Le Royaume a posé les jalons pour devenir un acteur mondial majeur dans le domaine de la production des combustibles verts. Le ton a été donné, suite aux orientations royales découlant de la réunion de travail consacrée, le 22 novembre dernier, au développement des énergies renouvelables et à l’élaboration d’une «offre Maroc» opérationnelle et incitative, couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur de la filière de l’hydrogène vert.
Une vision avant-gardiste qui permettrait au Maroc de se positionner durant les prochaines années sur la carte mondiale de ce gaz propre, ou le «nouveau pétrole» comme d’aucuns aiment l’appeler. Il faut dire que le Royaume ne manque pas d’atouts pour réussir cette ambition, d’autant plus qu’aucun pays n’exporte encore de l’hydrogène vert et que le marché est très demandeur.
Sur un pied d’égalité
Lors d’une conférence organisée récemment à l’occasion du 17ème anniversaire de l’Académie Hassan II des sciences et techniques, un parterre d’experts et de chercheurs a passé en revue les enjeux du développement d’une plateforme nationale capable de répondre à la demande nationale et internationale en molécules vertes.
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«Le Maroc n’était pas considéré jusque-là comme un exportateur d’énergie, mais il pourrait bien le devenir. Les plus récentes études mondiales considèrent le Maroc comme un exportateur d’hydrogène vert en 2030», a indiqué Philippe Tanguy, membre associé de l’Académie Hassan II et directeur général de la stratégie chez le spécialiste canadien de l’hydrogène HTEC. Et d’ajouter: «L’avantage, cette fois-ci, c’est que le Maroc part à égalité avec tout le monde, personne n’exporte encore de l’hydrogène vert. La course est lancée et le Maroc va certainement y trouver sa place».
Flairant le potentiel des énergies renouvelable il y a des années, le Maroc peut aujourd’hui capitaliser sur près de 14 ans d’expériences et d’investissement en la matière, depuis le lancement en 2009 par le roi Mohammed VI de la nouvelle stratégie énergétique du pays, basée essentiellement sur les énergies renouvelables et le développement de l’efficacité énergétique.
14 ans d’expérience
«Aujourd’hui, notre pays, sous la conduite éclairée de Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, affiche une volonté claire pour la mise en œuvre d’une stratégie nationale qui vise la création d’une filière économique et industrielle autour de molécules vertes, traduisant sa certitude quant à l’importance de ce chantier dans le processus de décarbonation de l’industrie, la diversification du bouquet énergétique et le renforcement de la sécurité de l’approvisionnement en intrants énergétiques et non énergétiques», a souligné le secrétaire perpétuel de l’Académie Hassan II, Omar Fassi Fehri.
L’une des caractéristiques distinctives de cette vision royale est l’investissement du Maroc ces dernières années dans la réalisation de grandes centrales d’énergies renouvelables, cumulant une puissance installée de 4.031 MW, soit 1.770 MW pour l’hydraulique, 1.430 MW pour l’éolien et 830 MW pour le solaire, selon les chiffres du ministère de la Transition énergétique.
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Outre le potentiel considérable en énergies renouvelables dont il dispose, le Maroc devrait également capitaliser sur sa nouvelle politique de dessalement de l’eau de mer pour produire de l’hydrogène vert grâce à la technologie de l’électrolyse, qui consiste à séparer une molécule d’eau en Hydrogène (H2) et en Oxygène (O2) par un apport d’électricité produite à partir de sources renouvelables.
Lors d’une séance de travail consacrée au suivi du programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation, tenue le 9 mai à Rabat, le Souverain a appelé à accélérer les projets de mobilisation des eaux non conventionnelles, à travers notamment la programmation de stations de dessalement de l’eau de mer. Un investissement supplémentaire important a été consenti pour le programme, portant son budget global à 143 milliards de dirhams.
Un avantage compétitif pour l’industrie
Au-delà de sa production et de son exportation, Philippe Tanguy insiste également sur le besoin de tirer profit localement de cette énergie, et d’en faire bénéficier l’industrie nationale qui s’apprête à relever un grand défi à l’export, celui de la taxe carbone.
En effet, l’hydrogène n’est pas seulement une source d’énergie, mais également un vecteur énergétique qui peut être stocké à grande échelle et sur le long terme. Il peut être utilisé dans un réseau de gaz naturel mélangé au méthane pour générer de la chaleur, dans le réseau électrique pour produire de l’électricité ou encore dans un véhicule comme source d’énergie pour une motorisation électrique.
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L’hydrogène peut aussi intervenir dans le domaine de la chimie pour être utilisé comme matière de base pour la production d’ammoniac (engrais) et du méthanol utilisé comme carburant ou solvant dans les plastiques, ciments, encres et diverses peintures, ce qui réduirait significativement l’empreinte carbone de plusieurs industries locales.
Une feuille de route ambitieuse
Afin de positionner le Maroc, dès aujourd’hui, sur l’hydrogène vert, en tant que solution technologique de conversion et de stockage d’énergie, une feuille de route nationale a été élaborée par la tutelle. Elle ambitionne de capter jusqu’à 4% de la demande mondiale en molécules vertes d’ici 2030.
Selon cette feuille de route, deux piliers seront envisagés pour le développement de l’industrie de l’hydrogène vert au Maroc à court terme (2020-2030), le premier étant l’utilisation locale comme matière première dans l’industrie, en particulier pour la production de l’ammoniac vert dans l’industrie des engrais. La deuxième porte sur l’exportation de produits issus de l’hydrogène vert vers des pays engagés dans des objectifs ambitieux de décarbonation.
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À moyen terme (2030-2040), d’autres conditions favorables, particulièrement la réduction des coûts des produits de l’hydrogène vert et la mise en place d’une réglementation environnementale, permettront de développer des premiers projets économiquement viables, notamment pour l’ammoniac et l’hydrogène verts, au niveau national et international.
Il est de même pour les exportations de combustibles liquides synthétiques tels que le kérosène, le diesel ou l’essence dans le cas de l’adoption d’une réglementation environnementale encourageante dans les régions importatrices des dérivés de l’hydrogène vert comme l’Europe, ce qui présente pour le Maroc des opportunités afin de développer progressivement cette filière.