Maroc Telecom: l’après-Ahizoune prend forme

Mohamed Benchaâboun, président du conseil d'administration de Maroc Telecom.

Revue de presseFace à une concurrence accrue, une régulation plus exigeante et des usages en forte expansion, l’opérateur historique mise sur l’Afrique subsaharienne, l’innovation partenariale, et une gouvernance allégée, pour affirmer sa résilience et préparer son avenir numérique. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Éco.

Le 27/07/2025 à 18h57

Deux décennies après avoir été façonné par la vision d’Abdeslam Ahizoune, Maroc Telecom poursuit sa mue, dans un secteur en pleine mutation. L’opérateur historique avance, mais est désormais contraint de se réinventer pour garder la tête dans un marché où la régulation se durcit, la concurrence s’organise et les usages explosent, écrit le quotidien Les Inspirations Éco.

Les derniers résultats semestriels peuvent, pour preuve, en témoigner. À l’heure de l’après-Ahizoune, la solidité financière en est le socle, mais l’expansion, la coopération, sans compter la réorganisation, deviennent de nouveaux mantras.

À fin juin 2025, le chiffre d’affaires consolidé de Maroc Telecom s’est élevé à 18,04 milliards de dirhams, affichant une croissance, certes timide (+0,9%, à change constant). Dans un marché domestique mobile sous forte pression (-3,4% des revenus dans le Royaume), c’est l’Afrique subsaharienne qui tire la locomotive.

Les filiales, regroupées sous la bannière Moov Africa, représentent désormais plus de la moitié du chiffre d’affaires, avec une croissance de 5,3%, grâce à la montée en puissance de la data mobile, du Mobile Money et de l’Internet fixe.

Cette bascule africaine, méthodiquement préparée, s’affirme comme le principal relais de croissance. Du Tchad, en passant par le Togo, Maroc Telecom capitalise sur ses positions historiques et sur un modèle de gestion industrialisé, pour ajuster ses offres, contrôler ses coûts, et diversifier ses revenus.

Dans ce contexte contrasté, la discipline, toute financière, reste l’une des marques de fabrique de l’opérateur. L’EBITDA frôle ainsi quelque 9,1 milliards de dirhams, avec une marge encore robuste (50,3%), malgré une petite érosion.

Mais, signe de résilience, le Résultat net part du groupe a quant à lui marqué une progression notable, se portant à quelque 4,12 milliards de dirhams, boosté par une rétrocession exceptionnelle, liée au règlement du litige qui avait trait au dégroupage. Hors éléments exceptionnels, le bénéfice net ajusté a, quant à lui, grimpé de 1,6%.

Pour préserver ces équilibres, Maroc Telecom module ses investissements, souligne Les Inspirations Éco. Les CAPEX, hors fréquences et licences, représentent 15,7% des revenus à mi-exercice, et devraient atteindre 25% d’ici fin 2025 pour accompagner le déploiement de la 5G dans le Royaume. Dans le même temps, le cash-flow opérationnel ajusté a crû de 6,7%, se portant à plus de 5 milliards de dirhams, ce qui maintient une dette nette maîtrisée, équivalente à 0,9 fois l’EBITDA.

Le Groupe amorce aussi un virage stratégique vers la mutualisation des infrastructures. Le partenariat conclu avec Inwi en 2025 marque un précédent. À travers les joint-ventures Uni Fiber et Uni Tower, Maroc Telecom co-investit pour partager le déploiement de la fibre optique et des infrastructures de la 5G dans le Royaume. Objectif: rationaliser les coûts, étendre plus vite la couverture, et répondre à une demande exponentielle de connectivité haut débit.

Avec un budget de quelque 4,4 milliards de dirhams sur trois ans, ce programme table sur un million de prises FTTH d’ici 2027, et jusqu’à trois millions à l’horizon 2030.

Côté tours télécoms, l’ambition est d’atteindre 2.000 sites mutualisés, dans trois ans, puis 6.000, à terme. Une première dans le Royaume, qui ouvre la voie à un modèle d’opérateur d’infrastructure plus ouvert, aligné sur les exigences de neutralité technologique et de régulation.

Pour financer cette montée en puissance, Maroc Telecom a réalisé cette année la première émission obligataire de son histoire, levant 3 milliards de dirhams auprès d’institutionnels, à des conditions jugées prudentes (maturité deux ans, taux fixe de 2,37%).

Sur le continent, le groupe s’appuie aussi sur des partenariats internationaux. Avec la SFI, il a sécurisé deux prêts totalisant 370 millions d’euros pour étendre la 4G, au Tchad et au Mali.

La rupture est également institutionnelle. En juin, Maroc Telecom a tourné la page du modèle dualiste (Directoire/Conseil de surveillance) au profit d’un Conseil d’administration unique. Objectif: raccourcir les circuits décisionnels, fluidifier la coordination entre le Royaume et ses filiales africaines, et renforcer la cohérence stratégique dans un marché où l’agilité prime.

Maroc Telecom saura-t-il inscrire ces changements dans une dynamique de rupture? L’arrivée de la 5G dans le Royaume, la digitalisation des services pour les entreprises (IoT, cloud, cybersécurité), l’essor du Mobile Money et de la data fixe en Afrique ouvrent de nouveaux relais de croissance. Mais la bataille se jouera aussi sur la capacité à garder la confiance des régulateurs, des investisseurs et des clients, dans un secteur devenu ultra-concurrentiel, conclut Les Inspirations Éco.

Par La Rédaction
Le 27/07/2025 à 18h57