Le Maroc traverse l’une des pires crises économiques de son histoire, dont les séquelles sur les plans économique et social seront difficiles à atténuer du jour au lendemain. Des pans entiers du tissu productif national sont aujourd’hui à genoux. Des secteurs comme le tourisme et l’événementiel sont exsangues. Des entreprises meurent chaque jour en silence, alors que les rangs des chômeurs grossissent, semaines après semaines, atteignant des proportions préoccupantes.
Pourtant, en dépit de ce sombre tableau, une lueur d’espoir pointe à l’horizon. Pour la première fois depuis le déclenchement de la crise sanitaire au Maroc en mars dernier, les opérateurs économiques et les pouvoirs publics entrevoient, enfin, le bout du tunnel. Au moins quatre éléments expliquent ce regain d’optimisme.
La promesse d’un vaccin efficaceLe premier élément concerne les annonces qui se sont succédées durant le mois de novembre sur l’efficacité de plusieurs vaccins anti-Covid-19. Ces annonces ont agit positivement sur le moral des chefs d’entreprises, et déclenché une vague d’optimisme dans le monde entier, car elles donnent enfin un cap pour une sortie de crise, après plusieurs mois d’incertitudes.
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Un optimisme qui a également gagné le Maroc, et en particulier son marché boursier. Les investisseurs anticipent désormais un retour à la normale, dans quelques mois, de l’activité économique. La promesse d’un vaccin efficace signifie en effet la fin des mesures de confinement et des restrictions. Farid Mezouar, spécialiste des marchés et directeur exécutif de FL Markets, souligne cette évidence: «il apparaît désormais clair que la reprise économique est liée à la découverte d'un vaccin ou d'un traitement».
L’annonce royale relative au lancement d’une campagne de vaccination à grande échelle, avant la fin de l’année, a accentué ce regain d’optimisme au sein des milieux économiques marocains.
«C’est une vraie lueur d’espoir», a déclaré Mohamed Fikrat, vice-président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), au cours d’une rencontre, tenue cette semaine à Casablanca, avec le ministre des finances Mohamed Benchaâboun, lequel, de son côté a affirmé que «des nouvelles encourageantes relatives à l’efficacité de certains vaccins viennent éclaircir l’obscurité de ce contexte dominé par l’incertitude».
Le «Fonds Mohammed VI pour l’investissement» prend formeLe second élément concerne le Fonds Mohammed VI pour l’investissement, pièce maîtresse du plan de relance économique. Les récentes annonces faites par l’argentier du Royaume montrent que le chantier pour l’opérationnalisation de ce fonds stratégique est bien avancé. Et les dernières interrogations concernant son opérationnalisation et son fonctionnement ont été levées.
Doté initialement de 15 milliards de dirhams issus du Budget de l’Etat, le fonds s'appuiera dans ses interventions sur des fonds sectoriels ou thématiques. 30 milliards de dirhams de capitaux additionnels seront levés auprès d’investisseurs institutionnels, d’institutions publiques ou privées, pour démultiplier ses capacités d’intervention.
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Le lancement des six premiers fonds thématiques autour desquels sera structuré le «Fonds Mohammed VI pour l’investissement» se fera dans «les prochains mois», a indiqué Mohamed Benchaâboun.
Mieux encore, en attendant l’opérationnalisation dans «les prochains mois» des fonds thématiques, le compte d’affectation spécial créé en août dernier et intitulé «fonds d’investissement stratégique» est déjà opérationnel.
Les premières interventions pourront avoir lieu avant la fin de l'année dans un cadre conventionné avec le système bancaire. Ces premières interventions consisteront notamment à agir sur le renforcement des fonds propres des entreprises. Les patrons de sociétés sont appelés à recourir au maximum à ce fonds, afin de mettre en place un cercle vertueux d’investissement.
Industrie: la machine tourne à nouveauC’est le troisième élément positif qui dénote d’un regain d’optimisme: certaines industries se remettent presque à tourner à plein régime.
«C’est le cas, notamment, pour certaines filières industrielles, dont l’automobile, l’électronique, le textile et cuir et l’agroalimentaire, en ligne avec le redressement du taux d’utilisation des capacités de production (TUC)», souligne la Direction des études et de la prévision financière (DEPF) dans sa dernière note de conjoncture. Le TUC est un indicateur est un indicateur de performance de l’appareil productif, qui mesure l'intensité avec laquelle les industries utilisent leur capacité de production.
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La dernière enquête de conjoncture réalisée par Bank Al-Maghrib montre une amélioration sensible du TUC au Maroc. Il a augmenté de 7 points entre les mois d’août et septembre 2020 passant de 63% à 70%, revenant presque à son niveau d’il y a un an (73%), soit avant le déclenchement de la crise sanitaire. La hausse d’un mois à l’autre de cet indicateur a concerné l’ensemble des branches industrielles. Sur une base trimestrielle, le TUC s’est accru de 11 points au troisième trimestre 2020 par rapport au deuxième, toujours selon la DEPF.
Cette légère embellie du secteur industriel se retrouve par ailleurs dans la dynamique récentes des exportations au troisième trimestre: +26,5% pour l’automobile, +11% pour les industries alimentaires (+33,3%), +4% pour le textile et le cuir, et +12% pour l’industrie pharmaceutique.
La pluie est de retourLes dernières pluies au Maroc sont également facteurs d’optimisme. On oublie souvent que la crise économique aigüe que traverse l’économie nationale est aussi le fait de deux années consécutives de sécheresses.
Après une campagne céréalière 2019-2020 de 30 millions de quintaux, soit la pire moisson de ces dix dernières années, les pluies ravivent l’espoir, en particulier chez les exploitants et les fellahs, d’une campagne agricole 2020-2021 bien meilleure.
«Ce sont quelques dixièmes de PIB qui tombent du ciel. C’est de bonne augure», a commenté Mohamed Fikrat, qui est aussi PDG de Cosumar, le géant marocain du sucre.
Les abondantes précipitations de ces derniers jours, sont aussi de nature à atténuer le stress hydrique qui plane sur le Maroc, alimentant de nombreux barrages presque à sec.
Quant aux chutes de neige, qui ont concerné plusieurs régions du Royaume, elles sont une bénédiction pour les nappes phréatiques. Pourvu que ça dure…