Le constat est sans appel. La caricature, poussée à l’extrême. Certains espéraient un changement, ne serait-ce que de façade, de la classe régnante en Algérie à l’issue des élections législatives du 4 mai dernier. Mais on sait désormais qu’il n’en sera rien. La même coalition au pouvoir (Front de libération nationale - Rassemblement national démocratique) a été reconduite avec un score stalinien (respectivement 164 et 97 sièges sur un total de 462 à pourvoir). Pire, c’est la même génération de leaders qui continue de régner. En atteste la nomination, ce mercredi, d’Abdelmadjid Tebboune, 71 ans, à la tête du gouvernement algérien.
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Le doyen de la chambre basse du Parlement algérien, Said Bouhadja, âgé de 79 ans, a, lui, été élu mardi, président du perchoir. Sans grande surprise. Tous deux sont issus du parti au pouvoir, le FLN, au même titre, faut-il le rappeler, qu’un président Abdelaziz Bouteflika, 80 ans et à l’état de santé défaillant depuis des années. Si l’on ajoute aux trois dirigeants déjà nommés, Abdelkader Bensalah, âgé de 76 ans, et qui est le président du Conseil national (la chambre haute), on trouve que les premier, deuxième, troisième et quatrième personnages de l’Etat algérien sont tous âgés de plus de 70 ans. C’est sans doute le pays qui a à sa tête les dirigeants les plus âgés au monde.
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Il ne s’agit pas d’être "gérontophobe" et encore moins insulter l’expérience des septuagénaires et octogénaires, mais l’âge des dirigeants algériens tranche cruellement avec cette réalité, reflétée par les très officielles données de l’Office national algérien des statistiques: 55% de la population sont âgés de moins de 29 ans. 80% sont âgés de moins de 49 ans. La tranche d’âge à laquelle appartiennent les dirigeants algériens cités plus haut, soit 70 ans et plus, est de… 3,87%. Plus qu’une affaire d’âge, ce sont des références, idéaux, idées et visions de l’Algérie dont il est question. Quelles réponses aux questions d’aujourd’hui peut apporter une gérontocratie, imbue d’elle-même, et qui continue de rabâcher une gloire d’antan (la guerre de libération) pour justifier son maintien dans le jeu politique? Quelles réformes peut-elle incarner alors qu’elle a cumulé tout le passif et les échecs d’hier et d’aujourd’hui? La réponse est évidente: aucune. Pas pour un peuple algérien avide de changement et qui en a apporté la preuve lors des mêmes législatives…avec une abstention, selon les chiffres officiels, de plus de 65% et près de 2 millions de votes blancs.
Assez pour faire réfléchir les Bouteflika, Bensalah, Boumahdja ou Tebboune? Nul n’en espérait tant de la part d’une génération dont le parti est inscrit, plutôt deux fois qu’une, dans la Constitution du voisin de l’Est. Le FLN peut certes se targuer d’avoir sorti le pays du joug colonialiste. Mais il l’a surtout, et depuis, plongé dans le sous-développement. Et à ce jour, aucune perspective de sortie n’est envisagée. Pour changer de cap, il faudra changer d’hommes. Mais cela, la classe régnante ne veut pas l’entendre, enfermée comme elle l'est dans des archétypes antérieurs à la chute du mur de Berlin et dans une haine maladive du Maroc. Cette situation est aussi désespérante pour le peuple algérien que pour les pays qui aspirent à un changement de génération au sommet de l’Etat en Algérie.