Du clash au dialogue des civilisations

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ChroniqueNotre pays n’a pas attendu la parution de tel ou tel ouvrage ou le développement de tel ou tel discours idéologique pour comprendre que l’horizon de chaque civilisation n’est aucunement la guerre, mais bien au contraire la paix.

Le 24/11/2022 à 12h00

En 1996, la parution du «Clash des civilisations» de Samuel Huntington était passée quasi inaperçue, occultée à l’époque par une mondialisation triomphante et une hégémonie américaine incontestée. Il a fallu que les attentats du 11 septembre 2001 aient lieu pour que le livre devienne un best-seller et la principale référence des néo-conservateurs américains.

Quelques années plus tard, soit en 2007, Emmanuel Todd et Youssef Courbage ont publié un essai socio-démographique intitulé «Le rendez-vous des civilisations».

Tombé comme un cheveu dans la soupe, cet essai est venu contredire l’hypothèse selon laquelle le vide laissé par les idéologies du XXe siècle allait être remplacé par un retour violent et belliciste des dimensions religieuses et identitaires.

Bien au contraire, nous disent les deux démographes. La réalité est que le monde musulman, bête noire à l’époque des identitaires et néo-conservateurs occidentaux, était en train d’achever sa transition démographique, avec pour corollaire un enclenchement imminent et irrémédiable d’un processus de démocratisation et d’ouverture des systèmes politiques. La modernité démographique est, pour les deux auteurs, le prélude à une modernité politique.

Cinq ans plus tard, les printemps arabes ont en quelque sorte confirmé cette hypothèse, sauf que le résultat final (déstabilisation de pays, guerre civile, etc.) n’était pas celui annoncé dans l’essai. Mais cela est une toute autre histoire.

Qu’en est-il du Maroc dans tout ça?

Contrairement à d’autres pays arabes de la région, le Maroc a réussi à sortir indemne de tous ces bouleversements géopolitiques, non sans enclencher un certain nombre de réformes mais dans l’ordre, l’harmonie et la concertation, là où dans d’autres pays, cela s’est traduit par un chaos généralisé.

Car notre pays n’a pas attendu la parution de tel ou tel ouvrage ou le développement de tel ou tel discours idéologique pour comprendre que l’horizon de chaque civilisation n’est aucunement la guerre, mais bien au contraire la paix.

Etant le dépositaire d’une histoire plus que millénaire, le Maroc a toujours entretenu un subtil équilibre entre ses différentes composantes culturelles et identitaires.

Ainsi, loin des logiques de rapport de forces, de domination ou de hiérarchie culturelle, l’équilibre dont je parle est avant tout fondé sur une synergie toujours vivante et renouvelée. Une identité unique, mais aux affluents pluriels. Une identité enracinée mais toujours en dialogue avec son époque.

Dans son message adressé aux participants du 9e Forum Mondial de l’Alliance des Civilisations, Sa Majesté le Roi a rappelé la dimension organique et toujours vivante de notre identité en ces termes: «Le Maroc est structuré autour d’un modèle d’ouverture, d’harmonie et de synergie qui a vu converger les composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie, et qui, simultanément, s’est enrichi des affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen.»

Un legs civilisationnel qui n’a pas (ou plus) la capacité de se renouveler finit par entrer dans les musées, ces morgues de l’histoire.

A ce propos, Gilbert Durand, le grand penseur de l’imaginaire, disait que la visite des musées avait une vertu thérapeutique face à l’angoisse de la mort, puisqu’en contemplant les vestiges millénaires de cultures disparues, nous en venions à relativiser notre finitude individuelle.

Une civilisation ou une culture est vivante ou elle n’est pas! Et elle est vivante dans la mesure aussi où elle demeure ouverte et capable de dialoguer avec les autres.

C’est dans cette perspective que le 9e Forum Mondial de l’Alliance des Civilisations des Nations Unies s’est tenu les 22 et 23 novembre au Maroc, plus précisément à Fès, capitale spirituelle du Royaume, mais dont le rayonnement spirituel déborde nos frontières.

Il y fut aussi question de responsabilisation et de valorisation de la jeunesse, qui a incontestablement un rôle central et déterminant à jouer, en vue de préserver cette capacité qui nous permet, tout en restant fidèle à nous-même, de dialoguer et d’accepter les singularités et les spécificités de l’autre.

L’autre, vu comme un partenaire culturel et civilisationnel, et non comme un ennemi.

A cet effet, l’Université Euromed de Fès (UEMF) a accueilli l’évènement des jeunes de ce Forum. Une manière directe et responsabilisante de les impliquer directement dans cette dynamique d’échange, de dialogue et de «conscientisation» des esprits quant à la dimension fédératrice de la culture et de la civilisation.

De même, sur le volet intellectuel, il a été décidé, suite à l’initiative de Mustapha Bousmina, président de l’UEMF, de créer une chaire «Alliances des civilisations», pour inscrire cette dynamique dans la durée et dans la réflexion profonde. Une initiative que l’on aimerait voir se multiplier au sein d’autres villes et universités du Royaume.

Car les débats autour des questions culturelles et civilisationnelles ne doivent aucunement être enfermées dans une logique évènementielle et festive.

L’évènement n’est pas une fin en soi, mais l’occasion d’aller au-delà. 

Par Rachid Achachi
Le 24/11/2022 à 12h00

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VOS RÉACTIONS

Quand le colonialisme a-t-il été dans l'histoire des nations et des peuples un avantage et une valeur ajoutée dont les peuples colonisés ou ceux qui ont souffert sous la protection ou l'occupation, sont fiers ??

متى كان الاستعمار في تاريخ الامم والشعوب ميزة وقيمة مضافة تفتخر بها الشعوب المستعمرة او التي عانت تحت وطٱة الحماية او الاحتلال ؟؟؟؟؟

Vous avez raison, l'horizon d'un pays et de son devenir, c'est son existence dans la paix, et c'est bien de voir le Maroc vivre cette sagesse. Malheureusement, d'autres n'ont pas cette même sagesse, ce sont les fabricants d'armes, qui régulièrement réclament "leur dû" en dollars et en sang frais, en destructions, en ruines,...sans terrain de jeux de morts ils ne peuvent survivre, la mort est leur rentes , puisqu ils ne peuvent plus être des colons, ils sont des pourvoyeurs et createurs de conflits....dommage

Bonjour Monsieur Mostafa. Bonjour Monsieur Driss. Effectivement, les Français sont arrivés en 1912, dans un Maroc en très mauvais état. Tout ce qu'ils ont fait de positif (pacification, hôpital, école, infrastructures, ...), ils l'ont fait pour eux-mêmes, pour leur confort, avec quelques retombées pour nous. Une fois remerciés, c'était pour nous une base très solide pour aborder l'avenir. Il ne faut jamais l'occulter. A toute chose malheur est bon! "Or, il se peut que vous ayez de l'aversion pour une chose qui est pourtant un bien pour vous et ...", Coran(Al Baqara-216). Cordialement.

Sans rancune aucune frère Omar

Loin de faire l’éloge du colonialisme mais les faits dans l’histoire sont là et pas besoin de les nier au contraire il faut les regarder en face puis regarder vers l’avenir . J’ai jamais dis que le français a bâti le pays pour notre beaux yeux il faisait ça pour son intérêt mais ça a profité pour nous. Tant mieux . Sans aucune rancune frère Driss .

J'adhère à 99,9999% de l'analyse de Monsieur Achachi! la petite décote de 0,OO01 % sanctionne ce passage :"Ainsi, loin des logiques de rapport de forces, de domination ou de hiérarchie culturelle,..".

Le tout est dit dans cet ARTICLE est Rien à signaler. Merci infiniment Mr. Rachid Achachi. Toutes et Tous , à travers le MONDE ,pour le DIALOGUE FERTILE qui mène toujours au rapprochement des points de vue convergents, basé sur l'acceptation des autres c.à.d LA TOLERANCE entre les FILLES et les FILS de NOTRE PERE ADAM ET EVE . Toujours ,une réaction entre un nombre hautement important (tend vers une limite,bien sûr, finie d'idées) engendre une idée hautement importante et acceptée et sans exception par la COMMUNAUTE INTERNATIONALE TOUTE ENTIERE c.à .d une idée FONDAMENTALE VALIDEE PAR CETTE COMMUNAUTE INTERNATIONALE bien sûr UNE IDEE FONDAMENTALE VALIDEE PAR L'ONU ET SES ORGANES. Merci INFINIMENT POUR VOTRE COMPREHENSION. THANK YOU VERY MUCH AND GOD BLESS YOU ,LADIES AND GENTLEMEN.

Je veux bien dire:............................................rapprochement des points de vue divergents..............................................................................Cordialement.

Bonsoir Monsieur Driss. Et surtout, surtout, qu'on arrête d'emmerder les femmes. C'est le pilier de la société dans la paix, dans la guerre, dans la civilisation, dans la culture, dans la religion, dans l'éducation, ... Cordialement.

Bonsoir, Dans ce domaine, le mot "tolérance" ne me paraît pas approprié. Il renvoie, en effet, à une situation de déséquilibre entre un "tolérant" et un "toléré". D'après Larousse, tolérer = admettre à contrecœur la présence de quelqu'un, le supporter,-tolérer des abus-, ce n'est pas un droit, c'est une tolérance... etc. Ceux qui parlent d'un islam tolérant expriment un complexe de supériorité que rien ne justifie. L'idéal serait plutôt que les êtres humains soient solidaires entre eux. Cordialement

Permettez moi M. Mostafa de ne pas vous suivre dans votre démonstration. A quelle aune vous mesurez le degré de l'avance ou du retard d'un pays donné? connaissez vous un pays qui n'a pas subi d'influences extérieures qui l'ont fondamentalement changé? Citez un seul pays où les autochtones sont restés maîtres chez eux depuis la nuit des temps. Comparaison n'est pas raison, mais notre pays a été, est et sera toujours un grand pays avec des spécificités que n'ont pas d'autres contrées. Il détient des atouts naturels, humains et culturels, produit de brassages, de mélanges, d'échanges et d'actions de grands hommes et de femmes qui font que le Maroc est bien dans ses habits et droit dans ses bottes. Le mal développement est affaire de gouvernance alors que l'âme du pays est éternelle.

Que dire d’une âme d’un Maroc millénaire minée par un fanatisme hors paire et qu’il voulait exporter à tous prix . En prônant la paix alors que nos textes rigides et soi-disants sacrés nous incitent à déclarer la guerre à tous le monde même à nous mêmes çà tient vraiment de la schizophrène . On doit l’admettre qu’on le veuille ou non sans le français nos grands-parents auraient continué à patauger dans la misère et à s’entretuer à jamais . Alors que nous étions des tributs éparpillées dans le chaos du bled siba ,c’est le français qui nous a unis en pacifiant le Maroc et ensuite nous a-mis sur la bonne voie de la modernité.

M.Achachi vous ne parlez pas des travaux de notre grand intellectuel Mahdi Elmanjra, qui écrivait bien avant Samuel Huntington un livre consacré aux conflits civilisationnels. En août 1991, Mahdi Elmandjra, professeur d'économie à l'université de Rabat (Maroc), écrivait, dans son ouvrage en arabe intitulé Première guerre civilisationnelle: "la guerre du Golfe n'est que le premier épisode d'un conflit Nord-Sud [qui sera] dominé dorénavant par des considérations d'ordre essentiellement culturel". Pour lui, si la période coloniale a été caractérisée par des enjeux d'ordre économique, la période néocoloniale par des enjeux d'ordre politique, le post-colonialisme sera déterminé par des enjeux culturels, d'où le risque de "guerres civilisationnelles". Rendons à César ce qui lui appartient !

Le Maroc moderne est le fruit d’un colonialisme aberrant mais de conséquences positives . Sans le français que le souverain à qualifier d’influence méditerranéenne on aurait vécu dans un passé arrièré et rétrograde . Et même ces fanatiques qui adorent le passé désastreux en profitent des fruits de la civilisation apportée par le colon.

Vous avez parfaitement raison ! Je dirais même que sans le protectorat "francesse" de 1912, nous aurions été sous celui du "deuxième francesse" en 1962 🙄

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