Le Maroc «n’est pas actuellement une menace pour Sebta et Melilla», selon le chef d'état-major espagnol

L'amiral Teodoro López Calderón, le chef d'état-major espagnol de la défense (JEMAD). 

L'amiral Teodoro López Calderón, le chef d'état-major espagnol de la défense (JEMAD).  . Compte Twitter de l'état-major espagnol.

Le chef d'état-major de la défense (JEMAD), l'amiral Teodoro López Calderón, ne pense pas que le Maroc puisse actuellement être considéré comme "une menace" pour Sebta et Melilla, bien qu'il ait pris des mesures dans la soi-disant "zone grise".

Le 30/11/2021 à 11h40

Lors d'un colloque au Club Siglo XXI, organisé le 29 novembre à Madrid, le chef des forces armées espagnoles a souligné que le principal «rival» du Maroc est actuellement l'Algérie, et que le «problème le plus grave» auquel il est confronté est le conflit avec le Front Polisario au Sahara. De ce fait, il ne considère pas que l'accumulation d'armes par le Maroc ces dernières années soit «une menace claire pour l'Espagne», ni pour Sebta et Melilla, «en tant que partie intégrante de l'Espagne».

Dans ce contexte, l'amiral López Calderón a rappelé que le Maroc «n'a[vait] jamais exprimé son désir d'annexer les deux villes autonomes par la force», ajoutant que l'Espagne dispose d'une capacité de dissuasion qui ne concerne pas seulement les forces armées.

Lundi 29 novembre, l'Observatoire de Sebta et Melilla a publié le rapport «Les prétentions du Maroc sur Sebta et Melilla», qui soutient que de nombreuses mesures adoptées par le Maroc ces derniers temps à l'égard de l'Espagne, et en particulier des deux villes, constituent, selon les experts, une stratégie pour proclamer la souveraineté sur ces deux enclaves tout en évitant la confrontation avec le gouvernement espagnol.

Le document analyse les mesures prises par le Maroc ces dernières années pour voir si elles s'inscrivent dans ce qu'on appelle en géopolitique la zone grise, qui vise à modifier le «statu quo» avec un autre pays, dans ce cas l'Espagne, et à atteindre ainsi «des fins similaires à celles d'une guerre, mais sans guerre».

La semaine dernière, le gouvernement espagnol avait protesté contre l'implantation d'une ferme piscicole marocaine au large de l'archipel des îles Zaffarines, dans la province de Saïdia.

Dans un message transmis à l'ambassade du Maroc à Madrid, le ministère espagnol des Affaires étrangères a dénoncé cette installation, affirmant qu'elle avait été réalisée «dans les eaux territoriales espagnoles», «sans les permis nécessaires pour cette activité». De même, Madrid a annoncé avoir lancé une procédure pour sanctionner la société espagnole spécialisée dans la pisciculture qui avait installé les cages à poisson pour le compte de la société marocaine propriétaire de cette ferme piscicole. 

Madrid a aussi dépêché le patrouilleur Infanta Cristina près des îles Zaffarines pour une mission de surveillance. L'état-major espagnol a publié sur son compte Twitter des images du navire à quelques encablures des côtes marocaines.

En fait, la revendication marocaine sur ses eaux territoriales, ainsi que sur les villes de Sebta et de Melillia, n'a rien ne neuf. La réaction espagnole consistant à proclamer la souveraineté de Madrid sur les deux villes et les rochers qui les entourent n'est pas nouvelle non plus. Cela fait partie quasiment de l'ordre des choses et s'inscrit dans une longue joute d'usure entre les deux pays.

Ce qui est important, en revanche, c'est l'absence du chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, du forum de l'Union pour la Méditerranée (UPM) qui se tient à Barcelone depuis lundi 29 novembre. On voit mal le chef de la diplomatie marocaine se déplacer en Espagne et ne pas rencontrer son homologue espagnol. De même, le signe d'une fin de crise entre les deux pays ne peut pas venir d'intermédiaires, fussent-ils des ministres des Affaires étrangères, mais du plus haut sommet des deux Etats. Ce signal tarde à venir, même si l’intensité de la crise entre les deux pays a baissé depuis la nomination de Jose Manuel Albares au poste de chef de la diplomatie espagnole. 

Par Mohammed Boudarham
Le 30/11/2021 à 11h40