Camps de Tindouf: le Polisario fait face à une grave rébellion, sur fond de dissensions tribales

Une vue générale montre le camp de réfugiés de Smara dans la province algérienne de Tindouf le 25 février 2016.

Une vue générale montre le camp de réfugiés de Smara dans la province algérienne de Tindouf le 25 février 2016. . Farouk Batiche / AFP

L’emprisonnement de quatre jeunes Sahraouis, dimanche dernier, 20 mars 2022, par les forces du Polisario, puis leur libération alors qu’ils portaient encore de graves traces de tortures, a causé une violente explosion de colère dans les camps de Lahmada.

Le 25/03/2022 à 18h55

Un vent violent de rébellion, attisé par des dissensions entre factions au sein de la tribu même qui dirige sans partage le Polisario, à savoir les Reguibat, souffle actuellement sur les camps sahraouis de Lahmada, dans l’extrême sud-ouest algérien.

Ce vendredi 25 mars à l’aube, des hommes originaires de la faction Oulad Moussa (Reguibat) ont attaqué le poste de contrôle du Polisario installé à la sortie du camp dit «Smara» vers Rabouni (Dairat Mhiriz). Tous les gardes qui s’y trouvaient ont été ligotés et violentés par le groupe d’assaillants en colère, qui a également mis le feu à leur véhicule de «service». Cette attaque intervient en représailles contre les actes de tortures dont ont été victimes des jeunes Sahraouis dans les locaux de «la police du Polisario».

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Les quatre jeunes Sahraouis en question, appartenant à la faction Oulad Moussa, ont été arrêtés dimanche dernier par des policiers de la même tribu de Reguibat, mais relevant de la faction Lebouihate.

D’ailleurs, un incident tribal similaire s’était produit une semaine plus tôt, quand une quarantaine de personnes appartenant aux factions Oulad Moussa et Swaed (une autre faction Reguibat), ont attaqué une poste de police du Polisario et libéré deux jeunes, «kidnappés» le même jour par le clan Lebouihate.

Mais ce qui a mis le feu aux poudres ce vendredi 25 mars, ce sont les traces apparentes de tortures sur les corps de ces jeunes, qui auraient été également filmées de façon dégradante par les sbires du Polisario.

C’est sous la forte pression de leur clan tribal, que le Polisario a été contraint de libérer, dans l’après-midi du jeudi 24 mars, les quatre jeunes Sahraouis que sont les frères Najem et Cheikh oulad Aynina, Mohamed ould El Faqir et Mohamed Ould Deida. Ces derniers ont immédiatement accusé des policiers de Lebouihate de les avoir torturés.

Or, cette dernière faction tribale est connue pour monopoliser les prétendus services secrets du Polisario, et est régulièrement accusée d’exactions et violences policières dans les camps. Cette mission répressive lui a été confiée par son «cousin» tribal Brahim Ghali, lui aussi un Reguibat de la faction Oulad Taleb, dans le cadre du partage des tâches favorisant sa tribu. Mais cette mayonnaise n’a finalement pas pris.

Car, dans la mentalité des jeunes Sahraouis des camps de Lahmada, déjà rongés par l’oisiveté et stressés par un avenir complètement bouché, le cinéma du Polisario, avec sa «RASD», sa police, sa gendarmerie, son tribalisme…, non seulement ne passe pas, mais est régulièrement tourné en dérision, voire violemment contesté par des actes de défi à l’intérieur des camps. C’est ainsi, et alors même que Brahim Ghali croyait avoir trouvé un faisceau de légitimité en se pavanant à Bruxelles, lors du récent sommet UE-UA à la mi-février dernier, des centaines de jeunes des camps de Tindouf se sont attaqués à des «institutions» du Polisario à Rabouni, régulièrement visées depuis par des incendies, alors que les dépôts de carburants et autres magasins ou citernes d’eau appartenant aux milices du Polisario sont très souvent éventrés et saccagés.

Un ras-le-bol généralisé qu’un média du Polisario a résumé à travers la description du climat explosif qui règne actuellement dans les camps de Lahmada, où l’éducation des enfants est à l’arrêt pour cause de salaires impayés aux enseignants depuis septembre dernier, des centres de santé ne disposant même pas du strict minimum et des habitants des camps livrés aux vols à main armée, aux kidnappings avec demande de rançon, aux trafiquants de drogues et d’armes…

Pendant ce temps, le Polisario et l’Algérie tentent de cacher leurs cuisants revers diplomatiques à travers l’enfermement des camps, la répression policière et leurs 500 communiqués militaires mensongers sur la guerre fictive contre le Maroc.

Par Mohammed Ould Boah
Le 25/03/2022 à 18h55