Des perspectives rassurantes après une année compliquée: telle est la perspective du président-directeur général de Managem, Imad Toumi, exprimée lors de la présentation, le jeudi 21 mars à Casablanca, des résultats financiers du groupe pour l’année 2023, marqués notamment par un chiffre d’affaires en baisse de 22%, à 7,508 milliards de dirhams.
Une régression que le patron du groupe minier explique par la forte baisse des cours du cobalt (-45%) sur le marché international, causée par une importante augmentation de l’offre, du zinc (-23%) et du cuivre (-3%). Elle résulte aussi d’une diminution des volumes d’or vendus par Managem, en raison de la suspension de l’activité du groupe au Soudan et des perturbations des opérations de sa mine Tri-K en Guinée. «Ces résultats ne remettent pas en cause les fondamentaux du groupe, surtout notre plan stratégique de développement», a-t-il toutefois rassuré.
Quatre grands projets pour doper la croissance
Après ce coup de frein, Managem se projette dans l’avenir pour renouer avec la croissance, dans le cadre d’une feuille de route 2024-2030. Un plan qui commence par quatre grands projets qui «vont réellement changer la taille du groupe à court terme et entraîner une évolution significative de nos chiffres et de nos marges dès 2025», soutient Imad Toumi.
Dans la liste, on retrouve d’abord la mine de cuivre de Tizert, dans la province de Taroudant. Pour un investissement de près de 4 milliards de dirhams, l’exploitation de ce gisement, à partir du deuxième semestre 2025, permettra de doubler la production cuprifère au Maroc.
Deuxième grand projet: la première usine marocaine de sulfate de cobalt dans le complexe de Guemassa, fruit du contrat signé par Managem avec Renault Group. Le site, qui entrera en service au cours du deuxième trimestre 2025, devrait produire 5.800 tonnes par an de sulfate de cobalt, dont 80% seront livrés au constructeur français.
Managem prévoit également d’étendre la superficie et la production de la mine aurifère guinéenne de Tri-K d’ici la fin 2024. «Cette mine a produit 300 kg d’or cette année, un volume largement en dessous de ses potentialités. Nous voulons tripler sa capacité de production et la faire passer de 2 à 6 tonnes par an», a annoncé Imad Toumi, précisant que le futur investissement est estimé à plus de 300 millions de dollars.
Consolidation des activités aurifères
Enfin, le site de Boto au Sénégal, dans la région aurifère de Kédougou (sud-est), entrera en service à partir du deuxième semestre 2025. Acquis par le groupe Managem fin 2022 auprès de la minière canadienne IAM GOLD, avec deux autres projets en Guinée et au Mali, ce gisement dispose une capacité de production annuelle de 5.000 kg d’or, moyennant un investissement de 3,5 milliards de dirhams.
Pour financer son plan de développement, Managem a lancé une opération d’augmentation de capital de 3 milliards de dirhams, validée le 1er mars dernier par l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC). La période de souscription, ouverte le 14 mars, prendra fin le 2 avril 2024.
Le groupe envisage aussi de consolider, d’ici 2030, ses activités aurifères et étendre son portefeuille à travers la création d’une nouvelle entité dénommée Managold. Cette structure pilotera un futur projet en Guinée «similaire en taille à celui Boto» qui va démarrer sa production d’ici 2028, ainsi qu’un autre au Mali, opérationnel à l’horizon 2030. «Nous disposons actuellement d’un portefeuille de 300 tonnes d’or en terre. Notre objectif est d’atteindre les 500.000 onces d’ici 2030 grâce à ces futurs projets, pour devenir un acteur régional de premier plan dans l’or en Afrique», explique Imad Toumi.
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Surtout, le groupe Managem souhaite profiter du boom de la mobilité électrique et intégrer la filière internationale des batteries pour véhicules électriques (VE). Modus opérandi: ne plus se limiter à l’extraction et la vente à l’état brut de métaux entrant dans leur fabrication, pour passer à la transformation en produits à forte valeur ajoutée.
«Aujourd’hui, 90% des produits raffinés utilisés dans la fabrication de batteries pour véhicules électriques proviennent de la Chine et sont acheminés dans des usines en Europe et aux États-Unis. Nous voulons les transformer au Maroc et les revendre à nos clients qui s’activent dans le secteur automobile», indique le patron du groupe.
Devenir un fournisseur de composants de batteries pour VE
Une nouvelle entité dénommée Managreen sera la locomotive de cette stratégie à l’horizon 2030, selon un programme en deux phases. La première consistera à renforcer les métiers traditionnels d’extraction de métaux (cobalt, graphite et manganèse), avant de passer au développement d’une transformation primaire et secondaire de produits semi-finis adaptés à l’industrie automobile.
L’objectif de Managem est de devenir «un acteur de référence et un fournisseur privilégié de matériaux essentiels dans la fabrication des batteries pour les véhicules électriques» dans le futur écosystème de gigafactories au Maroc. L’usine de sulfate de cobalt constitue d’ailleurs «l’une des premières briques fondamentales» de cette stratégie, souligne Imad Toumi.
Managem compte ainsi nouer des partenariats financiers pour réaliser ces lourds investissements, mais également des collaborations industrielles et technologiques avec des acteurs majeurs du secteur. Exemple type: l’accord signé le 9 novembre 2023 entre sa filiale Reminex, spécialisée dans la construction et l’ingénierie de projets, avec la société d’ingénierie chinoise China Electronics Corporation (CEC) pour la construction de l’usine de sulfate de cobalt de Guemassa.
D’après Imad Toumi, le groupe dispose de nombreux atouts pour se positionner dans la chaîne de valeur de la transition énergétique, notamment grâce à son important portefeuille de ressources minières. Des atouts «qui doivent être transformés en avantages compétitif et commercial dans un monde qui sera ouvert».