Khalid Aït Taleb reconnaît la pratique de la «surfacturation» dans les cliniques, faute d’une revalorisation des tarifs

Khalid Aït Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale.

Khalid Aït Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale. . DR

Dans sa réponse à une question écrite d'un député portant sur la surfacturation des actes médicaux, chirurgicaux et biologiques pratiqués dans des cliniques privées, Khalid Aït Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale, a reconnu l’existence de plusieurs «abus», résultat, selon lui, de la non-revalorisation des tarifs de références.

Le 11/10/2022 à 15h15

La revalorisation des tarifications nationales de références (TNR) revient encore une fois sur le devant de la scène. Dans sa réponse à une question écrite posée par Hassan Oumrbit, député à la Chambre des représentants sous l’étendard du Parti du progrès et du socialisme (PPS), portant sur la surfacturation par les cliniques privées des actes médicaux et chirurgicaux ainsi que des examens biologiques et radiologiques, Khalid Aït Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale, a reconnu l’existence d’«abus illégaux portant atteinte aux droits des assurés» et qui sont liés «au manque de transparence dans le système facturation».

Cette situation est le résultat direct de «la non-revalorisation des TNR», note le ministre. «Les TNR sont fixées afin de permettre à la population assurée de bénéficier d’un remboursement, ou d’une prise en charge, des différents actes médicaux et interventions chirurgicales conformément aux conventions nationales conclues entre les prestataires de soins et les organismes gestionnaires de l’Assurance maladie obligatoire (AMO)», explique encore Khalid Aït Taleb.

Il a rappelé par ailleurs que lesdites conventions «n’ont pas été renouvelées depuis 2006, mis à part un avenant, introduit en 2007, portant sur quelques modifications minimes». Résultat: ces conventions sont «caduques» depuis 2009 et les tarifs des prestations médicales sur la base desquelles sont calculés les droits aux remboursements des différents actes médicaux pour les assurés sociaux «sont dépassés».

Le ministre a, par la suite, précisé que l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM) a multiplié les tentatives, sous la supervision du département qu’il dirige, pour renouveler lesdites conventions et réviser les TNR, en vain. «Le retard de renouvellement de ces conventions porte préjudice aux assurés qui paient les prestations médicales à un prix supérieur à la TNR, alors qu’ils sont remboursés sur la base d’une tarification de référence dépassée».

Il convient de rappeler que trois conventions régissant les relations de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et des prestataires de soins qui avaient introduit une nouvelle TNR, avaient été signées, le 13 janvier 2020, par l’ANAM, la CNSS et les représentants des médecins du secteur privé. Cette décision a par la suite reçu le veto du ministère de l’Economie et des Finances, sous la tutelle duquel se trouve la CNSS, et du secrétariat général du gouvernement (SGG).

La raison évoquée pour ce blocage est le refus de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS) de signer ces conventions. Son président, Abdelaziz Adnane, avait justifié sa décision par les impacts négatifs de cette revalorisation des TNR sur les régimes de l’AMO, les couvertures complémentaires, les régimes subventionnés par l’Etat et la mutuelle des FAR.

Selon les précisions apportées dans sa réponse, Khalid Aït Taleb explique que l’ANAM avait déjà réalisé une étude sur l’impact financier desdites conventions sur les organismes gestionnaires de l’AMO, sans toutefois convaincre la CNOPS de les adopter. D’autres mesures ont également été prises par l’Agence pour «contrôler les dépenses médicales», notamment le développement de la médecine préventive, la sensibilisation sur la prescription du générique et la lutte contre les fraudes conformément à la réglementation en vigueur.

Face à ce blocage et pour adopter une nouvelle approche de conventionnement, l’ANAM a convié, le 17 mars 2022, les syndicats des médecins du secteur privé à une réunion avec l’objectif d’enclencher les négociations sur les termes des nouvelles conventions nationales, fait savoir Khalid Aït Taleb, sans toutefois donner plus de précisions.

«Au cours de cette réunion, le ministre de la Santé et de la Protection sociale a donné ses instructions au directeur de l’ANAM et les directions de la santé concernées par cette révision pour entamer les négociations avec les signataires des conventions nationales, à savoir le Collège syndical national des médecins spécialistes privés, l’Association nationale des cliniques privées, le Syndicat national des médecins libéraux et le Syndicat national des médecins généralistes privés», confie Moulay Saïd Afif, pour Le360.

Pour lui, il est intéressant d’adopter de nouvelles conventions nationales et de revoir les TNR avant l’adoption du projet de loi-cadre relatif au système national de santé, approuvé en Conseil des ministres, le 13 juillet 2022.

Faisant suite aux consignes du ministre, les responsables de l’ANAM et les producteurs de soins ont tenu plusieurs réunions pour dresser les premiers traits de ces conventions. «On a tenu des réunions et on a finalisé un cadre conventionnel, notamment les incitations à accorder aux médecins, les délais d’octroi des prises en charge, le restant à charge, la digitalisation de la procédure d’octroi des prises en charge, etc.», déclare Moulay Saïd Afif.

Les jalons des nouvelles conventions étant posés, des discussions sur les TNR des consultations, des journées de réanimation, les lits d’hospitalisation, seront menées dans un premier temps entre les officiels et les producteurs de soins. S’ensuivront des négociations sur les TNR des autres actes. «Ces dernières seront menées spécialité par spécialité», précise le syndicaliste.

Le 11/10/2022 à 15h15