Le drame des mères divorcées voulant refaire leur vie

Famille Naamane

ChroniqueUn divorce est toujours douloureux si un couple a des enfants. Un déchirement pour les enfants et pour le parent qui n’en a pas la garde. Au Maroc, dans la majorité des cas, c’est la maman qui garde les enfants. Mais elle peut en perdre la garde.

Le 28/10/2022 à 10h58

Widade, 29 ans: «divorcée depuis 7 ans, j’ai la garde de mon fils qui vient d’avoir 8 ans. A 21 ans, j’étais déjà divorcée. Mon mari a très peu vu notre fils. J’aime un homme que je dois épouser. J’en ai informé mon ex-mari. Il me menace de me prendre mon fils! Je ne connaissais pas cette loi. C’est injuste!»

Quelle est cette loi?

Le Code de la Famille (art.171): en cas de divorce, lhadana (garde des enfants) revient d’abord à leur mère, puis leur père, puis leur grand-mère maternelle. Sinon, le tribunal attribue la garde à un proche parent apte à l'assumer.

La garde, pour les filles et les garçons, va jusqu’à la majorité (18 ans).

Si le père ayant la garde des enfants se remarie, il n’a aucun problème.

Si la mère ayant la garde des enfants se remarie, le père peut obtenir la garde des enfants dès que ces derniers atteignent 7 ans!

A moins que le nouvel époux de la mère ne soit le représentant légal de l’enfant ou qu’il ait un lien avec l’enfant qui entraîne l’empêchement au mariage.

Le père ne peut obtenir la garde de l’enfant «atteint d'une maladie ou d'un handicap rendant sa garde difficile à assumer par une personne autre que sa mère». (art. 175).

Si l’enfant est en bonne santé, son père peut le garder. Malade, il revient à sa mère!

L’article précise pour tous les enfants: «à moins que la séparation avec sa mère lui cause un préjudice».

Comment prouver le préjudice? Kawtar, 34 ans: «mon ex-mari m’a pris ma fille après mon remariage. Elle maigrit, pleure, fait cauchemars. Elle déteste sa belle-mère. Nos séparations sont déchirantes: elle hurle, s’accroche à moi… Comment prouver le préjudice?»

Tout enfant a besoin de sa mère lors de l’enfance et de l’adolescence. Aucune épouse du père ne peut donner l’affection et l’attention d’une mère.

Arracher un enfant à sa mère est cruel, sauf exception. Redouane, 42 ans: «après son remariage, mon ex-épouse a négligé nos enfants. Ils étaient sales, mal éduqués, s’absentaient de l’école. J’ai réussi à en obtenir la garde».

Par ailleurs, cette loi suggère que le beau-père est un danger potentiel pour l’enfant, mais pas la belle-mère! Une mère peut protéger ses enfants d’un nouveau mari. Le père, moins: c’est son épouse qui s’occupe des enfants, de leur hygiène… Son influence est plus importante que celle du beau-père.

La déchéance de la garde de l’enfant n’est pas automatique après remariage: il faut que le père la réclame, par le biais de la justice.

Il a un délai d’un an après avoir été informé du remariage de son ex-épouse (art.176).

C’est pourquoi de nombreuses femmes se marient en cachette, avec la phobie d’être séparées de leurs enfants. Maria, 36 ans: «un cauchemar! Je n’arrête pas de dire à ma fille que si son père l’apprenait, il nous séparerait. Je l’angoisse, lui apprends à mentir, comme si j’avais commis un crime».

Beaucoup vivent une sorte de concubinage. «Je vis chez mon compagnon tous les week-ends, quand mes enfants vont chez leur père. Je ne peux me remarier par crainte de perdre mes enfants. Sans acte de mariage, nous ne pouvons pas partager une chambre d’hôtel». Une union considérée comme illégale (un mois à un an de prison. Code Pénal, article 490)!

Certaines se marient selon le orf (une union selon un usage coutumier, par la récitation de la première sourate du Coran, et sans qu'un acte de mariage ne soit établi par deux adouls).

Awatife, 41 ans: «je me suis remariée secrètement par orf. J’ai eu un autre enfant d’une union religieusement licite, mais illégale pour la loi. Avec mon nouveau mari, nous avons falsifié des documents pour avoir un acte de mariage dans une autre ville pour donner une identité à notre nouvel enfant».

Garçon et fille peuvent, à 15 ans, choisir avec lequel des parents vivre. Loubna, 30 ans: «mon fils a 8 ans. Il refuse de vivre avec son père. Je dois attendre encore 7 ans avant de penser au mariage!»

Que de femmes abandonnent tout espoir de bonheur conjugal. L’élu du cœur finit par partir. Youssef, 38 ans: «je l’aime mais je ne peux patienter 5 ans pour que son enfant ait 15 ans».

Certains pères veulent garder leurs enfants par amour, d’autres, plus nombreux, menacent les ex-épouses juste pour les empêcher de se remarier, par vengeance.

D’autres prennent leurs enfants juste pour ne plus verser de pension alimentaire à l’ex-épouse. Certains pères sortent la menace à chaque fois que la mère remariée lui demande la pension alimentaire. Amal, 27 ans: «il ne me donne plus un sou depuis mon remariage et j’ai peur de porter plainte car il menace de reprendre les enfants».

Lors du divorce, le juge fixe la pension alimentaire (nafaqa), à laquelle s’ajoute un montant mensuel pour le logement de l’enfant et une indemnité pour la mère qui le garde. Si le mari est informé du remariage de son ex-épouse et ne demande pas la garde des enfants, il doit continuer à verser la nafaqa seulement.

Une autre aberration: la mère déchue de son droit de garde n’obtient pas automatiquement le droit de visite à son enfant! Zakia, 33 ans: «le tribunal m’a refusé le droit de visite. J’ai fait appel. J’ai dépensé beaucoup d’argent pour voir mon fils un jour par semaine!».

De quel droit prive-t-on une mère de son enfant et un enfant de sa mère? La loi punit la femme qui se remarie. Pourtant l’islam recommande vivement le mariage pour l’homme et pour la femme!

En privant la femme de remariage, on contribue également à la précarité féminine. Nadia, 38 ans: «mon salaire est misérable. Avec un mari, j’améliorerai ma situation». 

Le divorce est en hausse chez les jeunes ainsi que le nombre de femmes privées de remariage.

Ces articles discriminatoires doivent être réformés. Aucune loi n’a le droit d’obliger une femme à choisir entre son enfant et son bonheur conjugal! 

Par Soumaya Naamane Guessous
Le 28/10/2022 à 10h58

Bienvenue dans l’espace commentaire

Nous souhaitons un espace de débat, d’échange et de dialogue. Afin d'améliorer la qualité des échanges sous nos articles, ainsi que votre expérience de contribution, nous vous invitons à consulter nos règles d’utilisation.

Lire notre charte

VOS RÉACTIONS

Bonsoir Madame Soumaya Naamane Guessous. Le divorce n'est pas un honneur pour la femme, disait Euripide, le poète tragique grec, il y a 4 siècles avant notre ère. 24 siècles plus tard, on est toujours dans la même logique. Pourtant, le divorce est un mal nécessaire pour éviter le pire. Il peut même être heureux, quand il n'y a pas d'enfants. Avec des enfants, il est dévastateur! Ils deviennent plus à risque de connaître un éventail de problèmes: des troubles psychologiques, les échecs scolaires, la maltraitance, la pauvreté, l'abandon, la rue, le viol, la prostitution, la drogue, ... Il n'existe aucune bonne solution pour les en préserver, en dehors de leurs parents. La moins mauvaise solution reste la garde alternée, à condition que les parents se respectent, sinon ... Cordialement

C'est aberrant que ces situations existent encore et encore plus incompréhensible que ce soit dans un pays musulman où l'islam autorise le remariage !c'est absurde vraiment !!!

Bonjour Madame. Vous dites, l'enfant est soumis à la violence de la belle-mère. Et la violence de la rue? Divorce ou pas, lorsque la sécurité matérielle ou morale d’un enfant est compromise, l’État se porte garant et se substitue aux ayants autorité parentale. Le père contribue de gré ou de force aux entretiens à hauteur de ses moyens; mais la mère doit avoir la garde, et n’a qu’à faire la vierge marie. Comme le dit Khalil Gibran : « vos enfants ne sont pas vos enfants. Ils viennent à travers vous mais non de vous. Bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas. » Ils sont des citoyens, ce n’est donc pas difficile, c’est la responsabilité de l’État.

témoignage d'une mère sur facebook Quand la mère est déchue de la garde de son enfant, elle n’a pas de droit de visite et d’hébergement de son enfant, n’a plus aucune autorité parentale sur son enfant, école et autres institutions ne peuvent même plus lui donner un document officiel si le père refuse qu’elle en ait un, plus aucun droit de regard sur la santé de son enfant, et plus le droit de bouger avec lui en dehors de la ville de résidence du père sans l’autorisation de ce dernier (que ce soit au Maroc ou à l’etranger). La notion du bien suprême de l’enfant est tellement floue dans le code de la famille qu’elle n’est même pas prise en considération.

Merci pour vos commentaires. Quand on se marier, on nage dans le bonheur. Mais la vie peut ramener un lot de problèmes non envisagés au départ. On ne peut dire que si on se marie on ne doit pas divorcer. C'est un cas de force majeur. Le problème est que ce sont surtout les enfants qui en souffre. Empêcher une femme de se remarier est une atteinte à ses droits, c'est haram. Le beau-père n'est pas toujours une menace, car la belle-mère peut avoir des fils d'un autre mariage, des frères et des cousins qui peuvent être une menace. Père et mère doivent être vigilants. Ne sommes plus à ce degré de bestialité sexuelle. La plupart des enfants de la rue sont issus de familles disloquées, dysfonctionnelles, de mère est absente ou décédée et que l'enfant est soumis à la violence de la belle-mère.

La loi devrait punir les parents qui mettent au monde des enfants, et songent ensuite au divorce. Lorsqu’on n’est pas sûr de ses sentiments, on ne fait pas d’enfants. Point. Qu ils assument. Quant à la femme – surtout- dévouement total à ses enfants. Quel remariage ? Y a-t-il encore du romantisme ? Elle est déjà mariée avec son destin ! La reine Victoria ne s’est pas remariée après qu’elle est devenue veuve à 41 ans.

N'importe quoi. La religion autorise aux femmes et aux hommes de divorcer et de se remarier s'ils le souhaitent. De quel droit vous voulez les en empêcher ? De plus, un divorce peut arriver à n'importe qui, on ne devrait pas criminaliser les parents de choisir de divorcer. Il vaut mieux le divorce que de faire subir aux enfants un environnement malsain où les parents ne s'aiment pas voir se déteste.

La vérité est que très souvent le beau-père veut de l'épouse mais pas des enfants qu'elle a eu avec son ex-mari. Il rechigne, voir refuse catégoriquement de les prendre en charge financièrement. Autre point, il est beaucoup plus difficile pour un adolescent de devoir vivre sous le même toit que sa mère qu'il voit vivre avec un autre homme que son père. C'est plus facile à accepter pour une fille mais bien plus dure pour un jeune homme.

Ne faites pas d'un cas une généralité. Les femmes comme les hommes ont le droit de se marier, divorcer et de se remarier. Concernant la garde de l'enfant, cela devrait être réglé d'égal à égal devant le tribunal en prenant en compte le bien-être de l'enfant et son avis également.

Bsr professeure!Votre belle chronique me rappelle le très bon film:"Kramer contre Kramer"que tous les nouvellement mariés doivent voir pour éviter les déchirements des enfants,de la maman et du père.Je n'oublierai jamais ce que m'avait dit un ami: "Il n'y a plus ni femmes,ni hommes."Cela veut dire que les couples actuels manquent de patience alors que ceux du passé,pas très lointain,en avaient heureusement beaucoup pour le plus grand bien de la famille et de la société. "Les hommes qui demandent le divorce doivent savoir qur leurs enfants vont être élevés par d'autres hommes."Cela veut dire que ces pauvres pourraient être gardés par les beaux-parents,par le mari de l'ex,par la rue,...Ce n'est pas pour rien que Ouahbi propose des formations avant le mariage car cela peut servir.B Week-end.

"juste pour les empêcher de se remarier, par vengeance". Quelle vengeance ? l'homme divorce la femme et se permet de se venger, mais de quoi puisque c'est a son initiative que le divorce a été prononcé, il ne veut plus de cette femme mais l'attache a un pieux a l'aide d'une corde dont la longueur est a la convenance de ce phallocrate, il a la liberté de refaire aussitôt sa vie mais son ex devra faire la chèvre de M, Seguin. La loi doit impérativement revoir les choses

La vérité est que le beau-père n'aura pas envie de subvenir aux besoin d'enfants qui ne sont pas de lui et les adolescents n'accepteront jamais de vivre avec leur mère tout en sachant qu'elle est avec un autre homme que leur père même si elle est marié à ce dernier. C'est comme ça!

C’est une pure et scandaleuse injustice héritage d’un passé révolu. Comment peut-on être scandalisé de voir vivre des enfants sous le même toit avec un homme qui n’est pas leur père et accepter qu’ils vivent dans le même domicile qu’une femme qui n’est pas leur mère ? Soyons logique et équitable tout en mettant fin à ce type d’injustice.

@Jamal Commentaire misogyne. Je vous signale que la femme comme l'homme ont le droit de se remarier. Pourquoi deux adultes ne peuvent pas régler la garde de l'enfant d'égal à égal au tribunal ? Pourquoi ne pas prendre en compte l'avis de l'enfant puisque c'est lui le principal concerné ?

Je te répondrai de la manière suivante: Comment peut-on penser que le droit peut être manipulé pour modifier structurellement la cellule familiale et les rapports entre hommes et femmes? Il y a certaines choses qu'on ne peut pas modifier sous prétexte d'égalitarisme. Il n' y a que des gens qui pensent qu'un homme peut devenir une femme et vice versa qui pensent de la sorte!

Je suis choqué à la lecture de cet article surtout le déséquilibre entre les droits des hommes et ceux des femmes. Encore plus de ce commentaire "Vous voulez mettre sous un même toit un homme et des enfants/adolescents qui ne sont pas de lui?".... par ou commencer ?!

Wow! Je reste sans voix,vous savez ma chère Soumaya, représentez-vous aux élections, vous avez votre place pour changer ces anomalies.

ما أكثر الخلافات التي تحدث بين الرجل وطليقته حول حضانة الأولاد، والتي يتخذها البعض ذريعة للعناد والشقاق، ومن يدفع ثمن ذلك كله هو الأولاد؛ فتضيع دنياهم وتدمر نفسياتهم، رغم أن الشريعة الإسلامية وضحت أحكام الحضانة، وبيَّنت حق كل واحد ومستحقه، فما أحرانا أن نتقي الله عزوجل في أنفسنا وأولادنا،ونطبق شرع الله تعالى لراحة الدنيا وسعادة الآخرة.

Cette loi est très bien. Vous voulez mettre sous un même toit un homme et des enfants/adolescents qui ne sont pas de lui?

Donc l'inverse ne vous dérange pas ? C'est quoi cette mentalité. C'est vraiment rendre "haram" ce qui est pourtant licite en religion.

Amen amen

Effectivement, ce n’est pas équitable. Une femme divorcée ne doit pas être condamnée au célibat pour le restant de sa vie. C’est encore une autre abération

0/800