Casablanca: le prix de la viande rouge reste hors de portée

L'étal d'Abdelouahed Boukhit, boucher du marché de Derb Sultan. (K.Sabbar/Le360)

Le 28/08/2025 à 09h18

VidéoMalgré les mesures gouvernementales pour freiner la flambée des prix, les étals des marchés populaires affichent toujours des tarifs prohibitifs. Dans les souks de Casablanca, le360 a capté la frustration des bouchers face à une denrée devenue presque un luxe.

Dans les allées animées des marchés de Casablanca, les clients s’arrêtent, demandent le prix, puis repartent souvent les mains vides. Le kilo de viande de mouton s’affiche entre 110 et 140 dirhams, le veau avoisine les 110 dirhams, tandis que la viande hachée se négocie autour de 120 dirhams. Des tarifs jugés intenables par nombre de familles de la classe moyenne.

«On espérait que l’importation ferait baisser les prix, mais c’est tout le contraire qui s’est produit. Aujourd’hui, nous n’achetons que de petites quantités, et parfois nous renonçons totalement à la viande rouge», confie un père de famille, visiblement amer.

Les bouchers confirment ce constat: l’effet de l’importation reste invisible pour le consommateur. «Les volumes qui arrivent de l’étranger sont faibles et les coûts de transport, de douane et de logistique restent élevés», explique Abdelouahed Boukhit, boucher depuis bien des années.

Derrière son comptoir, il détaille les différences de provenance: «La viande brésilienne, à 75 dirhams le kilo en gros, ne séduit pas le client marocain. Les gens n’aiment pas son goût. Le consommateur revient toujours au ‘beldi’, le local, ou parfois au veau belge et hollandais qui se vend autour de 90 à 95 dirhams. Mais les prix, eux, ne bougent pas.»

Beldi un jour, beldi toujours

Même constat chez sa consœur, Salwa Bouzoubaa: «Le mouton, c’est 110 voire 120 dirhams le kilo, 140 sans les os. Le veau tourne aussi autour de 100 dirhams. Les clients se rabattent de plus en plus sur la viande hachée de chameau ou sur le chameau en morceaux, car ils cherchent des alternatives.»

Pour d’autres bouchers, la situation vire au casse-tête. «Le mouton est à 100-110 dirhams, la kefta qui était à 120 grimpe maintenant à 130. On attend toujours une baisse, mais elle ne vient pas. Les clients préfèrent acheter du poulet ou du poisson», constate Amr, en haussant les épaules.

Dans ce marché, une vérité revient dans toutes les bouches: le consommateur marocain a ses préférences, son palais reconnaît le goût de la viande locale. Abdeljabbar, un autre boucher, résume: «L’écart entre la viande importée et la viande du pays peut atteindre 25 à 30 dirhams, mais les clients choisissent toujours le beldi. C’est une question de goût, pas seulement de prix.»

Ainsi, malgré les annonces officielles et les cargaisons débarquées dans les ports, la viande rouge reste un produit de plus en plus inaccessible. Le marché, lui, continue de vivre au ralenti, ses bouchers prisonniers d’une équation impossible: maintenir leur activité dans un contexte où la viande se transforme, jour après jour, en un produit de luxe.

Par Hafida Ouajmane et Khadija Sabbar
Le 28/08/2025 à 09h18