«La première vague de licenciement a été lancée sur la base de projections tablant sur une reprise d’activité à partir du mois de juillet. Sachant que l’espace aérien restera fermé au moins jusqu’au 10 octobre prochain, il faudra donc compter trois mois additionnels d’inactivité par rapport aux projections initiales», explique ce haut responsable à RAM, qui confirme l'annonce imminente d’une deuxième vague de licenciements.
Après l’opération de départs volontaires qui a touché 141 salariés, la compagnie a enchaîné avec une première vague de licenciements économiques, ciblant 140 employés, dont 65 pilotes.
Leur licenciement ayant pris effet le 31 août dernier, les chèques d’indemnisation viennent d'être remis aux salariés concernés, alors que la tension est montée d’un cran entre la direction de la compagnie et les pilotes de ligne. Ceux-ci se disent prêts à réduire leurs salaires (à hauteur de 400 millions de dirhams, sur trois ans) pour éviter ces licenciements.
Leur proposition a été jugée trop tardive du côté de RAM, qui n’a pas hésité à débloquer les 250 millions de dirhams, soit le coût du licenciement économique de 65 pilotes (sans compter les 50 hôtesses de l’air et stewards et 16 membres du personnel au sol).
«Ces propositions auraient pu être discutées lors du Comité d’entreprise. Malheureusement, les représentants syndicaux et les délégués du personnel ont choisi la politique de la chaise vide», déplore-t-on du côté du management de RAM.
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A travers l’Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL), le personnel navigant technique est décidé à militer en faveur d’une réintégration des pilotes licenciés dans le cadre d’une procédure entachée, à leurs yeux, de plusieurs vices de forme. A défaut d’accepter leur appel à une réduction salariale, un préavis de grève sera déposé à une date qui sera fixée par le bureau de l’association, en fonction de l’évolution des événements et du contexte sanitaire.
Cette décision a été actée par voie de référendum organisé par l’AMPL début septembre, à l’issue duquel 308 pilotes, parmi un total de 469 membres, ont voté en faveur de la tenue d'une grève.
Pour le PDG de RAM, Abdelhamid Addou, les 65 pilotes licenciés «font partie du passé». C’est ce qu'il a, du moins, ouvertement signifié lors d’une rencontre, il y a quelques jours, avec une trentaine de jeunes pilotes. «Le PDG nous a sommé de revenir avec une proposition de baisse salariale. Sinon, 102 pilotes seront licenciés», nous confie un membre de l’AMPL, présent à cette réunion.
Entre-temps, la direction de RAM et l’AMPL se livrent une guerre de communication par médias interposés, dans laquelle tous les coups sont permis: accusations de diffamation, soupçons de trahison à la cause nationale, sommes faramineuses empochées par les pilotes licenciés, etc.
Un climat houleux, qui rend difficile, voire impossible, tout éventuel dialogue entre la compagnie et ses pilotes de ligne. «Comme le stipule le Code du travail, le dialogue reste ouvert avec les partenaires sociaux, à savoir les représentants des syndicats et les délégués du personnel», insiste-t-on du côté de la direction de RAM. Autrement dit, l’AMPL sera désormais écartée d’éventuelles futures négociations.
Dans ce climat de relations très tendues entre RAM et l’AMPL, le licenciement d’un copilote, au cours de cette semaine qui s'achève, a remis de l’huile sur le feu. Contrairement à ses collègues licenciés pour des raisons économique (au nombre de 65), M.O, Officier pilote de ligne, a été licencié «pour faute grave». Il est accusé d’avoir proféré des «insultes au management de RAM» lors d’une visioconférence rassemblant les membres de l’AMPL en date du 27 août dernier.
«L’intéressé était ce jour-là en période de congé. L’insulte ne peut avoir lieu que dans l’enceinte de l’entreprise. De plus, il s’agit d’une réunion privée limitée aux membres de l’association», soutient l’AMPL.
Après une séance d’écoute, RAM a estimé que les arguments fournis par M.O ne sont pas convaincants, et ne peuvent en aucun cas l’innocenter des fautes commises. Son départ porte donc à 66 le nombre de pilotes licenciés par la compagnie, depuis le début de la crise sanitaire.
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