Le magazine français Valeurs Actuelles a consacré son numéro du 22 au 28 août 2024 à la défaillance tous azimuts du régime algérien. L’Algérie y est scrutée sous un prisme qui révèle la réalité brutale d’un système défaillant, gangrené par le militarisme et l’inertie économique. Sous la plume d’experts de renommée, le portrait de ce pays se dessine avec des contours sombres, où la corruption, l’autoritarisme et le désespoir de la jeunesse se mêlent pour former un tableau des plus désastreux.
L’analyse de VA sur l’Algérie contemporaine est d’une pertinence implacable. «Abdelmadjid Tebboune achète la paix en Algérie à coups de subventions, tout en multipliant les arrestations d’opposants», dénonce l’hebdomadaire, avant d’ajouter que «l’armée est la seule institution sur laquelle la politique redistributive produira des effets immédiats et durables. Le reste de l’économie est un puits sans fond. Son moteur est bridé par les vieux carcans socialistes, mité par le travail au noir et la corruption, plombé par une démographie toujours galopante». Cette critique résume la déliquescence d’une économie condamnée par une gouvernance défaillante, où la redistribution des richesses ne bénéficie qu’à une poignée de privilégiés et de généraux, tandis que le reste de la population croupit dans la misère.
Le militarisme en Algérie est dépeint comme le cancer qui ronge le pays. En 2023, l’Algérie a investi 16,5 milliards d’euros en matériel militaire, un montant qui surpasse celui de la France. Cette démonstration de force souligne l’omnipotence des généraux qui, de fait, exercent un contrôle écrasant sur les affaires de l’État. Le magazine évoque ainsi un pays où le pouvoir militaire est devenu l’alpha et l’oméga, éclipsant les institutions civiles et étranglant le potentiel économique du pays.
La relation complexe entre la France et l’Algérie est également examinée avec acuité. VA rappelle la récente reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara ainsi que l’hystérique réaction d’Alger qui a décidé de rappeler immédiatement son ambassadeur à Paris. L’Élysée, «lassé des blocages rencontrés en Algérie, aurait privilégié la réconciliation avec le premier partenaire économique et financier de l’Hexagone en Afrique», souligne le magazine, notant que «le temps n’a pas effacé l’habitude des caciques du Front de libération nationale (FLN) de polluer la relation bilatérale en instrumentalisant l’histoire à des fins de politique intérieure».
«Pour les islamistes, l’Algérie de Tebboune est formidable»
L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, limogé en 2003 de son poste de haut fonctionnaire pour ses prises de position contre le pouvoir algérien, fournit de son côté un éclairage précieux sur la situation intérieure de l’Algérie. Selon lui, «pour les islamistes, l’Algérie de Tebboune est formidable». Il décrit un contexte où «après l’échec du Hirak (2019-2020), brisé par le Covid et par sa propre inconsistance, le pouvoir a interdit toute manifestation publique et a considérablement accru la répression».
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La population, épuisée par la guerre et la répression, ne réclame plus rien, et les voix dissidentes sont étouffées sous une répression féroce: «Des journaux ont été fermés, des journalistes embastillés, certains seraient morts sous la torture. Fatiguée de la guerre, la population a cédé sur tout et ne réclame plus rien», constate Sansal.
Sansal dépeint une Algérie sous l’emprise d’un «modus vivendi» entre militaires et islamistes, une entente qui ressemble à un «plan de partage mafieux du pays et de la rente». Cette coalition perverse entre les élites militaires, les milieux d’affaires, et les courants islamistes a verrouillé la société algérienne dans un étau de corruption et de répression.
L’impératif d’abroger l’accord franco-algérien de 1968
Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie, dénonce de son côté l’accord franco-algérien de 1968 relatif à l’installation des Algériens en France. Selon lui, cet accord «s’impose à la législation française de lutte contre l’immigration, confère des avantages exorbitants aux Algériens souhaitant venir en France, tout en favorisant aussi leur installation illégale par un détournement facile». Driencourt pointe du doigt les failles du système qui permettent aux Algériens de contourner les règles normales de visa, favorisant ainsi une immigration irrégulière en France. Il affirme que «l’accord de 1968 est justement à l’origine de l’immigration algérienne irrégulière du simple fait qu’un visa de court séjour peut être détourné de son but».
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«Alors que les conjoints d’étrangers ont besoin d’un visa de long séjour (VLS) pour venir en France, les conjoints algériens peuvent venir avec un simple visa touristique (visa de court séjour). Ensuite, ils obtiennent une carte de résident au bout d’un an, contre trois ans de vie commune pour les étrangers non algériens. Les parents algériens n’ont pas à démontrer qu’ils exercent l’autorité parentale et contribuent effectivement à l’éducation de leurs enfants. Les ascendants ou descendants algériens à charge n’ont pas non plus besoin d’un visa de long séjour pour venir en France; un visa touristique (court séjour) suffit pour rejoindre sa famille et demander ensuite un titre de séjour de dix ans», explique Driencourt.
«Les autorités françaises qui prétendent combattre l’immigration irrégulière devraient constater que l’accord de 1968 est justement à l’origine de l’immigration algérienne irrégulière du simple fait qu’un visa de court séjour peut être détourné de son but (tourisme, visite familiale) pour bénéficier d’une installation durable en France (que les autres étrangers ne peuvent obtenir que par l’obtention d’un visa de long séjour)», complète le diplomate français.