Abdelilah Benkirane est-il lassé des directs sur les réseaux sociaux? Ou alors Farid Titi, son chauffeur et caméraman, n’était-il pas disponible? Ou alors, ne voulait-il pas s’adresser directement au ministre de l’Intérieur qui a élaboré ce projet de loi, et qui est membre du gouvernement que dirige son successeur, Saâd Eddine El Othmani?
En effet, en réaction au projet de loi qui va être examiné, jeudi 25 février en conseil de gouvernement, Abdelilah Benkirane s'est contenté de poster de nouveau, sur sa page Facebook, un extrait vidéo traitant de la même thématique, mais remontant au mois d’avril 2016. Dans cet extrait, prélevé sur la vidéo d’un discours au long cours qu’il avait prononcé devant les militants de son parti à Salé, l’ex-chef de file des islamistes au gouvernement répond aux appels qui avaient été lancés à cette époque par le PAM, pour dépénaliser les cultures du kif. «Ils mentent au peuple en prétendant défendre les pauvres agriculteurs», avait alors accusé Abdelilah Benkirane, pour lequel la question est déjà tranchée: «le bien ne saurait provenir du mal».
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Dans son envolée lyrique, il avait mis en garde contre ce que de tels appels pourraient représenter comme dangers pour le pays. Dépénaliser le kif, pour Abdelilah Benkirane, reviendrait à en élargir les superficies cultivées. «Et ce sera une source de davantage de calamités pour le pays et une grave atteinte à son image», avait averti l’ex-numéro Un du PJD, qui avait enchaîné son propos en amalgamant la consommation de cannabis aux crimes, voire les plus ignobles: la «violence sur ascendants » (soit attenter à son père ou à sa mère).
«On nous parle de vertus thérapeutiques alors que le kif destiné à un usage médical coûte 14.000 dirhams par hectare au moment où celui destiné à la fabrication de la résine génère entre 40.000 et 50.000 dirhams», avait argumenté Abdelilah Benkirane, une manière de dire que les usages alternatifs du kif ne diminueraient en rien l’usage qui en est actuellement fait.
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Mais l’attaque la plus véhémente a été dirigée contre Ilyas El Omari, à l’époque secrétaire général du PAM. Sans le nommer, il l’avait carrément accusé de velléités séparatistes, lui, «le fils du fkih qui a avoué présider à la prière sans ablutions». Abdelilah Benkirane avait conclu son speech par un appel aux sections de son parti et à la société civile à faire barrage aux appels du PAM.
En dépoussiérant et re-publiant cette vidéo, lance-t-il un appel à la mobilisation contre le projet de loi élaboré par le département de Abdelouafi Laftit? Tout porte à le croire.