Le Parlement européen est bien déterminé à en découdre avec le Maroc, qui depuis le scandale dit Qatargate figure chaque semaine au programme des débats au sein de l’hémicycle européen et fait l’objet de résolutions hostiles à son encontre.
Ainsi, après avoir voté une résolution sur le non-respect des droits humains et de la liberté des médias au Maroc le 19 janvier, le Parlement européen a récidivé le 16 février en adoptant une résolution portant sur le suivi des mesures demandées par le Parlement pour renforcer l’intégrité des institutions européennes.
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Le Maroc se retrouve cité à deux reprises dans cette résolution qui entend asseoir les principes d’intégrité, de transparence et d’indépendance de l’institution européenne.
Il y est ainsi considéré entre autres points «que les enquêtes en cours menées par les autorités belges ont révélé des soupçons avérés de corruption, de blanchiment de capitaux et de participation à une organisation criminelle de la part du Qatar, du Maroc et d’autres Etats, et impliquant trois députés en exercice, un ancien député et d’autres membres du personnel».
Une manière d’introduire l’article 19 de ladite résolution, dans le cadre duquel le Parlement «se félicite des mesures adoptées à l’égard des représentants du Qatar à la suite des révélations; exprime toutefois à nouveau sa profonde inquiétude face aux allégations de corruption de la part des autorités marocaines; demande la mise en œuvre des mêmes mesures à l’égard des représentants du Maroc, réaffirme sa détermination à enquêter pleinement sur les cas de corruption impliquant des pays qui recherchent une prise d’influence au Parlement et à prendre les mesures qui s’imposent à cet égard».
Cette «inquiétude» à l’égard du Maroc est issue de la proposition de résolution du groupe des Verts, lequel n’a pas manqué d’afficher sa position anti-marocaine une nouvelle fois. Pour introduire cette résolution portant sur l’intégrité du parlement, les Verts ont ainsi débuté leur proposition par le rappel de la résolution du 19 janvier «sur la situation des journalistes au Maroc, en particulier le cas d’Omar Radi», et ont proposé l’article 14 (cité plus haut) qui sera in fine adopté en article 19.
Les mesures prises à l’encontre du Qatar le 15 décembre 2022, et que les eurodéputés souhaitent voir désormais s’étendre au Maroc, portent ainsi sur «la suspension des titres d’accès des représentants d’intérêts qatariens, conformément à l’article 123 de son règlement intérieur, jusqu’à ce que les enquêtes judiciaires fournissent des informations et des éclaircissements pertinents» et la suspension de «tous les travaux sur les dossiers législatifs relatifs au Qatar, notamment en ce qui concerne la libéralisation du régime des visas et l’accord UE-Qatar sur l’aviation, ainsi que les visites prévues, jusqu’à ce que les allégations aient été confirmées ou infirmées».
Interviewé par Le360, Thierry Mariani, eurodéputé français et membre du groupe Identité et Démocratie au sein du Parlement européen, juge cette nouvelle résolution «ridicule».
«Il y a un proverbe latin qui dit errare humanum est, perseverare est diabolicum, ce qui veut dire: se tromper est humain, persévérer (dans l’erreur) est diabolique», poursuit l’eurodéputé qui ne cache pas son agacement.
Ainsi, s’agissant de la mesure qui interdira désormais l’accès au Parlement européen des représentants du Maroc, Thierry Mariani ironise: «Donc, on les verra sur la Place du Luxembourg, si on a à les voir...». Avec cette nouvelle mesure somme toute risible, le Parlement européen tente en effet de faire croire aux plus crédules que les affaires d’ingérence seront réglées en contrôlant son accès, omettant bizarrement de mentionner que l’intergroupe «Sahara occidental», qui œuvre au grand jour pour l’Algérie et sa marionnette le Polisario, fait partie intégrante de ses vénérables murs sans qu’il soit pourtant question d’ingérence.
Pour Thierry Mariani, les choses sont claires, «on voit très bien que certains veulent mélanger les affaires», analyse-t-il pour Le360 en se référant au Qatargate et au Marocgate. Deux affaires qui ne doivent pas être confondues car, avance-t-il, «il y a une affaire qui est avérée, où il est question de milliers d’euros, et qui s’appelle le Qatar Gate». Et, poursuit-il à titre de comparaison, «il y a une histoire où on parle de chambres d’hôtel à la Mamounia pour deux personnes…». Pour l’eurodéputé français, «ce n’est pas la même chose» et les deux affaires ne présentent «pas la même ampleur», d’autant qu’«on ne sait pas s’il est ici question d’un ‘système’». En effet, à date, aucune preuve incriminant le Maroc n’a été apportée dans le cadre de l’enquête menée par la justice belge.
«Au Parlement européen, nous sommes passés d’un système où on est présumé innocent à un autre système où on est présumé coupable», dénonce Thierry Mariani qui considère qu’«aujourd’hui, le Maroc est dans une situation où il est présumé coupable».
Quel est le but recherché par l’adoption d’une telle résolution? «C’est une mesure inutilement vexatoire alors que l’enquête n’est toujours pas aboutie», conclut l’homme politique.