Un espace public détourné pour un terrain de padel, le maire de Tanger risque la révocation

Le ministre des Sports en Côte d’Ivoire, Paulin Claude Danho, et le maire de Tanger, Mounir Laymouri, devant la plaque commémorative représentant le point kilomètre zéro de la voie de la coopération entre le Nord et le Sud de l'Afrique, à Tanger, mardi 1er novembre 2022.

Le maire de Tanger, Mounir Laymouri (à droite), élu du Parti authenticité et modernité (PAM), à Tanger, le 1er novembre 2022. . Said Kadry / Le360   

Revue de presseAprès la construction illégale d’un terrain de padel sur un terrain destiné aux enfants, malgré les oppositions des habitants, le ministère de l’Intérieur a ordonné une enquête approfondie sur des irrégularités majeures impliquant des documents d’urbanisme et la signature controversée du maire. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Al Akhbar.

Le 08/12/2025 à 19h15

Le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, est personnellement intervenu dans une affaire qui secoue Tanger. Il s’agit d’un scandale lié à l’appropriation controversée d’un espace public destiné à devenir une aire de jeux, mais qui a été transformé en terrain privé de padel au profit d’un promoteur immobilier. Le ministre a mandaté l’Inspection générale de l’administration territoriale afin de mener un audit approfondi des documents d’urbanisme, suspectés de comporter de graves irrégularités et manipulations, indique le quotidien Al Akhbar dans son édition du mardi 9 décembre.

Les services de l’Intérieur ont été alertés après la réception de plaintes étayées par des documents attestant de dépassements dans la gestion du dossier. Les plaignants dénoncent des modifications irrégulières de documents officiels permettant de détourner un bien collectif vers un investissement privé. Les habitants affirment que cette transformation illégale porte atteinte non seulement à leurs intérêts, mais également à ceux de la commune de Tanger, propriétaire du terrain. Ces éléments pourraient entraîner l’ouverture d’une procédure de révocation à l’encontre du maire de la ville, Mounir Lymouri, issu du Parti Authenticité et Modernité, en raison de soupçons d’infractions aux lois en vigueur.

Les documents consultés montrent que le terrain concerné couvre une superficie de 338 m² dans le quartier de Boubana. Il était initialement désigné comme une aire verte destinée à accueillir un espace de jeux pour enfants, conformément au cahier des charges ayant permis l’autorisation d’une zone résidentielle composée de villas. Le classement urbanistique impose que ce terrain demeure un espace libre et non constructible, précise Al Akhbar.

Pourtant, les résidents de la zone ont découvert, il y a environ deux ans, que le promoteur avait construit un terrain de padel sans aucune autorisation et avait même commencé à l’exploiter commercialement. La directrice de l’Agence urbaine de Tanger l’a confirmé officiellement dans une réponse adressée aux habitants. Une commission mixte envoyée sur place le 10 octobre 2024 a constaté l’existence d’une construction réalisée illégalement. Elle a recommandé l’arrêt immédiat de l’activité et exigé du promoteur qu’il fournisse les pièces administratives relatives au bâtiment. Or, les documents ultérieurement déposés faisaient état d’un terrain prétendument nu.

Les habitants s’attendaient logiquement à ce que les autorités appliquent l’ordre de démolition relatif aux infractions constatées. Leur stupeur a été immense lorsque le maire de Tanger, Mounir Laymouri, a finalement signé une autorisation de construction et d’aménagement du terrain de padel. Cela, malgré les nombreuses oppositions déposées par les riverains, qui avaient rencontré à plusieurs reprises l’édile et suivi à la lettre la procédure de dépôt d’objections officielles.

Plus encore, l’autorisation signée par le maire est postérieure à la construction effective du terrain, déjà érigé depuis plusieurs mois, souligne Al Akhbar. Les services de l’Agence urbaine et de la Wilaya avaient pourtant exigé l’ouverture d’une enquête publique sur les impacts du projet, à laquelle la population a participé dans les délais requis. Malgré cela, la commune a approuvé la construction le 9 juillet 2025, alors même qu’un document de suivi du chantier, daté du 3 juillet, confirmait l’existence préalable du terrain. Un avis de l’Agence urbaine, datant du 13 novembre 2024, soulignait également que l’activité devait être suspendue.

Le dossier révèle un autre élément troublant: seulement treize jours après obtention du permis de construire, le promoteur a déposé une demande de certificat de conformité, accompagnée d’une attestation signée par l’ingénieur responsable du projet affirmant que les travaux étaient entièrement achevés. La conformité a été délivrée le 22 juillet 2025, ce qui crée un décalage manifeste entre la réalité des faits et les dates figurant dans le dossier administratif. Ces contradictions renforcent les soupçons de manipulations et d’infractions graves susceptibles d’engager la responsabilité de plusieurs acteurs locaux.

Le projet contrevient à plusieurs textes, notamment au cahier des charges du lotissement daté de décembre 2019, à l’autorisation initiale de création de la résidence et aux règles d’aménagement applicables à la zone. Il enfreint également certaines dispositions du Code des collectivités territoriales, en particulier les articles 115 et 101, ainsi que les avis contraignants de l’Agence urbaine.

Les habitants assurent disposer d’une preuve officielle indiquant que le chantier est en place depuis plus de trois ans, en contradiction totale avec les dates déclarées. Ils rappellent que le terrain occupé par le terrain de padel devait être transféré à la commune de Tanger après la réception définitive du lotissement, conformément au cahier des charges.

Par La Rédaction
Le 08/12/2025 à 19h15