Quand j’étais enfant, on m’a appris que le troisième âge était celui de la mort. Enfin, pas exactement… On m’a appris que c’est la période de la vie où il ne se passait plus rien. Plus de plaisirs, plus de rêves, toutes ces choses appartiennent au passé…
Que reste-t-il alors à cet individu mort avant l’heure, que la société a déjà condamné alors qu’il vit encore? Eh bien, il n’a plus qu’à enterrer ses désirs et ses envies. Et qu’il se rapproche de dieu et de ses prophètes, «qu’il gagne des points» en attendant la fin, la vraie, une fois pour toutes.
On ne parle pas ici de la vie après la mort, mais de la vie après ou pendant le troisième âge. «Troisième âge» est d’ailleurs une expression vilaine et stupide, et heureusement qu’elle est presque rayée de la carte. Parce que l’espérance de vie s’allonge. Et l’espérance tout court s’allonge.
Et il n’y a pas plus belle espérance que celle de tomber amoureux.
Tout le monde ne le sait pas forcément, mais le curseur s’est déplacé. Et fort heureusement. S’il y a un point sur lequel la modernité a remporté une bataille existentielle, c’est celui-là: faire croire à l’être humain que tant que le cœur bat, il peut tomber amoureux. C’est la preuve que la vie continue, et jusqu’à la 90ème minute, voire plus, en comptant le temps additionnel, ou le money time, comme disent les footeux…
Si cette longue introduction vous parle, c’est que vous êtes prêts à accueillir la dernière merveille de ce merveilleux cinéma iranien, à la vitalité débordante. Ce cinéma a du mal à montrer la chevelure d’une femme, mais il n’a aucun problème à aborder des questions de fond, que d’autres considèrent comme taboues.
Dans Mon gâteau préféré (que l’on doit au tandem Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha), au titre délicieusement trompeur, on suit les aventures d’une mémé de 70 ans, en plein «troisième âge» donc, mais qui n’a pas dit son dernier mot. Elle n’est pas finie, et peu importe si elle est la seule ou presque à le savoir.
Notre mémé va connaitre un flirt inattendu, celui de la dernière heure, avec un banal chauffeur de taxi, lui aussi en plein troisième âge. Ce n’est pas un flirt de vieux mais d’adolescents, avec tous les poncifs et les archétypes situationnels: drague maladroite et hésitante, excitation folle et envie d’assurer à tout prix, etc.
Alors elle met les petits plats dans les grands et se met dans sous états. Elle cuisine, elle danse, elle se parfume, elle fanfaronne… Bref, elle devient folle face à la promesse d’une nuit d’amour avec ce chauffeur de taxi providentiel…
Je ne vais pas vous «spoiler» la conclusion de ce film remarquable. Mais sa morale, vous la connaissez déjà: tant qu’un cœur bat, il peut aimer. Et quand le cœur aime, l’esprit peut rêver. Ne ratez donc surtout pas ce film qui nous rappelle, encore et encore, combien le cinéma iranien est en avance sur tous les autres. Les mollahs, les ayatollahs et tous les bornés ne pourront rien y changer. Dieu merci…
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