Dans son nouveau mémorandum présenté ce mardi 7 février 2023, le Conseil national des droits de l’Homme livre une série de recommandations pour améliorer la gestion de l’eau dans le Royaume. Le CNDH rappelle ainsi qu’entre 1960 et 2020, les ressources hydriques renouvelables disponibles ont diminué, pour passer de 2.560 m3 à environ 620 m3 par personne et par an, entraînant le pays dans une situation de stress hydrique structurel.
Le CNDH signale aussi que le Maroc fait face à sa pire sécheresse depuis 40 ans, faisant observer que la quantité des précipitations au Maroc a baissé de 47%. Cette situation a, par conséquent, entraîné la baisse des stocks de tous les barrages à des niveaux sans précédent, enregistrant un déficit net de 85% en 2022, ce qui a poussé les autorités compétentes à déclarer l’état d’urgence hydrique.
Pour faire face au stress hydrique, le CNDH propose ainsi un ensemble de recommandations et de propositions. Et ce, selon une approche comportant des mesures d’urgence et d’autres à caractère stratégique à long terme. En ce qui concerne les mesures stratégiques, le Conseil appelle à construire une vision ayant pour objectif de limiter le stress hydrique, à moyen et long terme, en travaillant sur six axes stratégiques.
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Il s’agit tout d’abord de considérer la sécheresse comme étant une donnée structurelle plutôt que circonstancielle et d’adopter des politiques publiques prenant en compte les recommandations des experts spécialisés dans le domaine du climat.
Par ailleurs, le Conseil appelle les différents acteurs institutionnels à donner la priorité à la sécurité alimentaire et à protéger le droit des générations futures à la richesse hydrique nationale, notamment à travers l’adoption de politiques durables de l’eau, et le développement d’un secteur agricole et industriel moins consommateur d’eau et orienté vers la satisfaction de la demande intérieure.
Revoir les politiques économiques
Il faudra aussi, selon le CNDH, revoir les politiques économiques fondées sur la centralisation du secteur agricole au détriment des activités industrielles et de services moins consommatrices d’eau. D’après le Conseil, soutenir et développer des filières agricoles capables de s’adapter aux années sèches, ainsi que des filières économiques moins appauvrissantes en ressources en eau, est une solution stratégique pour faire face au stress hydrique.
Le mémorandum attache, en outre, une importance capitale à l’investissement dans la recherche scientifique et à l’accroissement de l’intérêt des experts et chercheurs pour les enjeux climat et eau.
Il rappelle également l’importance de revoir la gouvernance du secteur de l’eau et d’adopter une vision institutionnelle afin de mettre en place un système institutionnel unifié, basé sur une approche participative, qui valorise l’implication de la population, de la société civile, des experts et des institutions de gouvernance dans les efforts de conservation des ressources en eau.
Le CNDH préconise également la rationalisation de la consommation domestique d’eau, en sensibilisant les citoyens à une gestion des ressources en eau basée sur le principe de rareté plutôt que sur celui d’abondance.
Investir dans les cultures peu gourmandes en eau
Le mémorandum appelle aussi à l’adoption d’une politique publique visant à trouver des solutions immédiates et urgentes pour faire face au stress hydrique. Il est donc important de chercher des alternatives à certaines cultures très consommatrices d’eau, de revoir le modèle agricole orienté vers l’export, et de dresser une liste de produits agricoles épuisants en eau afin de rationner leur production ou de les interdire si nécessaire.
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Il faudra, par ailleurs, opérationnaliser la responsabilité sociale des entreprises pour protéger les ressources en eau et soutenir l’implication des institutions privées dans la protection du droit à l’eau et construire une base de données actualisée sur les ressources en eau.
Le CNDH recommande aussi de lutter contre la pollution de l’eau, en généralisant l’assainissement et le traitement des eaux usées, et de réduire la surexploitation de la réserve stratégique des eaux souterraines. Le Conseil appelle également à la mise en place de stations de dessalement d’eau.
Rappelons que selon la Banque mondiale, le Maroc fait partie des pays les plus touchés au monde par le stress hydrique. Les événements récents ont montré que les solutions techniques ne suffisent plus à protéger l’économie contre les chocs climatiques et soulignent la nécessité d’adopter des politiques complémentaires, telles que celles décrites dans le Nouveau modèle de développement, qui permettraient de tenir compte de la véritable valeur des ressources en eau et d’encourager des usages plus efficients et plus raisonnés.
Ces réformes prévoient notamment de fixer le prix de ressources hydriques devenues plus rares à une valeur idoine, de mettre au point des mécanismes efficaces d’allocation de l’eau, par exemple au moyen d’un système de quotas négociables, et de produire et de publier des données précises et détaillées sur les ressources hydriques et leur utilisation.