Tribune. La gale, le retour d’une maladie oubliée

La gale, maladie cutanée due à un parasite, peut être contractée lors d’un rapport sexuel.

La gale, maladie cutanée due à un parasite, peut être contractée lors d’un rapport sexuel. . El Tejón Melero

On croit souvent que la gale, maladie parasitaire de la peau, n’existe plus. Or, ce n’est pas le cas. Pourquoi la gale revient-elle ces dernières années et avec force et touche tous les milieux sociaux économiques, essentiellement les écoles?

Le 30/01/2022 à 08h03

La gale a toujours existé sous nos cieux de façon plus ou moins importante. Son ampleur actuelle vient peut-être du fait qu’on l’avait un peu oubliée ces dernières décennies et qu’on n’y pense pas forcément en cas de démangeaisons.

Elle provoque un certain choc psychologique chez les personnes qui en sont atteintes. C’est lié au terme «galeux», qui renvoie à des images du passé autour de la saleté.

La gale, maladie parasitaire cutanée, peut être contractée lors d’un rapport sexuel, ce qui fait d’elle une infection sexuellement transmissible, comme la syphilis, le chancre mou ou la blennorragie (chaude-pisse), rappelle le Pr Abdelhak Sekkat, médecin-colonel major, spécialiste dans les maladies dermatologiques, dans la 3ème édition d’un ouvrage collectif «Les infections sexuellement transmissibles / Sida», dont la sortie est programmée pour fin février 2022.

Dans ce livre, qui est un catalogue médical sur toutes les infections sexuellement transmissibles (IST), le Pr Sekkat précise que la gale est une maladie familiale, cosmopolite et contagieuse.

Si traditionnellement, la gale ne touchait que les collectivités à bas niveau social et lors de mouvements de population entraînant la promiscuité, elle se trouve que dernièrement on a constaté que la gale touchait toutes les catégories socio-économiques, essentiellement dans les milieux scolaires.

En 2020, en France, on estime qu’il y a eu 200.000 cas de gale, essentiellement dans les écoles.

Il n’existe pas de statistiques marocaines sur cette maladie parasitaire très contagieuse.

Depuis quelques années, on a de nouvelles catégories de personnes à risque d’attraper plus facilement la gale. Ce sont les personnes âgées en maison de retraite et les sujets immunodéprimés, ainsi que toute personne moins résistante, particulièrement les enfants hospitalisés.

La recrudescence de la gale s’observe surtout en hiver, remarque Pr Abdelhak Sekkat.

Il faut rappeler que la gale est une maladie parasitaire de la peau, due à un minuscule acarien, très contagieuse.

Après contamination par une personne infectée, les acariens se développent en creusant des sillons dans la peau. Les réactions du système immunitaire contre ces parasites provoquent des démangeaisons intenses.

La gale est une maladie fréquente, qui touche des personnes de tout âge et de tous milieux socio-économiques. Elle se transmet essentiellement par contact physique direct, peau contre peau, le plus souvent lors de rapports sexuels.

Les démangeaisons dues à la gale sont quasi-constantes et deviennent plus intenses le soir et la nuit.

Elles sont ressenties sur diverses zones: espaces entre les doigts, peau fine des poignets, aisselles, coudes, ventre, région génitale, par exemple.

La gale provoque également des lésions de la peau dues au grattage des démangeaisons: des lignes rouges, des croûtes, voire des lésions de type eczéma.

Souvent, d’autres membres de la famille sont atteints des mêmes symptômes puisque la gale est très contagieuse.

La gale est une maladie qui peut prendre des formes légèrement différentes selon les caractéristiques du patient liées à l’âge, le sexe et la présence d’autres maladies.

Il y a la gale «profuse», qui se caractérise par des lésions étendues atteignant l'ensemble du tronc, y compris le dos, habituellement épargné dans la gale commune.

Très contagieuse, elle survient le plus souvent chez des personnes âgées ou immunodéprimées (VIH/sida, chimiothérapie anticancéreuse, personnes sous traitement pour éviter les rejets de greffe ou à la suite d'un traitement prolongé par des dermocorticoïdes).

On observe également la gale «hyperkératosique» (également appelée «gale norvégienne») qui survient chez les personnes âgées, anormalement maigres ou immunodéprimées. Cette forme de gale démange peu (voire pas du tout) et devient chronique.

Après plusieurs mois, elle provoque l’apparition de squames et de croûtes qui collent à la peau, ainsi que de plaques rouges qui ressemblent à de l’eczéma.

Ces lésions siègent préférentiellement sur les paumes des mains et la plante des pieds, sur le cuir chevelu, sur le visage, sur le tronc et sur les fesses. Les ongles deviennent épais et jaunâtres.

D’un autre côté, il y a la gale du nourrisson, qui se caractérise par la présence de vésicules et de «boutons» sur les paumes des mains, la plante des pieds et le cuir chevelu. Des nodules sont présents sur les aisselles et les organes génitaux.

Attention, lors de la gale du nourrisson, il convient de bander les mains des enfants pour éviter une ingestion accidentelle des produits appliqués sur la peau, en se suçant les doigts.

Si les démangeaisons sont trop gênantes, le médecin peut prescrire des médicaments antihistaminiques, contre les manifestations des allergies, à appliquer sur la peau ou à avaler.

Et parce que la gale provoque des démangeaisons intenses, il est fréquent qu’elle se complique d’une surinfection des lésions de grattage par des bactéries. Cette surinfection provoque des boutons, des suintements, voire des gonflements.

Le traitement de la gale repose sur des traitements antiparasitaires locaux (application sur la peau) ou oraux (par la bouche).

Lorsqu’une personne est reconnue atteinte de gale, son entourage familial et toute personne ayant eu un contact étroit avec elle (partenaires sexuels), même sans symptômes cliniques, doivent recevoir un traitement.

Le traitement de la gale est simplifié aujourd’hui grâce à des molécules découvertes ces 20 dernières années, lit-on dans le chapitre scientifique rédigé par le Pr Sekkat et la Pr Wafae Mellouki, grande professeur de parasitologie, décédée depuis.

Mais pour des raisons économiques, des médicaments très anciens sont encore prescrits dans notre contexte marocain, le premier en badigeonnage après une douche savonneuse d’un quart d’heure, en respectant le visage, renouvelle 48 heures après, sans lavage dans l’intervalle.

Il est capital de préciser que lors du traitement, il est recommandé d’insister sur les zones avec des lésions, sur les plis, les espaces entre les doigts, le nombril, les parties génitales, sous les seins, sous les ongles et sur le cuir chevelu.

Le second traitement sert essentiellement pour déparasiter le linge et la literie, sans oublier les effets personnels qu’il faut passer au lavage savonneux à l’eau chaude.

Ce traitement est appliqué systématiquement à tous les membres de la famille vivant sous le même toit.

Lors du traitement, on peut avoir des effets indésirables éphémères dont les plus fréquents sont des sensations de fourmillement, de brûlure, des démangeaisons, une rougeur de la peau et une sécheresse cutanée.

Le premier professionnel qui doit être en alerte permanente contre la gale, est l’instituteur, qui, devant toute démangeaison qui s’éternise chez un enfant, doit alerter les parents, pour éviter toute épidémie de gale.

*Le Dr Anwar Cherkaoui est médecin. Lauréat du cycle supérieur de l'Iscae, il a été, trente années durant, le responsable de la communication médicale du CHU Ibn Sina de Rabat.

Par Anwar Cherkaoui
Le 30/01/2022 à 08h03