La révélation est de taille et c’est le média américain Al Hurra, affilié au Département d’Etat américain qui la rend publique: lors de sa visite à Alger en juillet dernier, le conseiller du président Donald Trump au Moyen-Orient et en Afrique Massad Boulos a discrètement encouragé les autorités algériennes à accepter le plan marocain d’autonomie au Sahara occidental ou, à tout le moins, à peser sur le Front Polisario pour qu’il adopte une approche plus flexible, conforme aux orientations de Washington. Cette démarche, tenue à l’écart de la communication officielle, illustre la volonté des États-Unis de sortir le dossier saharien de l’impasse et de contenir ses effets déstabilisateurs sur la région.
Ce message s’inscrit dans la continuité de la position américaine, explique Al Hurra. Le soutien ferme exprimé par le première administration Trump, annoncée dès 2020, a été réaffirmée en avril 2025 par le secrétaire d’État Marco Rubio après sa rencontre avec Nasser Bourita. «La seule solution au conflit du Sahara repose sur le plan marocain d’autonomie», avait insisté le ministre américain. Dans un message adressé au roi Mohammed VI à l’occasion de la dernière Fête du Trône, le président Donald Trump a d’ailleurs confirmé la reconnaissance par les États-Unis d’Amérique de la souveraineté marocaine sur le Sahara et leur soutien à la proposition d’autonomie marocaine. «Je tiens à réaffirmer que les États-Unis d’Amérique reconnaissent la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, et qu’ils soutiennent la proposition d’autonomie marocaine, sérieuse, crédible et réaliste, comme seule base pour un règlement juste et durable de ce différend», a souligné Donald Trump dans son message adressé au Souverain.
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Depuis, Washington s’active. Recevant pas plus loin que le vendredi 5 septembre dernier l’envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies au Sahara, Staffan de Mistura, le même Massad Boulos a réitéré «la position claire» des États-Unis sur le Sahara: «Une autonomie authentique sous souveraineté marocaine constitue la seule solution réalisable pour le Sahara occidental».
Le tout entre dans le cadre des négociations en cours avant le vote d’une nouvelle résolution sur le dossier du Sahara en octobre prochain. Contrairement aux précédentes, cette résolution pourrait marquer un tournant en soutenant exclusivement le plan d’autonomie sous souveraineté du Royaume et en révisant probablement les attributions de la MINURSO.
La sécurité avant tout
Al Hurra ne dit pas dans quelle mesure Massad Boulos a réussi à se faire entendre mais une chose est sûre selon le media: Alger n’a pas fermé la porte au dialogue avec Washington. La diplomatie américaine, tout en restant ferme sur son soutien au Maroc, privilégie une approche pragmatique avec l’Algérie: maintenir la coopération antiterroriste, sécuriser les approvisionnements énergétiques et favoriser les échanges économiques et culturels.
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«Les relations entre l’Algérie et les États-Unis n’ont jamais été aussi proches qu’au cours des deux dernières années», observe Sarah Yerkes, chercheuse principale à la Fondation Carnegie, cité par le média américain. Selon elle, ce rapprochement tient moins à la politique qu’à «l’essor des échanges culturels et éducatifs, qui ont rapproché les deux sociétés comme jamais auparavant».
Dans un contexte de guerre en Ukraine et de crise énergétique européenne, Alger, deuxième réserve de gaz naturel en Afrique, avec 4,5 trillions de m³ confirmés, et producteur de près d’un million de barils de pétrole par jour, est devenu un fournisseur alternatif, lit-on. Les États-Unis s’intéressent de près à ce rôle stratégique et multiplient les initiatives dans les énergies renouvelables, les mines, la pharmacie et l’économie du savoir.
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Également citée par Al Hurra, Intissar Fakher, chercheuse au Middle East Institute de Washington, explique qu’«il existe d’autres facteurs déterminants dans la relation bilatérale, sans lien direct avec Israël. La stabilité régionale, la coopération militaire potentielle et un partenariat économique élargi comptent davantage pour Alger que l’adhésion aux Accords d’Abraham».
Pour l’heure, Washington semble avoir intégré la ligne algérienne ouvertement hostile à Israël. Le refus ferme d’Alger de toute normalisation ne constitue pas un obstacle majeur pour les États-Unis, qui concentrent pour le moment leurs efforts sur le dossier saharien, lit-on encore. Dans ce jeu complexe, Washington poursuit une stratégie d’équilibriste: maintenir son soutien ferme au Maroc sur le Sahara tout en bâtissant un partenariat sécuritaire et économique avec l’Algérie. Mais entre les deux voisins, les Etats-Unis ont depuis toujours fait le choix du Maroc. Massad Boulos, en se rendant à Alger pour pousser le régime à accepter l’autonomie au Sahara, en apporte une nouvelle preuve.












