Tôt ce mardi, des témoins palestiniens ont fait état de tirs d’artillerie israéliens près de l’hôpital Nasser à Khan Younès, principale ville du sud du territoire et nouvel épicentre des opérations de l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Le Croissant-Rouge palestinien a accusé l’armée israélienne d’avoir mené un tir d’artillerie au quatrième étage de son QG à Khan Younès, et des drones d’avoir ouvert le feu, blessant des personnes qui avaient trouvé refuge dans l’enceinte de ce complexe médical.
Selon le bureau de coordination de l’aide humanitaire de l’ONU (Ocha), les «hostilités s’intensifient» dans cette ville où l’armée israélienne avait affirmé lundi avoir pris le contrôle de postes de commandement du Hamas. L’opérateur palestinien de télécoms Paltel a annoncé une nouvelle coupure des communications d’internet et mobile, conséquence des opérations militaires israéliennes dans le territoire où la situation était déjà critique pour les civils.
Au 109ème jour de la guerre, la situation humanitaire et sanitaire demeure critique dans la bande de Gaza où au moins 1,7 million de personnes (plus de 80% de la population) ont été déplacés vers le sud, dans un espace de plus en plus exigu.
Abrités dans des camps de fortune, la population palestinienne manque de tout. Depuis plus de trois mois, l’enclave palestinienne subit un siège total de l’armée israélienne, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant. Les aides humanitaires passent au compte-gouttes, alors que les agences onusiennes et différentes ONG sur place s’alarment de risques de famine et de la propagation de maladies.
L’attaque du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.140 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes. Quelque 250 personnes ont été enlevées et emmenées à Gaza, dont une centaine libérées fin novembre en échange de prisonniers palestiniens, exclusivement des femmes et des adolescents. Selon le même décompte, 132 otages sont toujours dans le territoire, dont 28 seraient morts.
En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué 25.295 personnes, essentiellement des civils, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, selon le ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, où le Hamas n’est pas représenté, plus de 380 Palestiniens ont été tués par les soldats ou les colons israéliens, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Deux mois de trêve?
Selon le site d’information américain Axios, Israël aurait proposé au Hamas, via la médiation de l’ Égypte et du Qatar, une pause de deux mois dans les combats et les raids à Gaza en échange de la libération de tous les otages.
Cette proposition n’implique pas la fin de la guerre à Gaza, mais une seconde trêve, après celle d’une semaine qui avait permis la libération d’une centaine d’otages en échange d’au moins 240 prisonniers palestiniens détenus en Israël, exclusivement des femmes et des adolescents.
La proposition d’Israël prévoit le retour en Israël des otages vivants et des dépouilles en plusieurs phases dont la première comprendrait des femmes et des hommes âgés de plus de 60 ans, selon Axios. Suivraient ensuite les femmes soldats, les hommes âgés de moins de 60 ans mais qui ne sont pas militaires, les soldats israéliens masculins, puis les dépouilles d’otages.
Dans le cadre de ce plan, Israël et le Hamas devraient s’entendre à l’avance sur le nombre de prisonniers palestiniens libérés en échange de chaque otage selon sa catégorie, poursuit Axios.
«Quelles sont les autres solutions auxquelles ils pensent? Faire partir tous les Palestiniens? Les tuer?»
— Josep Borrell, Haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.
Si le gouvernement Netanyahu discute de trêve, il refuse d’envisager à plus long terme la «solution à deux États», un État palestinien indépendant aux côtés d’Israël, ont déploré lundi des ministres européens des Affaires étrangères. Réunis à Bruxelles, ces derniers ont rencontré tour à tour, et séparément, leurs homologues israélien Israël Katz et palestinien Riyad al-Maliki.
M. Katz a dit chercher à s’assurer du soutien des Européens dans la guerre d’Israël contre le Hamas et pour obtenir la libération des otages. «Le ministre (israélien) aurait pu mieux profiter de son temps et se préoccuper de la sécurité de son pays et du nombre élevé de morts à Gaza», a réagi le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, irrité du refus israélien de discuter de la solution à deux États.
«Quelles sont les autres solutions auxquelles ils pensent ?», s’est interrogé M. Borrell. «Faire partir tous les Palestiniens? Les tuer?», a-t-il ajouté. Les Israéliens «sont en train de semer les graines de la haine pour des générations à venir».
Tensions persistantes dans la région
Au delà des Territoires palestiniens, le conflit exacerbe les tensions dans la région. Depuis le 7 octobre, les échanges de tirs sont quotidiens à la frontière israélo-libanaise entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais. Le nombre des personnes tuées par Israël dans le sud du Liban a atteint les 202 personnes, dont 147 combattants du Hezbollah, décompte réalisé à partir des communiqués du Hezbollah et d’autres groupes alliés, ainsi que des sources officielles et civiles.
En soutien à Gaza, les rebelles Houthis yéménites multiplient les attaques contre le trafic international en mer Rouge et dans le golfe d’Aden ce qui donne des maux de tête aux grands armateurs et accroît la facture du transport maritime.
Dans la nuit de lundi à mardi, les États-Unis et le Royaume-Uni ont bombardé à nouveau des sites Houthis au Yémen dans l’espoir, selon eux, «d’affaiblir» l’arsenal militaire de ces rebelles pour favoriser la reprise du trafic en mer Rouge. Mais pour Mohammed al-Bukhaiti, un haut responsable des Houthis, ces frappes ne font «qu’accroître la détermination du peuple yéménite à assumer ses responsabilités morales et humanitaires envers les opprimés de Gaza».