Depuis toujours, les générations se suivent sans se ressembler. Des spécialistes occidentaux ont divisé les générations en 7 catégories: la grandiose (1900-1930), la silencieuse (1930-1945), les baby-boomers (1945-1964), la génération X (1965-1980), les millenals ou génération Y (1980-1996), la génération Z (1995-2012) et la génération Alpha (à partir de 2012).
Avant, il y avait peu de changements entre le mode de vie des différentes générations. Aujourd’hui, nous observons des changements radicaux, dus à l’évolution de la technologie numérique.
Depuis toujours, chaque génération fait évoluer sa société, sinon nous habiterions encore dans des cavernes. Les chemins des enfants étaient tracés à l’avance, selon les traditions locales. Les jeunes devaient s’y soumettre. Le savoir et le savoir-faire se transmettaient des aînés aux jeunes. L’écart entre le profil des aînés et des jeunes était minime.
Aujourd’hui, l’ouverture des sociétés à l’universalisme et Internet ont creusé un fossé entre les générations. Les aînés vivent dans un monde numérisé sans y avoir été préparés. Les jeunes baignent dedans depuis leur naissance et sont à l’aise dans ce nouveau monde où les codes et les valeurs changent. Les parents perdent de leur autorité, incapables d’encadrer leurs enfants.
Le savoir et savoir-faire est désormais transmis des jeunes aux aînés. Les baby-boomers et les X sont nés avant la technologie numérique. Certains, analphabètes ou à peine lettrés, ne peuvent utiliser l’outil numérique. Et même instruits, ils peinent. Les aînés demandent de l’aide aux jeunes qui sont parfois intolérants: « Nonnnn! Tu ne sais pas? Mais c’est facile!» L’autorité des aînés s’effrite et leur ego s’écorche!
Il y a des préjugés de part et d’autre qui entravent la communication intergénérationnelle. Les jeunes sont éduqués avec moins de pression et plus de liberté. Ils ont des valeurs, contrairement à ce qui se dit, mais différentes de celles des aînés. Par exemple, le respect selon les aînés, c’est de ne pas regarder en face des adultes ou un supérieur au travail. C’est dsarate, tqaddou laktafe (arrogance). Pour les jeunes, cette attitude relève simplement de la politesse.
Pour les anciens, on ne discute pas les idées ou les ordres d’une personne plus âgée. Les jeunes posent des questions, cherchent le sens et le dialogue, tayjaoubou. Ils sont taxés d’impolitesse.
Les anciens s’arrêtent pour saluer, avec un contact physique. Les formules de politesse prennent du temps. Les jeunes peuvent saluer de loin, en levant la main, sans les «ça va, tout va bien, ta famille…» Les aînés les trouvent sans souab, mnafkhine (impolis, hautains).
Les aînés critiquent le look des jeunes, oubliant qu’eux-mêmes avaient choqué leurs parents avec des looks nouveaux!
On leur reproche d’être individualistes, égoïstes, détachés de la famille. Un jeune: «Je n’ai pas de temps pour tous mes cousins.» Le temps leur manque, c’est sûr, mais ils privilégient des relations avec des personnes qu’ils choisissent selon les affinités. La grande famille s’amenuise.
La notion de temps est différente chez les jeunes qui vivent dans l’instantané. Ils veulent tout atteindre rapidement, surtout qu’ils ont des exemples nocifs de stars devenues rapidement riches, sans effort. Ils consomment trop et alimentent les apparences, influencés par les réseaux sociaux.
Au travail, ils se révoltent quand les anciens, qui ont travaillé avec stylo et papier, leur disent: «Lqitouha sahla (votre travail est facile).» C’est vrai, les jeunes doivent l’admettre! Eux appuient sur le clavier pour ouvrir un dossier. Les aînés ont mordu la poussière des archives jusqu’à en faire des allergies.
Diplômés, ils peuvent se sentir supérieurs aux anciens, moins diplômés, mais expérimentés. Pour eux, ce n’est pas l’ancienneté qui compte, mais la compétence liée à la technologie numérique. Ils peuvent dénigrer un ancien faible en informatique au lieu de l’aider.
Ils refusent la hiérarchie liée à l’autorité et l’exécution de tâches sans leur trouver de sens et cherchent à innover. Ce qui dérange. Ils sont dans la mobilité, dans la nouveauté, changent de travail, de ville, de pays pour améliorer leur situation. Les anciens leur reprochent le manque de fidélité au travail.
Ils recherchent l’épanouissement personnel, contrairement aux aînés qui se consacraient corps et âme au travail. Ayant une vie remplie de loisirs et d’activités liées aux écrans numériques, ils refusent d’allonger leurs journées de travail, contrairement aux aînés.
Les aînés communiquent entre eux. Les jeunes sont solitaires, la tête dans des écrans. C’est leur espace d’apprentissage, d’information, de travail, de socialisation, de jeu…
Les générations Y et surtout Z et Alpha sont addicts aux nouvelles technologies. Le smartphone fait partie de leur vie, leur fait gagner du temps et réduit les distances. Les aînés ont une plus faible capacité d’adaptation aux changements.
Alors, leur faire confiance ou pas?
Socrate, 4 siècles av. J.-C: «Notre jeunesse est mal élevée, elle se moque de l’autorité et n’a aucune espèce de respect pour les anciens.»
Hésiode, 8 siècles av. J.-C: «Je n’ai plus aucun espoir pour l’avenir de notre pays si la jeunesse d’aujourd’hui prend le commandement demain (…). La fin du monde ne peut pas être très loin.»
Pourtant, le monde a continué à évoluer. La jeunesse s’approprie les acquis des aînés, les améliore et les transmet à ses enfants. La relève est assurée.
Il est vrai que les aînés ont du mal à imaginer le monde des prochaines décennies, tellement les repères se sont embrouillés.
Nos jeunes méritent notre confiance. Mais, ils doivent être reconnaissants vis-à-vis des aînés, les respecter et être plus disciplinés, surtout quand ils conduisent des motos ou des véhicules. À eux aussi, leurs enfants diront: «Tu es dépassé, tu ne comprends rien!» Ainsi va la vie!