Grand Format-Le360. Réforme de la justice, bilan à mi-mandat du gouvernement, ses activités partisanes... Les confidences d’Abdellatif Ouahbi

Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice. (A.Et-Tahiry/K.Essalak/Y.Mannan/Le360)

Le 16/08/2024 à 19h00

VidéoLe ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a laissé entendre que le débat houleux avec les avocats «ne fait que commencer» indiquant qu’il compte demander la saisine de la Cour constitutionnelle et du Conseil de la concurrence au sujet du code controversé de la procédure civile.

Au cours de son entretien avec Le360, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a livré une nouvelle information relative au recours au Conseil de la concurrence pour savoir si la profession d’avocat est soumise, ou pas, à la loi sur la concurrence. «Nous voulons savoir si l’avocat détient le monopole, sans concurrence, de la défense ou bien si la profession est, elle aussi, soumise à la loi de la concurrence», a indiqué, en substance, le ministre.

Mais, avant d’exposer ses idées et ses arguments, Abdellatif Ouahbi, lui-même avocat de carrière, a d’emblée souligné qu’il ne mène pas «de lutte contre les avocats, mais qu’il vit un débat et mène une réflexion» sur le code de procédure civile, dont quatre principaux points sont rejetés par les avocats, toutes tendances confondues.

Ces derniers manifestent leur colère contre l’instauration du mandataire (au lieu d’un avocat) entre le justiciable et le tribunal, le refus du recours à la Cour d’appel sur des dossiers dont la valeur est inférieure à 40.000 dirhams, le refus de plaider la cassation pour les affaires dont la valeur est estimée à moins de 80.000 dirhams et la possibilité de la révision des verdicts déjà prononcés.

Avec les avocats, a-t-il dit, le bras de fer actuel «n’est qu’un échauffement, le plus dur de la bataille reste à venir». «L’actuel code de procédure civile est vieux de 55 ans, nous avons opté, à travers la procédure législative, de le renouveler, de l’adapter et de l’actualiser à travers une méthodologie et une logique législative et non pas du point de vue organisationnel du métier d’avocat».

À propos de ce que les avocats appellent la fin du recours à l’appel pour les dossiers de 40.000 dirhams ou moins, le ministre a rappelé aux avocats que le nouveau texte garantit ce recours auprès du président du tribunal (1ère instance).

Quant à la nouvelle disposition relative au recours au mandataire en dehors de l’avocat, Abdellatif Ouahbi a expliqué que ce levier existe déjà, la nouvelle loi ne fait que proposer l’élargissement de ce champ. «Un père qui veut défendre le divorce de sa fille, a-t-il le droit de le faire seul ou pas? C’est un droit pour lui», selon le ministre qui s’est déclaré fermement attaché à ses convictions, à savoir notamment la saisine, via le groupe parlementaire du Parti authenticité et modernité (PAM) et le bureau du Parlement, de la Cour constitutionnelle pour trancher sur la constitutionnalité du texte, ainsi que le Conseil de la concurrence.

Pour lui, le compromis n’est pas «une bonne solution» envers le nouveau code de procédure civile. À l’instar de la Chambre des représentants, où ce texte a déjà été adopté en première lecture, Abdellatif Ouahbi a laissé entendre que sa majorité maintiendra ses positions devant la Chambre des conseillers.

Quant au code de procédure civile, dont l’élaboration a été achevée, le ministre de la Justice a confirmé que le chef du gouvernement présidera un conseil du gouvernement autour de ce texte qui va apporter, selon lui, des nouveautés en matière des procès intentés contre les hauts responsables et les membres du gouvernement. «Le code apporte de nouveaux moyens techniques ainsi que des facilités en matière de procédure», a-t-il précisé.

Abdellatif Ouahbi a d’autre part répondu aux revendications des greffiers, souvent en grève, et aux adouls qui réclament le droit de pouvoir réceptionner les fonds issus des transactions des particuliers. «Le statut des greffiers est en cours d’élaboration et la doléance des adouls est irrecevable», a affirmé le ministre.

Interrogé, par ailleurs, sur le bilan à mi-mandat du gouvernement, l’ancien patron du PAM l’a jugé «satisfaisant», sachant que l’exécutif a fait face à divers défis tels que la sécheresse, l’inflation extérieure, la crise liée au Covid-19… Au sujet de ses liens avec le PAM, Abdellatif Ouahbi a annoncé son retour aux activités partisanes à partir de la prochaine rentrée politique.

Par Mohamed Chakir Alaoui, Abderrahim Et-Tahiry, Khalil Essalak et Yassine Mannan
Le 16/08/2024 à 19h00