C’est fait, avec bonheur! Et il ne faut pas bouder se joie! Avec l’Espagne et le Portugal, le Maroc va donc organiser la Coupe du monde du football en 2030. La patience, la continuité et même l’obstination ont été au rendez-vous. C’est une vision royale qui est consacrée. Elle avait été définie en 2006, avec l’Académie dédiée, et s’est prolongée depuis, déclinée autour d’un appui constant, soutenu par une valorisation des ressources et des compétences spécialisées. Elle a pu ainsi capitaliser, par couches successives, sur des acquis illustrés par tant de manifestations africaines et même internationales dans ce même domaine.
Et maintenant? Il s’agit de remporter de nouveau un autre grand challenge à l’horizon 2030. C’est évidemment un défi de grande dimension. Il est jouable, gagnable même. Ces trois dernières années, il faut bien relever que la conjoncture a été bien difficile, notamment avec les années de la pandémie Covid-19 (2020-2021, et même 2022), l’impact du conflit entre l’Ukraine et la Russie (depuis le 24 février 2022) et, ces semaines-ci, le séisme du 8 septembre dans la région d’Al Haouz. Au total, comment ne pas y voir un désalignement des planètes lié à des circonstances imprévisibles, de force majeure? Le Maroc a dû y faire face, se distinguant même par sa capacité de résilience.
Aujourd’hui, les effets de cette première séquence sont en voie de soutenabilité et de maîtrise. Ils ont conduit à réarticuler des politiques publiques, en particulier celle de la santé, la digitalisation de la vie administrative et sociale, à pousser l’appareil productif à s’adapter aux nouvelles contraintes commerciales et économiques des marchés, et, enfin, à consolider les avancées dans la stratégie d’un «État social». Avec le séisme, vient désormais en surplomb la problématique couplée d’un développement social et territorial plus équitable. Une large fenêtre, une opportunité diront les économistes, pour lancer un nouveau chantier royal de 120 milliards de dirhams (MMDH) pour la reconstruction des six provinces et préfecture sinistrées. Une telle mobilisation quinquennale est de grande ampleur. Elle est du même ordre que celle affectée aux provinces sahariennes récupérées dans le discours royal de novembre 2015 à Laâyoune. Elle représente environ 9% du PIB national de 2023, qui est de l’ordre de 140 milliards de dollars selon les prévisions actuelles.
Un grand chantier, assurément. Il a été suivi ces derniers jours par un nouvel agenda: celui de la désignation du Maroc comme pays hôte de la CAN 2025 de football. Des atouts, le Royaume n’en manque pas -le développement et la réalisation d’infrastructures dans son dossier en témoignent. Une étape qui vient d’en connaître une seconde, le mercredi 4 octobre, avec l’attribution au Royaume de la co-organisation de la Coupe du monde 2030. C’est évidemment une autre dimension, un registre de premier rang, avec un cahier de charges exceptionnel. Les estimations actuelles retiennent quelque 50 à 60 MMDH: 8 MMDH pour la rénovation des 61 centres d’entraînement et d’autres en construction, 17 MMDH pour le réseau de transport interne, 15 MMDH pour la réalisation ou la rénovation des stades.
L’on ne peut en l’occurrence que faire référence à un alignement des planètes. Voilà bien, pour les sept ans à venir, un agenda lié à trois chantiers (reconstruction post-séisme, CAN 2025 et Mondial 2030) : de quoi lancer, accompagner et consolider un grand élan national. Le coût financier est énorme, bien entendu, mais il est amortissable. Il va en effet induire des effets et un impact sur la croissance et le développement. Déjà, les conjoncturistes retiennent un taux amélioré de croissance de 2%, soit un palier de l’ordre de 5% que l’économie nationale n’a pas enregistré depuis 2015 (+4,9 %) et 2019 (5,7 %). Et chaque point de croissance correspond à quelque 100.000 emplois annuels supplémentaires.
Comment faire face à ces exigences, qui sont autant de contraintes? Pour ce qui est du «hard» -autrement dit les infrastructures, le Maroc peut exciper d’une expérience et d’un réel savoir-faire (aéroports, chemins de fer, stades…). C’est à propos du «soft» que tout doit être désormais priorisé. Référence est faite ici aux services de tous ordres: la 5G à généraliser, les urgences sanitaires, les secours, le tourisme, la sécurité -même si cette dernière justifie en l’état d’un professionnalisme et d’une expertise de premier plan.
Restent des questions de gouvernance: quelle équipe gouvernementale: des «commandos»? De la continuité? Il sera à coup sûr question d’une gouvernance à stabiliser, prenant en charge aussi un développement durable, social et territorial. En somme, un Nouveau modèle de développement (NMD) actualisant fortement celui de 2021. Un cap, une vision attractive et mobilisatrice, en particulier pour les générations d’aujourd’hui, et celles du Mondial 2030!