En Algérie, avec le colonel Houari Boumédiène qui fut au pouvoir de 1965 jusqu’à sa mort en 1978, la politique d’arabisation devint systématique. Elle reposa sur les conclusions de la 1ère Conférence nationale sur l’arabisation qui se tint du 14 au 17 mai 1975, et qui fit totalement encadrer le pays par la langue arabe, niant ainsi toute existence au tamazight.
L’omniprésence du FLN et de son pouvoir répressif fit que le berbérisme fut à la fois nié et étouffé. C’est pourquoi, au mois d’avril 1980, sa renaissance au grand jour provoqua une immense surprise. Tout partit de l’interdiction d’une conférence du romancier et homme de Lettres Mouloud Mammeri à Tizi Ouzou au mois d’avril 1980, évènement qui fut le signal du Printemps Berbère.
Nous avons vu dans une précédente chronique qu’en 1988, l’ouverture démocratique donna une forte impulsion à la revendication berbériste. Avec la création du MCB (Mouvement culturel berbère), cette dernière devint plus lisible, car elle cessa de s’abriter derrière des paravents politiques qui, jusque-là, en avaient masqué et canalisé la force.
En 1989, Abbassi Madani et Ali Belhadj créèrent le FIS (Front islamique du salut) dont le programme était la création d’un État islamique arabe. Afin de tenter de freiner sa montée, les autorités lui donnèrent des gages en accentuant encore davantage l’orientation arabo-musulmane de l’Algérie dans une démagogique surenchère islamisante et arabisante.
C’est ainsi qu’au mois de juillet 1989, une loi fut votée qui interdisait la formation de partis politiques sur des bases linguistiques. Cette loi visait directement les berbéristes du RCD (Rassemblement pour la Culture et la démocratie), second grand parti à base berbère après le FFS (Front des Forces socialistes) de Hocine Aït Ahmed.
Enfin fut votée la loi du 16 janvier 1991, qui renforça encore l’exclusivisme de la langue arabe, de fortes amendes étant prévues pour les contrevenants.
La contestation berbère reprit ensuite avec la «grève du cartable» quand, durant les années 1994-1995, les élèves kabyles boycottèrent les écoles. Ce mouvement réussit à faire plier les autorités qui créèrent le HCA (Haut-Commissariat à l’Amazighité), rattaché à la Présidence. Cependant, il ne s’agissait là que de poudre aux yeux.
En 1998, de très violentes émeutes suivirent l’assassinat du chanteur Matoub Lounès et, à partir de là, le climat devint insurrectionnel.
Puis, au mois d’avril 2001, la Kabylie se souleva à la suite de la mort d’un lycéen prénommé Massinissa, abattu par la gendarmerie à Beni Douala, et le 14 juin, des Kabyles marchèrent sur Alger avant d’être durement réprimés par la police.
Afin de «lâcher du lest», au mois d’avril 2002, le tamazight fut reconnu comme langue nationale par un «Système» qui tentait de «garder la main» au prix de concessions de façade.
En effet, alors qu’au Maroc, le tamazight, reconnu comme langue nationale doit être enseigné à tous les élèves, en Algérie, seuls les enfants déjà berbérophones peuvent suivre un enseignement dans cette langue. Cette mesure clairement destinée à cantonner le berbère dans ses limites actuelles avait pour but de le sanctuariser en lui interdisant de reconquérir sa place naturelle.