Médiation au Niger: comment le régime algérien tente pathétiquement de camoufler sa énième marque d’impéritie

Le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, le président Abdelmadjid Tebboune et le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf.

Le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, le président Abdelmadjid Tebboune et le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf.

Humilié par le démenti apporté par Niamey à sa médiation fictive au Niger, le régime algérien annonce de façon pathétique renoncer à ses bons offices qui, finalement, n’existent que dans son récit imaginaire. Un effet yo-yo qui rappelle bien d’autres épisodes et qui devient, de facto, la marque patente de la gouvernance du duo Tebboune-Chengriha. Le récit.

Le 10/10/2023 à 12h40

Le régime d’Alger ne cesse d’étonner. Non seulement par l’étendue de ses échecs, mais aussi, et surtout, par la piteuse énergie qu’il déploie pour les camoufler ou, pire, les maquiller en coups de menton. Il y a eu bien sûr la tentative menée tambour battant, et des mois durant, pour intégrer les BRICS. Comme réponse au niet catégorique que ce groupement a opposé à Alger, le président Abdelmadjid Tebboune, et après une longue sidération, n’a pas trouvé mieux que de déclarer, le mardi 3 octobre, en recevant des responsables de la presse algérienne, que, finalement, «Les BRICS ne m’intéressent plus et le dossier est définitivement clos».

Il y a également eu la candidature algérienne pour l’organisation des éditions 2025 ou 2027 de la Coupe d’Afrique des nations de football (CAN). Face à la robustesse du dossier marocain, l’Algérie a battu en retraite. Mais, pire, elle n’a pas eu le courage de défendre son dossier y compris pour l’édition de 2027. Un forfait qui en dit long sur le défaitisme solidement enraciné dans la tête des caciques du régime. Mais qu’à cela ne tienne. Pour parade, la veille de l’annonce du 27 septembre dernier, elle a inventé séance tenante une «nouvelle approche», figurant dans le communiqué de la Fédération algérienne de football, et voulant que cette dernière «va désormais concentrer ses efforts dans la réorganisation et la redynamisation du football en Algérie, de même qu’elle réitère son engagement indéfectible au profit du développement du football africain».

Dernier épisode en date de ce véritable yo-yo géopolitique, naturellement précédé d’annonces en fanfare avant de se solder par d’éclatantes déconfitures, la médiation autoproclamée du régime algérien au Niger. Cette fois, même l’effet d’annonce n’a pas opéré.

Tout a commencé le lundi 2 octobre, quand le ministère algérien des Affaires étrangères a publié un communiqué officiel annonçant que le Niger a accepté la médiation de l’Algérie. «Le gouvernement algérien a reçu par le canal du ministère nigérien des Affaires étrangères une acceptation de la médiation algérienne, visant à promouvoir une solution politique à la crise du Niger», pouvait-on même lire. Mieux, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a chargé le chef de la diplomatie, Ahmed Attaf, «de se rendre à Niamey dans les plus brefs délais pour y entamer des discussions (...) avec toutes les parties prenantes», selon la même source. Plus crédible et assumé, tu meurs! Sauf que… tout est totalement faux!

La réponse du Niger n’a pas tardé. Le soir même, Niamey rejetait en bloc les déclarations algériennes et affirmait que seul un forum national inclusif, dont la date se fait attendre, pourrait déterminer une solution à la crise et déterminer la durée de la transition. Exit donc l’Algérie qui proposait un plan de sortie de crise dès le mois d’août, se basant alors sur une transition de six mois maximum, dirigée par une personnalité civile et acceptée par tous les bords politiques.

Comme pour illustrer le degré du wishful thinking algérien et la capacité du régime à prend ses aspirations pour des accomplissements, le Premier ministre nigérien, Ali Mahamane Lamine Zeine, enfonçait le clou en déclarant publiquement avoir appris l’annonce algérienne «sur les réseaux sociaux». «Il y a eu incompréhension avec l’Algérie», a-t-il achevé. Et c’est peu dire. «Ce n’est pas parce que nous sommes dans une situation difficile qu’on peut nous manipuler», avait également répondu le chef du gouvernement de transition au Niger.

Alger a-t-elle compris la leçon, présenté des excuses ou tout simplement fait le dos rond face à cet énième fiasco? Que Nenni. Hier lundi 9 octobre, la diplomatie algérienne nous gratifiait d’un autre communiqué dans lequel il est «précisé» que c’est l’Algérie qui aurait décidé de surseoir à l’engagement des discussions préparatoires envisagées dans la crise au Niger, et ce, «jusqu’à l’obtention des clarifications nécessaires» au sujet de la mise en œuvre d’une médiation que personne ne semble lui avoir demandé.

La diplomatie algérienne persiste et signe. «Le mercredi 27 septembre 2023, les autorités nigériennes ont informé, par lettre officielle, le Gouvernement algérien de leur acceptation de la médiation algérienne dans la crise politique, institutionnelle et constitutionnelle à laquelle le Niger est confronté», rappelle le dernier communiqué. Pour le régime algérien, «ces échanges n’ont pas été concluants sur ces deux sujets. De même, des déclarations officielles et publiques d’autorités nigériennes ont suscité des interrogations légitimes quant à leur disposition réelle à donner suite à leur acceptation de la médiation algérienne», lit-on.

En termes de stratégie de fuite en avant, il y a certes bien mieux. Mais un tel niveau d’amateurisme dans l’intervention, d’ineptie dans la gestion et de médiocrité dans la réaction, voilà qui est rare, surtout à l’échelle d’une diplomatie et d’un pays qui se veut influent et «force de frappe». Se faire rabrouer de la sorte par un pays en pleine crise comme le Niger, et par rapport à ce qui devait être une démonstration d’influence régionale, montre juste à quel point les dirigeants algériens sont hors-sol. Déplorable.

Par Tarik Qattab
Le 10/10/2023 à 12h40