Vidéo. Grand Format. Avec ses nouveaux pouvoirs d’enquête, comment Bachir Rachdi entend-il combattre la corruption?

le360

Avec la nouvelle loi 46-19, l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC) est désormais dotée de larges pouvoirs et prérogatives. Elle peut enquêter et lancer des investigations. Le point avec son président, Mohamed Bachir Rachdi, dans une nouvelle édition de Grand Format, sur Le360.

Le 13/04/2021 à 17h36

Nommé en décembre 2018 à la tête de l’INPPLC, Mohamed Bachir Rachdi n’a pas attendu l’adoption de la loi 46-19, encadrant les missions de cette institution constitutionnelle, pour lancer les chantiers qui vont accompagner la feuille de route de la lutte contre la corruption.

«Nous avons également travaillé sur les fondements organisationnels et structurels de l’instance, en mettant en place la conception de la nouvelle organisation et les procédures qui vont encadrer son fonctionnement», a-t-il ainsi expliqué, dans cette interview.

Adopté le 23 mars dernier par le Parlement, le projet de loi relatif à INPPLC marque un tournant dans le combat contre la corruption au Maroc, attribuant à cette instance, créée par la constitution de 2011, de larges pouvoirs d’enquête et d’investigation.

Le président de l’INPPLC écarte tout risque de confusion des rôles entre l’instance et d’autres organes juridictionnels (Parquet, Cour des comptes), préférant plutôt évoquer une complémentarité et une articulation des responsabilités.

«L’instance joue son rôle constitutionnel, qui est celui de superviser, de coordonner et d’assurer le suivi de toutes les politiques publiques. La dimension d’investigation devrait représenter 15 à 20% de l’effort qui va être déployé par l’INPPLC. Le plus gros travail sera fourni au niveau de la mise en place d’une stratégie de l’Etat, au-delà de la stratégie nationale, qui implique l’ensemble des intervenants», a ajouté Mohamed Bachir Rachdi. 

Concrètement, en vertu de la nouvelle loi, les investigateurs de l’Instance ont la possibilité d'entrer dans les locaux des organes de droit public ou privé (en présence d’un officier de la police judiciaire). Leurs interventions se font sur ordre et sous l’autorité du président de l’INPPLC.

«L’instance a les pouvoirs de demander toute information auprès des institutions publiques et privées, pour approfondir ses enquêtes et constituer les preuves d’actes de corruption. Ses procès-verbaux sont probants jusqu’à preuve du contraire», a affirmé Mohamed Bachir Rachdi.

Pour accomplir ses missions, un corps de commissaires investigateurs est mis en place, encadré par des règles strictes qui garantissent à la fois l’intérêt général et le droit des citoyens.

Interrogé sur le fait que la crise sanitaire aurait pu accentuer le fléau de la corruption, comme cela a pu être observé dans de nombreux pays, Mohamed Bachir Rachdi a préféré rester prudent. «Nous avons lancé une enquête pour identifier les nouvelles formes de corruption et leur ampleur en période de crise, avec l’idée de sortir avec des recommandations pour prévenir la corruption, non seulement pour la pandémie du Covid-19, mais pour toutes les crises qui imposent des règles et des situations exceptionnelles», a-t-il déclaré. 

Concernant la question des marchés publics, Rachdi estime que les efforts menés n’ont pas permis d’atteindre les résultats escomptés (des objectifs de transparence, et de concurrence loyale).

«Nous allons travailler avec les institutions concernées pour créer un cadre favorisant la responsabilisation et la reddition des comptes», a expliqué le président de l'INPPLC, c'est à dire un contrôle a posteriori, au lieu d’un contrôle a priori.

En parallèle, a-t-il poursuivi, l’instance met actuellement en place un système d’alerte de haut niveau, dans le cadre d’un programme de l’OCDE, où les entreprises auront la possibilité de déposer leurs réclamations, quand il s’agit d’un manque de transparence ou d’équité concurrentielle. «A travers ce mécanisme, nous allons profiter de certains expériences internationales et nationales (comme Stop Corruption) pour améliorer le cadre des marchés publics», a expliqué Mohamed Bachir Rachdi.

Interpellé sur la stagnation de l’Indice de perception de la corruption (IPC) et du classement du Maroc dans plusieurs rapports internationaux, le président de l’INPLLC estime que plusieurs efforts ont été fournir sans donner les résultats escomptés. «Ces actions manquent de priorisation et de cohérence et leur impact n’est pas perceptible par les citoyens, chose qui se répercute sur les classements internationaux. Reposant sur des axes multiples et articulés, l’approche qui va être développée doit donner des résultats et effets perceptibles à court, moyen et long terme», a conclu Mohamed Brahim Rachdi.

Par Wadie El Mouden avec Khalil Essalak et Khadija Essabar
Le 13/04/2021 à 17h36