Quand la diplomatie algérienne touche le fond, elle ne peut s’abstenir de quand même continuer à creuser. C’est le moins à dire au regard du dernier épisode de la série de réactions, tantôt injurieuses, tantôt confuses, du pouvoir algérien, s’agissant du soutien désormais officiel de l’Espagne au plan d’autonomie du Sahara sous souveraineté marocaine.
Hier, en effet, confrontée au mépris affiché de l’Espagne envers ses attaques, l’Algérie a lamentablement battu en retraite, en tentant une piteuse «clarification» de sa position vis-à-vis de Madrid... Après avoir commis une salve de critiques contre le gouvernement espagnol, et contre son président, Pedro Sanchez.
Tard dans la soirée du mardi 26 avril 2022, l’agence officielle algérienne APS nous a ainsi gratifiés d’une dépêche, citant de mystérieux «observateurs», et affirmant que «le président de la République, qui a toujours soutenu que l’Algérie n’est pas engagée dans le conflit au Sahara occidental, a clarifié la position de l’Algérie vis-à-vis de l’Espagne en réaffirmant les liens étroits entre les deux pays». Cela, «tout en regrettant la toute nouvelle position du chef du gouvernement qui ne peut en aucun cas être celle du peuple espagnol, et encore moins celle du roi Felipe VI, qui n’a jamais été pointé du doigt par le chef de l’Etat algérien, bien au contraire».
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Ces «observateurs» tentaient par là de nuancer l’attaque formulée contre l’Espagne par Abdelmadjid Tebboune, lors de son interview accordée à deux médias algériens, le samedi 23 avril dernier. Le chef de l’Etat algérien avait alors dénoncé un «revirement inacceptable moralement et historiquement» de son voisin au nord. Il faut dire que Tebboune n'y était pas allé de main morte: «nous avons de très solides liens avec l'Etat espagnol mais le chef du gouvernement (Pedro Sanchez, Ndlr) a tout cassé».
Le régime algérien n’avait toutefois pas attendu l’interview de Tebboune pour lancer ses hostilités contre l’Espagne. Dès le 19 mars, Alger avait rappelé son ambassadeur à Madrid. Une attitude pour le moins engagée pour un régime qui clame pourtant à tue-tête n’être qu’un simple observateur de la question du Sahara, et que toutes ses prises de positions à ce sujet participent d’une question de principe. Mais visiblement, l’estocade portée par l’Espagne au dossier du Sahara a fait perdre ses nerfs à l’arrière-garde qui tient le pouvoir en Algérien, au point que Tebboune himself ose un entrisme, une ingérence, et c’est peu dire, dans les décisions d’un Etat souverain comme l’Espagne.
Une attitude à laquelle le voisin du nord a opposé un légitime dédain. «Je ne vais pas alimenter des polémiques stériles mais l'Espagne a pris une décision souveraine dans le cadre du droit international et il n'y a rien d'autre à ajouter», a déclaré José Manuel Albares, chef de la diplomatie espagnole, sur la radio Onda Cero. Mieux encore, il a dit ne retenir de toutes ces déclarations que «la garantie totale de l'approvisionnement en gaz algérien à l'Espagne et le respect des contrats internationaux».
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C’est cette colère espagnole qu’Alger tente aujourd’hui d’apaiser, par un langage douceâtre et bien peu crédible. D’autant qu’au passage, «son» fameux «envoyé spécial chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb», l'inénarrable Amar Belani, s’en est mêlé. Le scribouillard au titre pompeux a été activé pour hausser le ton vis-à-vis de la diplomatie espagnole, en qualifiant, le lundi 25 avril dernier, les propos du chef de la diplomatie espagnole de «désobligeants», d'«offensants» et d'«inacceptables».
«Le ministre espagnol devra en assumer les conséquences», s’est-il même permis d’ajouter. De quelles «conséquences» parle Belani? De ce piteux rétropédalage effectué un jour plus tard, via l’agence de presse officielle, dans l’espoir de laver le très bavard président algérien de son ingérence dans une décision de souveraineté de l’Etat espagnol?
En tout cas, les sorties de ce personnage nous rappellent les épiques tirades d’un Mohamed Saïd Assahaf, propagandiste en chef de l’ex-président irakien Saddam Hussein lors de la première guerre du Golfe et qui, alors que les soldats américains se pavanaient à Bagdad, criait victoire et redoublait de menaces.
Plus sérieusement, c’est surtout une immense nervosité et une absence de lucidité et de discernement que trahit cette logique d’attaquer un jour, puis de battre en retraite le lendemain. Dévitalisé de toute capacité de nuisance, le régime algérien n’a plus, pour exister, que des envolées verbales et des menaces, qui restent sans effet. Alger souffre manifestement d’une diarrhée verbale, incurable, qui accentue son isolement.