Le marasme identitaire de «l’Algérie des généraux»

Le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, et le président Abdelmadjid Tebboune.

Le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, et le président Abdelmadjid Tebboune.

TribuneLes généraux algériens se sont ligotés avec le projet de construire une identité algérienne sur la base d’une hypothétique «défaite» du Maroc, qu’ils ont intimement liée à leur pérennité au pouvoir. La blessure identitaire a été gérée, depuis 1962, d’une manière erronée et fantasque à travers ce prisme conflictuel avec le Maroc, à travers lequel l’affaiblissement du Royaume a été considéré comme la condition sine qua non pour construire une identité nationale algérienne.

Le 06/09/2023 à 16h00

Nous précisons bien ici «l’Algérie des généraux», pour la distinguer d’une Algérie paisible, sereine et intégrée dans le monde d’aujourd’hui, si elle avait été gouvernée par une élite politique civile, légitime, éclairée et démocrate.

Les généraux ne représentent en rien l’âme de l’Algérie, ni les attentes et les espérances de son peuple. Ce sont là deux mondes parallèles qui ne se croisent jamais. La fracture est irréversible entre des généraux séniles et un peuple jeune qui n’en peut plus, mais qui reste tétanisé par des méthodes tyranniques et un climat de terreur.

De nombreux observateurs estiment que les généraux ont toujours faussé les paramètres, afin d’empêcher toute analyse ou réflexion «normale» de l’Algérie. Tout est faux et falsifié, du récit national algérien aux statistiques fournies aux organismes internationaux.

L’Algérie a été transformée en une entité irrationnelle, illogique et réfractaire à toute lecture conforme aux approches connues. Mais les observateurs ne sont pas dupes!

Un conflit régional que rien ne justifie

L’Algérie des généraux est une entité querelleuse, hystérique et propagandiste, dont le seul objectif est de servir l’agenda des caciques de l’armée. Rester au pouvoir est leur objectif existentiel, maquillé par divers alibis, entre victimisation paranoïaque, conflits de mémoire, menaces extérieures inventées, fantasmes de puissance et autres forfanteries et mensonges.

Il en est de même, évidemment, du conflit algéro-marocain, que rien ne justifie. Il s’inscrit dans le cadre de la politique délirante des généraux qui jouent sur la confusion et sur un capharnaüm idéologique basé sur des slogans creux.

Ce conflit qu’ils font durer -sous l’allégation hypocrite du droit des peuples à l’autodétermination ou celle d’hypothétiques séquelles de la guerre des sables en 1963- relève aujourd’hui de l’imposture. La communauté internationale, écœurée, en est désormais parfaitement consciente.

Quelles que soient les causes d’un conflit, il y a toujours une fenêtre de dialogue qui peut s’ouvrir à un certain moment. Mais l’Algérie des généraux rejette viscéralement toute ouverture pour un dialogue, en utilisant les arguments les plus abscons.

Le régime entretient cette crise depuis 60 ans et veille, avec vigilance, à saboter toutes les tentatives de médiation. Le Maroc et les Marocains sont vilipendés d’une manière abjecte chaque fois qu’une main est tendue pour la paix.

Crise d’identité et «marocophobie»

Nous sommes face à un régime qui n’est pas intéressé par la paix et qui montre que sa «marocophobie» est motivée par des raisons obscures et ténébreuses. Elles sont enfouies dans l’esprit maladif des généraux très affecté par une crise d’identitaire -qu’ils accusent le Maroc de leur renvoyer comme un miroir de vérité.

Un pays créé après 1962 et qui a développé, sous le conditionnement de militaires -ignares et déconnectés du monde, une malveillance hallucinante face à une nation vieille de 13 siècles.

On aurait tellement voulu, au nom de la fraternité et de la communauté de destins, ne pas adopter cet angle de lecture autour de l’identité nationale. Mais tout montre que les raisons profondes de cette hostilité insensée n’ont rien à voir avec la guerre des sables ou l’imposture des droits des peuples à l’autodétermination.

Et même si on ne voudrait pas insister sur cet aspect de l’altérité maroco-algérienne, on est forcés de constater que le malaise identitaire algérien, lié à 3 siècles de présence ottomane et 132 ans de présence française, reste profond. Ce territoire appelé aujourd’hui Algérie n’avait jamais existé en tant qu’État, et ses populations ont été gouvernées pendant 447 ans depuis Istanbul ou Paris.

Les juntes brutales qui se sont succédées depuis 1962 ont tout fait pour aggraver ce malaise. Elles n’ont en tout cas rien fait pour conforter et apaiser la mémoire collective algérienne, comme l’auraient fait des gouvernants responsables et légitimes.

Au contraire, en déclenchant une atroce guerre civile, qui a fait plus de 250.000 morts dans les années 90, les généraux ont superposé un autre type de blessures, tout aussi traumatisantes, sur la blessure initiale. C’est ce qui explique les difficultés existentielles de l’Algérie qui s’isole et s’éloigne de plus en plus des critères qui régissent la majorité des pays.

Comment donc l’Algérie des généraux (avec de plus une ridicule folie des grandeurs) pourrait-elle être sereine face à l’épaisseur historique du Maroc, ses fortes dynasties, ses cités impériales, son poids militaire et diplomatique et son influence politique et culturelle au Maghreb central, et cela bien avant l’arrivée des Ottomans et des Français? Et, aussi, comment faire face à la stabilité et la quiétude du Maroc et à sa dynamique de développement? Le modèle porté par le voisin marocain embarrasse l’Algérie des généraux et constitue un contre-exemple amer pour la caciques qui ont dilapidé les grandes richesses fossiles du pays.

Une crise identitaire gérée de manière erronée

Les généraux, qui n’ont jamais été rassembleurs, ont été incapables de mettre en place les fondements d’une nation, en dehors de l’animosité contre le voisin marocain. Ce faisant, ils n’ont fait que servir les intérêts de leur corporation en uniforme, en usant de la prédation la plus forcenée.

La blessure identitaire a été gérée, depuis 1962, d’une manière erronée et fantasque à travers un prisme conflictuel et malsain avec le Maroc. L’affaiblissement du Maroc a été considéré comme la condition sine qua non pour construire une identité nationale algérienne.

Face à cette conviction psychotique, tout dialogue est impossible. Le Maroc qui tend la main pour la paix est à chaque fois vilipendé pour des motifs aussi absurdes les uns que les autres.

Les généraux se sont ligotés avec ce projet de construire l’identité algérienne sur la base d’une hypothétique «défaite» du Maroc qu’ils ont intimement liée à leur pérennité au pouvoir. Une double acrobatie mentale et psychique extravagante dont ils paient aujourd’hui le prix!

Il faut également souligner qu’au temps de Bouteflika, et même à celui de Boumédiène, au funeste héritage, le sentiment anti-marocain (qui imprègne fatalement la mentalité algérienne) était plus ou moins contenu et maitrisé. Les liens diplomatiques et économiques étaient maintenus. Alger ne raisonnait jamais en termes de point de non-retour, et ses dirigeants avaient plus ou moins le sens de l’État et la connaissance des relations internationales.

Or, avec le duo Chengriha-Tebboune, la «marocophobie» a atteint des sommets inégalés. Ils en sont aujourd’hui à tuer des jeunes Marocains égarés sur leur jet-ski dans les eaux territoriales algériennes limitrophes de Saïdia. Un crime dénoncé unanimement par la communauté internationale.

Pour le malheur du peuple algérien et du voisinage de l’Algérie, l’agressivité et la radicalisation de Tebboune et Chengriha s’explique par leur illégitimité et leur incompétence notoire. Ils n’ont jamais été d’authentiques acteurs de l’histoire. La radicalisation contre le Maroc fait office de voie facile pour s’auto-légitimer au prix d’un isolement international et d’échecs aussi humiliants les uns que les autres.

Par Jalal Drissi
Le 06/09/2023 à 16h00