«Aimer le Maroc, c’est s’inscrire dans la continuité de la Marche verte». La phrase est de Jean-Luc Mélenchon. Elle a été formulée le 4 octobre dernier, depuis Amizmiz, quand le fondateur et leader de La France insoumise, principale force de la gauche française et mouvement généralement peu amène à l’égard du Maroc, s’y trouvait en solidarité avec les victimes du séisme d’Al Haouz. À elle seule, elle traduit la longue, mais irréversible marche du Royaume vers le parachèvement de son intégrité territoriale. Elle en dit également long sur le changement radical de paradigmes s’agissant du dossier du Sahara.
De la Marche verte à la Résolution 2703
Du chemin, le Maroc en a parcouru depuis ce 6 novembre 1975, quand 350.000 volontaires marocains, répondant à l’appel de feu le roi Hassan II, ont foulé le sol du Sahara marocain, renouant avec les leurs et actant par là la récupération de leur terre. En témoigne, 48 ans après et malgré le parasitage de l’Algérie et son protégé le Polisario, la dernière résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. D’emblée, le texte prend pour unique référentiel les résolutions adoptées depuis 2007, soit l’année où le Maroc a présenté devant les Nations unies sa proposition d’autonomie élargie des provinces du Sud sous souveraineté nationale. Les gesticulations ayant prévalu auparavant, et défendant un impossible référendum, sont de facto nulles et non avenues. Pour la troisième année consécutive, et s’inscrivant d’ailleurs dans l’esprit et le texte des résolutions 2602 (2021) et 2654 (2022), la résolution 2703 de 2023 préconise une solution réaliste et basée sur le compromis au conflit du Sahara. Le texte identifie clairement les parties au processus politique et cite en particulier l’Algérie à six reprises, soit autant de fois que le Maroc, confirmant que le voisin de l’Est est bel et bien la partie principale à ce différend artificiel. Il consacre également les tables rondes comme seul cadre du processus politique, avec notamment la participation de l’Algérie, directement interpellée.
On remarquera que cette année, Alger n’a pas jugé bon de réagir à l’adoption de la nouvelle résolution du Conseil de sécurité, elle qui nous a habitués à des réactions épidermiques dénonçant, coup sur coup, le contenu des résolutions de 2021 et 2022. Un retour à la raison d’un régime en perte de vitesse, y compris sur la question du Sahara, où il est resté cloué à une option caduque de référendum? Ou serait-ce, en désespoir de cause, un changement de stratégie privilégiant désormais l’activation de son proxy dans des actions terroristes, comme celle dont la ville d’Es-Smara a été la cible dans la nuit du 28 au 29 octobre dernier, quand quatre déflagrations ont fait un mort et trois blessés, dont deux dans un état grave? Le temps, et les investigations en cours, nous en diront davantage.
Le bal des reconnaissances de la marocanité du Sahara
Pendant ce temps, sur le terrain, le Maroc continue de renforcer la coalition autour du plan d’autonomie. Chaque mois qui passe voit s’étoffer le rang des pays soutenant cette solution. Aujourd’hui, près d’une centaine de pays soutiennent fermement la souveraineté du Maroc sur son Sahara ou adhèrent à l’Initiative marocaine d’autonomie. Le dernier pays à s’être exprimé en faveur de la marocanité des provinces du Sud a été Israël. C’était le lundi 17 juillet 2023. L’État hébreu annonçait par la même occasion examiner positivement «l’ouverture d’un consulat dans la ville de Dakhla». Nous sommes dans le cadre d’une dynamique enclenchée ces dernières années, avec la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté du Royaume sur ses provinces du Sud, suivie par celle de nombre d’autres pays. C’est le cas de l’Espagne qui, en mars 2022, dans une lettre adressée par le chef du gouvernement Pedro Sanchez au roi Mohammed VI, considérait que l’initiative d’autonomie est «la base la plus sérieuse et la plus crédible» pour régler le différend.
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Quelque 28 consulats généraux ont effectivement ouvert dans les villes de Laâyoune et Dakhla, au cœur du Sahara. Et plus de 84% des 193 États membres de l’ONU ne reconnaissent pas la pseudo-République sahraouie. C’est cela le cap du Royaume.
Fait notable, ils sont aujourd’hui 14 pays membres de l’Union européenne à appuyer le plan marocain d’autonomie. La dernière position en date a été actée, jeudi 26 octobre dernier, par la République tchèque, et ce, dans une déclaration conjointe signée entre son ministre des Affaires étrangères Jan Lipavsky et son homologue marocain Nasser Bourita. La République tchèque y considère le plan d’autonomie comme un effort «sérieux et crédible» du Maroc et comme «une bonne base» pour une solution convenue entre les parties au conflit. Aux pays de l’UE s’ajoutent bien d’autres nations européennes, comme la Serbie ou encore l’Ukraine.
Dans le monde, peu de pays encore soutiennent ou reconnaissent encore la pseudo-RASD. De 84 au plus fort de l’appui à l’entité fantoche, leur nombre est passé actuellement à 43. Et parmi eux, nombreux sont ceux qui s’apprêtent à revoir leur position ou qui marquent des distances de plus en plus grandes avec le discours séparatiste. C’est le cas notamment en Afrique et pour des pays comme Kenya, dont le nouveau président de l’époque, William Ruto, avait même annoncé, le 14 septembre 2022, le retrait de la reconnaissance de la RASD, avant que son propre ministère des Affaires étrangères ne fasse marche arrière. Le soutien de pays comme le Rwanda ou encore le Nigéria ou l’Angola, ainsi que le Mali ou la Mauritanie, est pour le moins froid ces dernières années. Les deux appuis de la thèse séparatiste dans le continent restent, évidemment, l’Algérie et l’Afrique du Sud. Sinon, la caravane passe...
Lors de son déplacement, entamé le lundi 4 septembre, dans les provinces du Sud, Staffan de Mistura, Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies, a d’ailleurs pu constater que le contexte et la vérité du terrain sont favorables au déploiement d’une autonomie. Et que celle-ci n’est pas seulement une proposition, mais une réalité.
En cela, le Maroc ne perd pas de temps. À travers leurs instances élues, les populations du Sahara gèrent déjà leurs affaires par elles-mêmes. L’État vient en appui, notamment à travers de grands projets structurants. Nous en voyons déjà la démonstration à travers les chantiers de la voie express Tiznit-Dakhla, du grand port de Dakhla Atlantique ou encore du CHU de Laâyoune.
Mais que l’on ne s’y trompe pas. Le Sahara restera dans son Maroc et le Maroc dans son Sahara. D’après la proposition marocaine d’autonomie, le Royaume garantit certes à tous les Sahraouis, y compris ceux des camps de Tindouf et d’ailleurs, toute leur place, sans discrimination ni exclusion, et leur droit à gérer par eux-mêmes leurs affaires à travers des organes législatif, exécutif et judiciaire dotés de compétences et de ressources financières. Mais l’État conservera ses compétences dans les domaines régaliens, en particulier la défense, les relations extérieures et les attributions constitutionnelles et religieuses du Roi, commandeur des croyants et garant de la liberté du culte et des libertés individuelles et collectives. Il en ira de même pour les attributs de souveraineté, notamment le drapeau, l’hymne national et la monnaie.
Un statut d’autonomie prêt à être déployé
En dehors des éléments précités, et une fois le plan d’autonomie en marche, les populations de la région agiront par elles-mêmes, pour elles-mêmes, à travers des organes propres. En perspective, un Parlement de la région et un pouvoir exécutif qui sera exercé par un chef de gouvernement régional, élu par ledit Parlement et investi par le Roi. En matière de justice, des juridictions peuvent être créées, dont les décisions seront rendues au nom du Roi. Un Tribunal régional supérieur sera la plus haute juridiction et statuera en dernier ressort, mais sans préjudice des compétences des instances nationales (la Cour suprême et le Conseil constitutionnel).
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Les populations sahraouies auront la haute main sur tous les aspects liés à l’économie de la région. Les politiques locales de développement économique, de planification, d’investissement, de commerce, d’industrie, de tourisme et d’agriculture seront de leur ressort. Ceci, au même titre que le budget et la fiscalité de la région ainsi que ses infrastructures (eau, électricité, travaux publics, transport…). Le statut d’autonomie de la région fera l’objet de négociations et sera soumis à une consultation référendaire des populations concernées. Autant dire que tous les ingrédients nécessaires à sa mise en place sont réunis.
En attendant, un ambitieux programme de développement est en marche dans les provinces du Sud. Son dernier chapitre en date n’est autre que le Nouveau modèle de développement des provinces du Sud, présenté pour la première fois en novembre 2015 devant le roi Mohammed VI. C’était à Laâyoune, à l’occasion du 40ème anniversaire de la Marche verte. L’enveloppe, initialement estimée à 77 milliards de dirhams, a été portée à 85 milliards. Objectif: mettre en place un véritable plan Marshall pour un développement économique et social global au Sahara. Aujourd’hui, ce plan est, à bien des égards, une réalité, puisque près de 70% des projets qu’il comprend sont achevés ou en cours de l’être.