Nick Longrich, auteur du rapport portant sur cette découverte réalisée dans les phosphates de Sidi Chennane, dans la province de Khouribga du bassin d’Oulad Abdoun, au Maroc, a pensé un temps à le baptiser Shaytania pandaemonium, en référence au mot arabe, «Shaytan», explique-t-il sur son blog.
Une première intention qui entendait traduire le physique démoniaque de ce prédateur. L’auteur en a toutefois été dissuadé par ses collaborateurs et co-auteurs. C’est donc le nom de Khinjaria acuta qui a été choisi, en référence au mot arabe khinjar qui signifie «poignard» et le mot latin «acuta», pour «tranchant».
Au-delà de son faciès effrayant, ce monstre marin se classe parmi les prédateurs les plus redoutables de par sa taille, tout aussi monstrueuse. Avec un crâne qui mesurait un peu moins d’un mètre de long, la taille totale de l’animal évoluait entre sept et huit mètres de longueur. À titre de comparaison, poursuit l’auteur sur son blog, «les plus grands requins blancs connus mesurent environ six mètres de longueur». Le Khinjaria acuta est donc plus grand qu’un requin blanc, et s’apparente davantage à un épaulard en termes de longueur, tout en étant moins massif.
Lire aussi : Paléontologie: une nouvelle espèce de dinosaure de petite taille identifiée au Maroc
Et qui dit gros prédateur, dit grosses proies. Cette espèce était ainsi équipée de mâchoires extrêmement puissantes et de dents en forme de dagues. «L’allongement de la partie postérieure du crâne crée une énorme zone d’attache pour les muscles fermant la mâchoire», explique-t-on dans cette récente étude publiée par Science Direct, alors que le «visage raccourci du Khinjaria améliore l’effet de levier des mâchoires, tout comme le visage court d’un bouledogue ou d’un lion leur donne une morsure plus forte». Des caractéristiques physiques qui permettaient à Khinjaria de frapper, maîtriser et tuer de grosses proies.
Ses yeux étant particulièrement petits, il est fort probable qu’il se fiait à d’autres sens tels que l’ouïe, le goût de l’eau qu’il ressentait avec sa langue fourchue comme un serpent, pour trouver des proies.
Les mers du Maroc, un vivier de grands prédateurs
Il y a fort à parier, explique l’auteur, que d’autres grandes espèces prédatrices pourraient avoir également habité les mers du Maroc. Des prédateurs au sommet, se nourrissant de différentes proies, ne chassant pas de la même façon, et qui coexistaient. Une question se pose toutefois, selon le scientifique, «pourquoi les autres faunes marines ne ressemblent-elles pas à ceci? Pourquoi cette pléthore de prédateurs?»
Lire aussi : Découverte au Maroc de fossiles de dinosaures datant de 66 millions d’années
En effet, argumente-t-il, «les océans d’aujourd’hui comptent relativement peu de prédateurs au sommet -orques, faux épaulards, léopards de mer, grands requins blancs- par rapport aux mers du Crétacé supérieur». Et parmi la centaine d’espèces de cétacés qui peuplent les mers aujourd’hui, à l’exception des orques, «les baleines modernes se nourrissent assez bas dans la chaîne alimentaire», contrairement aux mosasaures qui évoluaient plus haut dans la chaîne alimentaire des cétacés.
Une explication peut être trouvée dans les caractéristiques des mers du Crétacé supérieur, où évoluaient différentes espèces. Il faisait également plus chaud au Crétacé et il se peut que «des mers plus chaudes pourraient abriter davantage de prédateurs», avance le scientifique.