peuvent être dans l’erreur.
Il n’y a pas plus dangereux qu’une foule d’hommes et de femmes déchaînés manipulés par un chef aux objectifs douteux. La foule a besoin d’un leader charismatique. Mussolini a drainé des foules entières pour ses idées fascistes et racistes. Il avait le pouvoir des mots et de la conviction.
On n’arrête pas une foule. C’est comme un ouragan. Elle submerge les rues et avenues.
En 1895, Gustave Le Bon publie «Psychologie des foules». Il démontre comment des individus, quand ils sont réunis, ne raisonnent pas de la même manière que s’ils étaient seuls. Ce qui explique le comportement irraisonné des foules et leur danger.
Autre slogan dont il faut se méfier: «choc des civilisations». Les civilisations circulent sans être en guerre. Les cultures sont portées par des hommes et des femmes. Ce qui bute et fait le malheur, c’est le «choc des ignorances».
Deux ignorants qui se rencontrent finissent par se faire la guerre. Deux hommes cultivés, bien éduqués, construisent ensemble quelque chose qui fait du bien à l’Humanité.
C’est le dialoguiste Michel Audiard qui résume bien la situation: «Ne répondez jamais aux cons, ça les instruit.»
Pourtant, depuis l’attentat du 11 septembre 2001, tout le monde, hommes politiques et médias, évoque le choc des civilisations. Or, il y avait d’un côté une grande puissance, plus ou moins civilisée, et de l’autre une dizaine d’illuminés, complètement fanatisés et manipulés, envoyés par Ben Laden mourir en fonçant sur des tours à New York. Il fallait une force de caractère, un aveuglement (ce qui est opposé), et un sentiment de puissance (dans un cerveau fragilisé) pour monter dans un avion, en prendre les commandes et aller foncer dans des tours jumelles, causant plus de 3.000 morts.
Tant d’ignorance est de l’ordre de l’horreur et de la stupidité, lesquelles ont généré une haine de l’islam et des musulmans dans le monde, impossible aujourd’hui à effacer. On a beau rappeler que l’islam n’est pas cela, que cette religion a été mal comprise et détournée, il n’y a rien à faire. La tragédie du 11 septembre, c’est l’islam qui en est responsable. Allez dire le contraire à un Américain, il vous accusera de complicité et vous enverra peut-être à la prison de Guantanamo.
Bref, l’ignorance fait le malheur des peuples.
Autre slogan qu’on entend souvent: «Il n’y a pas de fumée sans feu». C’est l’esprit complotiste. La rumeur aurait ainsi des origines et elle dégagerait la fumée qui la trahit.
Enfin, une autre expression: «A qui profite le crime?». Avec ce raisonnement, c’est encore le complotisme qui frappe.
J’ai remarqué qu’au Maroc, des personnes apparemment sensées expliquent tout par un complot ourdi par une puissance mystérieuse. Le complotisme, c’est l’aveu de refuser de réfléchir, de penser de manière logique et rationnelle. C’est la paresse de l’esprit et le danger qui ouvre les portes à l’ignorance et au fanatisme.
Quant à la trahison, je vous rapporte une anecdote vraie arrivée à Sacha Guitry, l’homme d’esprit le plus fameux du XXème siècle. Le lendemain de la représentation d’une de ses pièces de théâtre, son secrétaire lui dit: «Maître, ne lisez pas le Figaro, quelqu’un vous veut beaucoup de mal, il déteste votre pièce et conseille au public de ne pas y assister». Très bien, a répondu Sacha Guitry: «ça doit être un homme à qui j’ai rendu quelques services un jour».
«Exactement, Maître».
C’est ainsi. Tout le monde se souvient de l’engagement de notre pays auprès de la Tunisie durant la pandémie. Tant d’aide et de service rendus! Ça s’oublie si vite. L’homme est ainsi, il ne peut pas s’empêcher d’être stupide, de manquer de loyauté et de se laisser asservir par un voisin pourri de fric et de haine.
P.S: En réponse à une question d’un passant, Emmanuel Macron a déclaré à son retour d’Algérie, qu’il se rendrait au Maroc fin octobre.
Cette annonce est fausse. Macron n’a pas été invité au Maroc ni pour la fin du mois d’octobre ni pour après. Je tiens cette information d’une personnalité très proche de Sa Majesté. Ce manque de rigueur, ce non-respect des règles élémentaires des usages diplomatiques prouvent combien Macron traite des problèmes graves avec légèreté et de manière cavalière.