Alors que le Royaume accumule des succès diplomatiques dans le dossier du Sahara, l’Algérie intensifie ses offensives dans les grandes capitales occidentales.
Dans un entretien accordé au quotidien Assabah, édition de ce lundi 15 septembre, Hamza El Anfassi, analyste politique et spécialiste des relations Maghreb–États-Unis à l’Université George Washington, explique que cette stratégie reflète moins une vision régionale cohérente qu’une fuite en avant d’un régime fragilisé de l’intérieur.
Depuis une quinzaine d’années, et plus encore depuis l’épisode du poste-frontière de Guerguerat en 2020, la diplomatie marocaine a réussi à inverser la dynamique autour du dossier du Sahara.
L’ouverture du passage commercial, combinée à l’élargissement des partenariats stratégiques du Royaume, a consolidé la légitimité du plan d’autonomie proposé par Rabat.
«Ces avancées ont obligé de nombreux États, y compris des alliés historiques de l’Algérie, à adopter une position plus équilibrée, voire favorable au Maroc», explique Hamza El Anfassi.
«L’Algérie se retrouve acculée, contrainte de multiplier les initiatives diplomatiques coûteuses dans des capitales comme Paris, Londres ou Washington, pour tenter de compenser ses revers», a-t-il aussi déclaré.
Pour l’universitaire, l’attitude d’Alger ne peut se comprendre qu’à la lumière de son histoire politique.
«Depuis son indépendance, le régime algérien a façonné son identité en opposition au Maroc. L’hostilité à Rabat est devenue un pilier de sa doctrine politique et militaire, héritée de son alignement sur le bloc de l’Est», a-t-on lu.
Cette approche, selon El Anfassi, a eu un coût énorme. Malgré ses ressources énergétiques colossales, l’Algérie est restée en marge du développement.
«Le conflit avec le Maroc a servi de prétexte permanent pour masquer les échecs socio-économiques et légitimer le maintien d’un régime autoritaire. Toute solution politique sur le Sahara risquerait de faire tomber ce voile et de révéler la faillite interne du système», a-t-on encore pu lire.
Confrontée à l’isolement, Alger a choisi d’investir massivement dans les instruments d’influence.
«Le régime consacre des sommes considérables à des cabinets de lobbying, à l’infiltration de think tanks et à la mobilisation d’ONG, notamment en Europe et aux États-Unis», a détaillé Hamza El Anfassi.
«Ces réseaux servent à nourrir un discours accusant Rabat de répression et de violations des droits humains, afin de miner son image internationale», a-t-il indiqué.
Mais, le Royaume a appris à riposter par une stratégie à deux volets: la diplomatie officielle, via ses représentations diplomatiques et son ministère des Affaires étrangères et la diplomatie parallèle, menée par la société civile, les milieux académiques, les syndicats et les ONG.
«Cette combinaison a permis à Rabat de déconstruire progressivement la narration algérienne, en s’appuyant sur des faits concrets», a souligné El Anfassi.
«Elle a aussi contribué à renforcer l’influence marocaine dans des zones longtemps dominées par la rhétorique pro-Polisario, comme l’Amérique latine ou l’Afrique subsaharienne», a écrit Assabah.
Aux États-Unis, les efforts algériens restent limités. Leur efficacité se heurte à deux obstacles majeurs: un ancrage historique du pays du côté soviétique et une absence d’attractivité stratégique pour Washington.
«L’Algérie n’a jamais été un partenaire prioritaire des États-Unis, contrairement au Maroc qui s’est imposé comme un allié fiable depuis des décennies», a rappelé El Anfassi.
Depuis 2020, le rapport de force est encore plus marqué. Le 10 décembre de cette année-là, les États-Unis ont reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara, une décision initiée par Donald Trump, confirmée par Joe Biden et reconfirmée par le même Trump.
«Cet acte dépasse les clivages partisans», a insisté l’analyste.
«Revenir en arrière fragiliserait la crédibilité américaine auprès de ses alliés et donnerait l’image d’une puissance instable.Washington a donc tout intérêt à maintenir cette reconnaissance», a souligné l’analyste. Dans ce contexte, les campagnes de lobbying algériennes ne pèsent pas lourd.
«Même si Alger augmentait ses investissements à Washington, il est hautement improbable qu’elle obtienne un renversement de position. La relation maroco-américaine repose sur des intérêts stratégiques solides, de la coopération sécuritaire à l’économie», a-t-il souligné.
Pour Hamza El Anfassi, l’obsession algérienne autour du Sahara n’est pas seulement une politique étrangère.
C’est une condition de survie pour le régime. «Tant que le conflit perdure, Alger justifie ses blocages internes et détourne l’attention des crises sociales et économiques», a-t-on encore lu.
Mais ce statu quo a un coût régional. Il empêche toute dynamique d’intégration maghrébine, paralyse la coopération économique et alimente une rivalité militaire stérile.
«En réalité, le conflit ne sert pas les intérêts du peuple algérien. Il ne fait que préserver un système en quête de légitimité. Toute perspective de règlement serait au contraire une chance pour la stabilité et le développement de toute la région», a finalement conclu Al Anfassi.








