C'est là un acte provocateur, celui de trop, décidé par le président tunisien, que Taïeb Baccouche, lui-même tunisien, a amèrement regretté. Le secrétaire général de l’UMA l'a d'ailleurs fait savoir très officiellement en déclarant qu'«au moment où nous avons conseillé la partie tunisienne de prendre une initiative de réconciliation, suite à la rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc, et suite un autre appel pour la tenue d’une retraite des ministres des affaires étrangères maghrébins avec le secrétaire général consacré à une solution politique en Lybie, nous assistons avec regret et amertume à un autre rendez-vous manqué à l’occasion de la TICAD 8 tenu en Tunisie clôturée le 28 Août 2022, à l'instar des efforts que nous avons consenti lors de la TICAD 7 au Japon en 2019».
C'est en effet par ces termes que le responsable de l'instance maghrébine a réagi le lundi 29 août dernier, via un communiqué, à l’accueil triomphal qui avait été réservé trois jours plus tôt à Tunis, au chef des séparatistes du Polisario, à la veille de la tenue de la Ticad 8, la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique.
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Voix de la raison, Taïeb Baccouche souhaite l'organisation d'une «retraite maghrébine» des ministres des Affaires étrangères des pays-membres de l'UMA (Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye) avec lui-même. Une réunion qui serait consacrée à la crise libyenne. A cet effet, il a publiquement lancé un appel aux Etats maghrébins, afin que son appel soit entendu.
Objectif premier de cette «retraite maghrébine»: l’élaboration d'un plan de paix en Libye, mais aussi «l’organisation de rencontres bilatérales en marge de la retraite pour résoudre les problèmes bilatéraux».
En poste depuis le 1er août 2016, à Rabat, où se trouve le siège de l'UMA, Taïeb Baccouche veut aussi que cette rencontre qu'il appelle de ses vœux soit l’occasion de désigner un nouveau Secrétaire général à l'organisation maghrébine, son mandat étant arrivé à échéance le 1er août dernier.
En attendant, le Tunisien annonce assumer «toutes» ses responsabilités: «nous caressons l’espoir que cela contribuera au développement de l'action maghrébine commune et que les dernières crises aiguës marquent les prémisses du Salut, le retour de la fraternité, de l'entente et de la complémentarité conformément aux objectifs fixés depuis la fondation du l'Union maghrébine», a-t-il souligné dans son communiqué, précisant que celle-ci avait eu lieu un certain 17 février 1989… à Marrakech.
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L’appel de Taïeb Baccouche intervient après l’alignement franc et théâtral du président tunisien sur le régime algérien, manifesté le 26 août dernier.
L’accueil, en vrai chef d’Etat, de ce chef des séparatistes du Polisario qu'est Brahim Ghali, en grande pompe et en fanfare, vaut, de fait, reconnaissance de cette entité fantoche, qui ne figure sur aucune carte de l’UMA. Il s'agit également là d'une violation de la neutralité positive à laquelle la Tunisie s’est toujours tenue, s’agissant du dossier du Sahara. Tout comme il s’agit d’une provocation franche envers le Royaume du Maroc et les Marocains, dont le Sahara est la première cause nationale.
D’où la décision ferme du rappel immédiat de l’ambassadeur du Maroc à Tunis, annoncée et survenue en ce même vendredi 26 août 2022, et le refus du Royaume de prendre part aux travaux de la Ticad 8. La Tunisie de Kaïs Saïed a ensuite voulu enfoncer le clou, en rappelant son ambassadeur à Rabat, et en se fendant d’un communiqué «explicatif», que la diplomatie marocaine a démonté, point par point.
Le vœu du secrétaire général en exercice de l’UMA sera-t-il exaucé? A voir les timides réactions en Tunisie, et l’hostilité clairement affichée en Algérie, le doute est plus que permis.