Comment vivre paisiblement dans notre nouveau monde VUCA?

Soumaya Naâmane Guessous.

Soumaya Naâmane Guessous.

ChroniqueNos ancêtres ont vécu dans un monde linéaire: le présent était programmé selon le passé. Les référentiels collectif et individuel étaient statiques, les imprévus rares. Les routes étaient tracées à l’avance. Le futur était prévisible. Quant à nous, nous vivons dans un monde VUCA.

Le 26/05/2023 à 11h00

VUCA, acronyme anglais de «Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity», né dans les années 90 après la chute de l’Union soviétique qui a entraîné une grande instabilité.

VUCA désigne un monde en perpétuelles évolutions: volatile, incertain, complexe et ambigu.

Volatile, à cause des changements fréquents et brusques. Ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera plus demain. L’être humain a besoin de stabilité et de vision claire. Sinon, il est perturbé et angoissé.

Incertain, car avec les changements, nous manquons de connaissances pour prendre des décisions. L’incertitude est causée par divers facteurs: instabilité politique, crises économiques, dérèglement climatique, évolutions technologiques… Le monde devient interconnecté. Un événement à l’autre bout de la planète nous affecte immédiatement.

Il y a donc un manque de confiance dans l’avenir. Les effets de la pandémie et la guerre en Ukraine ont perturbé le monde. Les conséquences de l’augmentation du prix du carburant flambent le prix des tomates marocaines!

Complexe, à cause des informations de plus en plus diverses, souvent incomplètes, contradictoires, aux sources pas toujours fiables et qui peuvent donner des résultats autres que celles envisagées.

Ambigu, à cause de la difficulté à comprendre une situation et les raisons de certains événements. L’ambiguïté rend la vision floue et empêche de faire des choix corrects.

Nous vivons dans un monde VUCA. Notre avenir est VUCA. Les horizons ne sont pas clairs et il devient difficile de prédire les événements à venir, d’où un sentiment d’insécurité.

Les entreprises en souffrent: elles doivent réadapter leur management à un personnel perturbé par les changements et faire face à des marchés où les prix changent continuellement, ne serait-ce sous la pression de la fluctuation du prix du carburant.

L’imprévu nous perturbe. Lorsque la pandémie du Covid a été annoncée, notre angoisse provenait surtout du fait que nous ne contrôlions plus rien. Impossible de planifier, de programmer.

Les changements dus aux évolutions des technologies nous déstabilisent. L’électronique offre du confort, mais crée des désagréments. Quand les voitures étaient mécaniques, nous pouvions réparer certaines pannes avec un peu d’apprentissage ou d’expérience. Lorsque nous soulevions le capot, nous pouvions comprendre d’où provient la panne. Mais avec l’électronique, c’est impossible sans le spécialiste qui fait un diagnostic avec un ordinateur. Ce qui nous rend dépendants et ignorants.

Avant, nous pouvions résoudre des problèmes grâce à notre formation ou notre expérience. Diplômés, nous disions: «J’ai terminé mes études». Et nous fonctionnions toute notre vie avec les connaissances acquises.

Aujourd’hui, nous nous sentons tous les jours ignorants, incapables de résoudre tous nos problèmes. Avant, le contribuable se présentait aux services des impôts et payait ses redevances grâce à l’aide d’un agent. Aujourd’hui, avec la digitalisation, il faut faire sa déclaration par Internet. Pour certains, il faut un long moment d’apprentissage. Pour d’autres, c’est impossible. Il faut demander de l’aide à une personne initiée. Sans oublier que de nombreuses applications en ligne beuguent ou sont incompréhensibles même pour un public initié : frustration et sentiment d’impuissance!

Dans l’avenir, ces changements seront de plus en plus intenses et rapides.

Alors que faire pour rester serein?

Un seul mot, ADAPTATION! Être flexible, sortir de sa zone de confort et accepter les changements.

L’écart entre ce que nous avons prévu et la réalité qui s’impose à nous provoque notre contrariété. Si nous l’acceptons, nous mettons notre énergie à trouver des solutions et des actions pour contrôler la situation.

Si nous la refusons, nous perdons notre énergie à nous lamenter sur nous-mêmes, à chercher des coupables et à nous torturer. S’adapter, c’est s’ouvrir au changement, changer de comportement, accepter d’apprendre de nouvelles choses et se détacher d’un passé que nous avons tendance à sublimer, car il nous sécurise.

Faire de la résistance aux changements, c’est vouloir que le monde s’adapte à nous. Or c’est à nous de nous y adapter.

Les plus jeunes s’adaptent rapidement, car ils ont acquis des réflexes de la digitalisation. Les moins jeunes se sentent souvent dépassés.

Un événement imprévu provoque le stress. Dans cette situation, nous dépensons beaucoup d’énergie pour mieux comprendre notre environnement, trouver des informations pour voir plus clair et pour nous rassurer. À force, le cerveau s’épuise et commence à pomper de l’énergie dans le corps, ce qui provoque des dysfonctionnements au niveau du cerveau, du cœur, des organes…

Pour évoluer sereinement dans ce nouvel environnement VUCA, il faudrait remettre en question nos convictions et nos habitudes.

Nous avons la chance de vivre dans un monde où l’évolution de la science et de la technologie n’a jamais été aussi rapide.

Nous sommes dépassés continuellement. Ce qui est une opportunité d’apprentissage, de développement et d’amélioration.

S’adapter c’est ne pas se battre contre les vagues, mais se laisser aller avec le courant tout en étant critique et en acceptant d’aller vers des nouveautés. Car à l’avenir, le monde ne sera que de plus en plus VUCA.

Aujourd’hui nous vivons la révolution digitale. Internet a tout modifié. L’intelligence artificielle va tout transformer. Alors, adaptons-nous sinon radi yahrabe ‘lina trane (on sera marginalisé).

Et n’oublions pas que «les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements» (Darwin).

Par Soumaya Naamane Guessous
Le 26/05/2023 à 11h00