Annaba, 4e grande ville du pays après Alger, Oran et Constantine, située à une centaine de kilomètre de la frontière avec la Tunisie, a été le théâtre, mardi dernier, d’une opération non pas hollywoodienne, mais tout simplement digne d’un Etat failli.
En effet, comment imaginer que dans un pays connu pour être l’un des plus militarisés et des plus policés du continent africain, un commissariat de police soit attaqué en plein jour par plusieurs éléments d’un gang de quartier, venus libérer un des leurs, en détention dans ce même commissariat pour trafic présumé de drogue.
Après la libération du prévenu, qui a immédiatement pris la fuite et est toujours recherché, le gang a entièrement saccagé les locaux du commissariat, avant de caillasser plusieurs voitures de police, dont certaines ont été sérieusement endommagées. Le gang a profité de l’occasion pour subtiliser des armes de poing.
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Le quartier dit Sidi Salem d’Annaba, où se trouve le commissariat attaqué, était ainsi comme en état de guerre, à tel point qu’il a fallu faire appel à des renforts des autres wilayas et la mobilisation de tous les corps que compte la police algérienne, dont trois brigades spécialisées, celle dite Brigade de répression du banditisme (BRB) en plus de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) et la Brigade cinéphile, appuyées par un hélicoptère qui tournoyait au-dessus d’Annaba.
Après une véritable chasse à l’homme, plusieurs membres du gang qui a saccagé le commissariat ont été arrêtés et leurs domiciles perquisitionnés. Au final, ce sont quelque 59 personnes ayant participé à l’attaque contre le commissariat de police de Sidi Salem qui ont été présentées, mardi dernier, à la presse, avec tout l’arsenal présumé saisi chez eux.
Le butin est énorme, puisqu’il s’agit de dizaines d’épées, de 6 fusils de chasse, d’arbalètes, des harpons, de grenades lacrymogènes, de voitures et motos, de chiens, quelques kilos de cocaïne et bien évidement un important lot de comprimés psychotropes, une drogue dure avec laquelle l’Algérie noie régulièrement les pays voisins.
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Bien que grand producteur de pétrole et de gaz, mais dont les revenus conséquents sont transformés en rente par la junte au pouvoir, l’Algérie est gangrenée par le grand banditisme, auquel la pauvreté de la majeure partie de sa population fait le lit. D’ailleurs, en relatant cette récente attaque contre un commissariat de police à Annaba, le site TSA n’a pas manqué de rappeler que «cette affaire illustre l’ampleur prise par le banditisme et la criminalité en Algérie» où «des gangs lourdement armés sont régulièrement démantelés par les services de sécurité à travers le territoire national, notamment dans les grandes villes».
Ce banditisme de masse est significatif de l’effondrement de l’autorité de l’Etat dans un régime qui a fait pourtant de la répression à tous crins son mode de gouvernance favori. La population est ainsi prise en étau entre deux terrorismes: celui de la junte et celui de bandes qui considèrent que le pouvoir en place est une issaba (gang), selon le qualificatif de l’ancien homme fort du pays: Ahmed Gaïd Salah. L’affrontement entre ces différents gangs est un scénario très plausible.