Agadir: l’ADN pour lutter contre l’exploitation des enfants par les mendiants professionnels

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Revue de presseKiosque360. Les services de police d’Agadir ont décidé de recourir à l’ADN pour établir s’il y a ou pas un lien de parenté entre les enfants et les mendiants qui les exploitent. L’idée est bonne, sauf qu’elle paraît irréalisable face à l’ampleur du phénomène et au coût exorbitant de l’opération.

Le 18/07/2019 à 21h18

Le service préfectoral de la police d’Agadir a décidé d’avoir recours à l’ADN pour établir le degré de filiation qui existerait entre un grand nombre de mendiants et les enfants qui les accompagnent. Une initiative qui survient après la découverte de plusieurs réseaux spécialisés dans la mendicité et exploitant les enfants et les nourrissons. Le quotidien Al Massae rapporte, dans son édition du vendredi 18 juillet, que ces mafias ne se gênent pas pour endormir les enfants avec des somnifères. Ces données ont été recueillies dans le cadre des campagnes menées par la police d’Agadir contre la prolifération de ce phénomène pendant la période estivale. 

Un fléau qui s’est généralisé à toutes les régions du royaume, notamment dans les grandes villes comme Casablanca, Tanger, Marrakech et Fès. Les différentes études établies sur la mendicité depuis des années montrent, en effet, que ce phénomène n’est pas toujours lié à la pauvreté mais qu’il est devenu un métier organisé. Casablanca est, à coup sûr, la ville la plus touchée par la mendicité professionnelle gérée par des mafias qui sévissent à l’échelle nationale. Des mafias qui transportent des femmes et des enfants venus d’ailleurs (Settat, Berrechid) et les répartissent dans les plus grandes artères de la ville. 

Les mendiantes exploitant des enfants loués ou volés se comptent par milliers dans la métropole. Les enfants sont souvent loués par des parents drogués et vivant dans la précarité à des mendiantes professionnelles, moyennant 50 ou 100 dirhams, voire plus. Les mafias de la «traite d’êtres humains» poussent le cynisme jusqu’à apprendre aux enfants comment apitoyer les gens sur leur sort. Un véritable business qui rapporte gros sans le moindre effort. Il suffit de s’asseoir, entourés de trois enfants en bas âge, et de tendre la main dans un coin près d’une banque, d’une mosquée ou d’un établissement public.

Les autorités locales ont beau mener des campagnes pour lutter contre les professionnels de la mendicité, ces derniers finissent toujours par revenir en masse. La ministre de la Famille, Bassima Hakkaoui, vient d’évoquer l’ampleur de ce phénomène devant la Chambre des conseillers. Elle s’en est pris notamment aux faux mendiants qui louent des enfants pour faire la manche dans la rue. Mais elle n’a pas donné de solution à part celle, vraiment étonnante, de proposer des sanctions contre les personnes qui viennent en aide à ces faux mendiants. Un peu simpliste comme proposition, car comment peut-on différencier un vrai mendiant d’un faux?

La ministre aurait pu tout simplement activer les dispositions du code pénal qui sanctionnent la mendicité, en l’occurrence l’article 326 qui dispose: «Est puni de l’emprisonnement d’un à six mois quiconque ayant des moyens de subsistance et se livrant habituellement à la mendicité en quelque lieu que ce soit». L’article 330 du code pénal traite de l’exploitation des enfants: «Quiconque livre l’enfant, la pupille, l’enfant soumis à la kafala ou l’apprenti à un ou plusieurs mendiants ou à un ou plusieurs vagabonds est puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans». Si la loi avait été appliquée à la lettre, le phénomène des mendiants professionnels n’aurait pas pris cette ampleur qui pousse aujourd’hui à préconiser l’utilisation de l’ADN pour déterminer s’il y a filiation ou non entre les mendiants et les enfants qu’ils exploitent.

Par Hassan Benadad
Le 18/07/2019 à 21h18