La loi relative à la création du Fonds Mohammed VI (FM6) doit incessamment entrer en vigueur après l’adoption de son décret d’application. Pour que le Fonds puisse jouer pleinement son rôle de catalyseur de la relance économique, les économistes du parti de la Balance ont émis 10 recommandations concernant à la fois la taille du Fonds, son mode d’intervention et les secteurs ciblés.
1. Le montant initial prévu est de 45 milliards de dirhams, dont 15 milliards issus du budget 2021 de l’État, qui avec l’effet de levier, devrait permettre de mobiliser les 30 milliards de dirhams restants. Or, selon l’AEI, ce montant risque de s’avérer rapidement en deçà des ambitions du pays, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des plans de relance et du déploiement des grandes stratégies devant découler du nouveau modèle de développement. Les économistes istiqlaliens estiment que la société anonyme incarnant le Fonds Mohammed VI doit rapidement envisager la possibilité d’accroitre substantiellement ses ressources pour porter les projets ambitieux qui en découleront.
2. L’AEI attire l’attention sur la nécessaire convergence des projets ciblés par le Fonds, avec le budget d’investissement de l’État, des régions, des établissements publics et du Fonds Hassan II, afin d’éviter toute redondance et développer des synergies. Parallèlement, souligne la même source, il faut veiller à tirer profit de l’effet multiplicateur du moindre dirham investi. «Nous sommes sur une logique de long terme, nécessitant une vision globale et une planification stratégique de tout le dispositif à l’échelle nationale et territoriale», note l’AEI.
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3. L’AEI recommande la création de fonds régionaux avec la participation du Fonds Mohammed VI, des conseils régionaux et d’autres partenaires publics et privés, en vue d’investir dans des projets directement productifs tels que les zones d’activités économiques (industrie, tourisme, pépinières d’entreprises…), la distribution d’électricité et de l’eau, l’assainissement liquide et solide, les infrastructures directement liées au développement de nouvelles activités productives et la création de sociétés foncières à portée régionale dédiées à ces activités. Les fonds régionaux peuvent aussi participer au capital d’entreprises créatrices d’emplois au niveau de la Région. Des appels à projets peuvent être organisés pour attirer les projets à plus fortes retombées économiques et sociales pour les régions concernées, préconise l’AEI.
4. Pour accompagner les stratégies d’ouverture du Maroc sur les économies de l’Afrique sub-saharienne et se positionner en tant qu’acteur actif de la mise en œuvre de la ZLECAF, l’AEI estime qu’il serait opportun d’envisager, dès à présent, un compartiment dédié à l’appui aux investissements pour le développement du continent, en s’appuyant sur les ouvertures que permettrait Casa Finance City (CFC).
5. L’AEI souligne également la nécessité de consacrer à la PME et aux startups une part expressément définie, dans le cadre de fonds thématiques dédiés. La mission de ces derniers consisterait à renforcer la structure financière de PME viables et de prévenir des pertes de tissus productifs et d’emplois.
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6. Pour en faire un véhicule de développement inclusif, le Fonds compte se déployer à travers des fonds thématiques à caractère sectoriel ou transversal. Outre les secteurs annoncés, le lancement de startups innovantes, indispensables à la modernisation de notre économie et au renforcement de sa souveraineté technologique, sanitaire, alimentaire et énergétique, devrait également faire partie des préoccupations des fonds thématiques à promouvoir, recommande l’AEI.
7. Un autre compartiment pourrait être dédié à l’entrepreneuriat. L’enjeu, dans un premier temps, selon les économistes du parti de l’Istiqlal, est de susciter des projets de création et d’innovation en investissant dans la R&D que le privé a du mal à investir tout seul.
8. L’AEI préconise en outre la création d’un sous-fonds et le développement d’un savoir-faire dédié au redressement d’entreprises, notamment celles présentant une dimension économique et sociale stratégiques permettrait d’éviter des pertes de richesses, de métiers et de marchés pour le Maroc, comme ce fut le cas pour le raffinage, la filature, le transport maritime...
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9. Outre le recours aux institutionnels, l’appel à l’épargne publique, en dirhams et en devises, ne doit pas être négligé par le Fonds. L’AEI dit souscrire parfaitement à l’esprit du Fonds Mohammed VI et son orientation vers les canaux d’appui aux fonds propres et capitaux permanents. Le Fonds peut ainsi utiliser les emprunts subordonnés, les obligations convertibles ou les actions prioritaires, la dette mezzanine, etc.
10. Après avoir bien défini la relation entre le Fonds Mohammed V et la future Agence de gestion des participations publiques, il convient, préconise l’AEI, de doter le Fonds des moyens et de l'organisation lui permettant d’adopter une gestion active et flexible de ses participations et investissements, contribuant ainsi au décollage de ces entreprises, à leur stabilisation et à leur développement, puis à leur cession dès que l’opportunité économique se présente. Ce qui permettrait au Fonds de s’autofinancer par une gestion active, rationnelle et flexible de ses placements et investissements, estiment les économistes.
Pour conclure, l’AEI rappelle que «bien qu’il soit présenté dans le cadre de l’arsenal financier permettant de sortir de la crise actuelle, le Fonds Mohammed VI est un vecteur de développement structurel, sur le long terme. C’est un véhicule de mobilisation d’épargne intergénérationnelle, d’animation du marché financier, de diversification des activités et des territoires de création de la richesse nationale». Selon la même source, les choix stratégiques du Fonds doivent aussi prétendre à une certaine indépendance dans les secteurs vitaux de l’économie tels que la santé, l’énergie, les ressources hydriques, l’agroalimentaire et la finance.