C’est l’une des composantes les plus stratégiques du dispositif militaire, bien que souvent méconnue du grand public. L’intendance assure la gestion et la continuité de l’approvisionnement indispensable à la vie quotidienne et à l’engagement opérationnel des FAR. Son action repose sur une organisation méticuleuse, capable d’anticiper les besoins, d’absorber les contraintes et d’assurer la continuité des flux, même dans les conditions les plus difficiles.
Imaginez un territoire immense, aride, parfois hostile, où les distances se comptent en centaines de kilomètres et où la moindre rupture logistique peut compromettre la mission la plus minutieusement planifiée. C’est pourquoi, «en Zone Sud, chaque contrainte naturelle – chaleur, sécheresse, isolement – devient un défi logistique majeur», peut-on lire dans la Revue des FAR.
C’est dans cet environnement exigeant que s’exprime toute la valeur du soutien logistique. Assurer un approvisionnement régulier implique de composer avec de multiples contraintes: délais serrés, procédures administratives strictes, fluctuations des marchés, aléas climatiques ou encore contraintes liées au terrain. Les services de l’intendance doivent faire preuve d’anticipation, de réactivité et d’une grande capacité d’adaptation pour maintenir l’équilibre entre besoins opérationnels et réalités logistiques.
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L’organisation logistique repose sur une architecture structurée et hiérarchisée. Le dépôt annexe de l’intendance occupe une place centrale dans ce dispositif. Véritable plaque tournante de la chaîne d’approvisionnement, il est dédié à la gestion des produits frais et périssables. Son développement progressif, à travers l’extension des capacités de stockage, la modernisation des chambres froides et l’amélioration des infrastructures de manutention, a permis d’absorber des volumes croissants tout en renforçant la fiabilité des opérations. C’est ainsi que ce maillon assure la fluidité entre les sources d’approvisionnement et les unités bénéficiaires.
Un maillage territorial pour sécuriser l’approvisionnement
Autour de ce noyau s’articulent les sous-groupements logistiques, véritables relais territoriaux chargés de la redistribution. Ils réceptionnent les produits en provenance des dépôts centraux, en contrôlent la conformité, puis organisent leur acheminement vers les unités déployées. Leur rôle est déterminant pour garantir une disponibilité permanente des ressources, notamment dans les zones éloignées ou soumises à des contraintes géographiques particulières. Grâce à leurs capacités de stockage et à leur autonomie relative, ils constituent un amortisseur logistique essentiel face aux imprévus.
Et dans les zones les plus reculées, à proximité des frontières du Royaume, les dépôts logistiques avancés constituent le dernier échelon de cette chaîne robuste. Ils sont tenus d’«assurer une disponibilité immédiate des vivres, en maintenant une autonomie de plusieurs jours pour les Unités en position. Cette présence logistique au plus près des soldats permet de pallier d’éventuelles ruptures d’approvisionnement tout en garantissant des conditions de vie acceptables dans des environnements souvent hostiles».
La qualité de l’alimentation constitue l’un des axes majeurs de cette organisation. Les témoignages recueillis sur le terrain sont unanimes. Les militaires déployés dans le Sud affirment bénéficier d’un approvisionnement à la fois régulier, diversifié et de qualité. Les rations sont strictement respectées, les menus équilibrés et régulièrement renouvelés, tandis que les produits livrés répondent aux standards les plus exigeants en matière sanitaire et nutritionnelle.
Selon la Revue des FAR, cette rigueur contribue directement au maintien d’un haut niveau de satisfaction, élément essentiel du moral des troupes engagées dans des conditions parfois éprouvantes. Un effort particulier est également porté sur la variété alimentaire afin de rompre la monotonie des repas, facteur reconnu de démobilisation psychologique en situation de déploiement prolongé. Par ailleurs, des contrôles de qualité sont effectués de façon continue et les retours des Unités montrent un taux d’adhésion particulièrement élevé aux produits distribués.
Une chaîne d’approvisionnement maîtrisée
De la sélection des fournisseurs jusqu’à la livraison finale dans les unités les plus avancées, l’ensemble du dispositif est pensé et coordonné dans un souci permanent d’efficacité, de qualité et de préservation du moral des troupes. Chaque étape de la chaîne logistique s’inscrit dans une logique de maîtrise des délais, de fiabilité des flux et d’adaptation aux contraintes du terrain.
Afin de répondre aux exigences imposées par les conditions climatiques extrêmes et l’étendue des zones à couvrir, le rythme d’approvisionnement est précisément calibré. Les denrées d’épicerie et les produits secs font l’objet de livraisons mensuelles, les viandes et volailles congelées sont acheminées deux fois par mois, tandis que les produits frais (légumes, fruits et œufs) sont livrés de manière hebdomadaire. Une organisation qui permet de concilier fraîcheur des produits, sécurité sanitaire et optimisation des moyens de transport.
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Le processus logistique s’articule autour de trois étapes complémentaires. Dans un premier temps, les denrées sont acheminées depuis les dépôts centraux vers les sous-groupements logistiques par voies terrestre, aérienne ou maritime. Elles sont ensuite redistribuées vers les dépôts logistiques avancés grâce aux moyens des formations de transport. Enfin, la dernière phase consiste en la livraison directe aux unités déployées, assurée par leurs propres moyens organiques. Une exception notable concerne les viandes et volailles congelées, qui sont acheminées directement vers les dépôts avancés au moyen de camions frigorifiques civils, garantissant le maintien rigoureux de la chaîne du froid sur des distances pouvant atteindre 1.600 kilomètres.
L’acquisition des denrées alimentaires s’inscrit, elle aussi, dans un processus rigoureusement encadré, fondé sur des appels d’offres nationaux et internationaux. Les services de l’intendance identifient les besoins en étroite coordination avec les unités, sur la base de la ration type en vigueur en Zone Sud. À partir de cette évaluation, ils élaborent les spécifications techniques en concertation avec les structures compétentes de l’État-Major de la Zone Sud.
Ces dossiers sont ensuite transmis à la Direction interarmées de l’intendance, chargée de piloter la procédure d’attribution dans le respect des règles en vigueur. Une commission interservices, réunissant notamment l’Administration de la défense nationale et l’ONSSA, procède à la sélection des fournisseurs selon des critères stricts de conformité, de qualité et de fiabilité.
L’intendance assure la gestion et la continuité de l’approvisionnement indispensable à la vie quotidienne et à l’engagement opérationnel des FAR.
Au cœur de ce dispositif de contrôle, deux commissions rotatives assurent une surveillance permanente de la qualité des produits réceptionnés. Placées sous la présidence d’officiers supérieurs, elles veillent au respect des normes d’hygiène, à la conformité contractuelle des livraisons, ainsi qu’à la vérification des dates de péremption et de la fraîcheur des denrées. Elles statuent également sur l’aptitude des produits à être mis en distribution.
Un contrôle renforcé de la chaîne de production à la livraison
Une attention particulière est accordée aux viandes congelées, considérées comme des denrées stratégiques. Leur approvisionnement obéit à un dispositif spécifique, reposant sur des contrats internationaux conclus notamment avec des fournisseurs situés en Australie, au Brésil et au Paraguay. Ces marchés sont établis conformément à des cahiers des prescriptions stricts, visant à assurer la disponibilité quantitative et qualitative des produits destinés aux unités de la Zone Sud. En amont, une commission mixte associant les FAR et l’ONSSA procède à l’inspection des fermes d’élevage et à l’homologation des abattoirs. Cette évaluation porte sur l’état des installations, les conditions d’abattage, notamment le respect du rite halal, les exigences sanitaires ainsi que la traçabilité complète des lots.
Le contrôle se poursuit tout au long du processus de production. Des inspections ante et post mortem sont systématiquement réalisées, accompagnées d’un suivi rigoureux des opérations d’abattage, de congélation et de conditionnement. Des analyses vétérinaires en laboratoire viennent compléter ce dispositif avant toute autorisation d’expédition, garantissant ainsi la conformité sanitaire des viandes livrées aux unités.
Afin de préserver cette qualité jusqu’au point de consommation, une chaîne du froid performante a été déployée sur l’ensemble du dispositif logistique. Elle repose sur un réseau d’infrastructures fixes et mobiles, comprenant des entrepôts frigorifiques de grande capacité au niveau des structures logistiques, ainsi que des équipements adaptés au sein des unités. Celles-ci disposent notamment de chambres froides positives et négatives, de réfrigérateurs solaires et de dispositifs dédiés à la découpe et à la conservation des viandes. À cela s’ajoutent des caisses isothermes et des moyens de congélation destinés à renforcer l’autonomie des postes les plus isolés.
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Dans cette même dynamique, un projet est en cours de mise en œuvre visant à doter chaque groupe de type «Aachra» (dix hommes formant une entité solidaire), déployé au niveau des points d’appui et des sonnettes, de deux congélateurs d’une capacité de 312 litres chacun. Cette dotation permettra non seulement de conserver les viandes congelées sur une durée prolongée, mais également de différencier le stockage des viandes rouges et blanches, d’assurer la disponibilité d’eau fraîche, notamment en période de fortes chaleurs et d’anticiper l’introduction progressive de nouveaux produits surgelés.
Parallèlement, la logistique de l’eau constitue un autre pilier fondamental du soutien aux forces. L’approvisionnement repose sur un maillage dense de puits et de forages, complété par des moyens de transport spécialisés. Des camions-citernes assurent quotidiennement l’acheminement de volumes importants, pouvant atteindre plusieurs millions de litres, vers les zones d’implantation des unités. Cette eau est ensuite stockée dans des cuves souples, des fûts galvanisés ou des réservoirs en plastique de grande capacité, garantissant une autonomie suffisante et la continuité de l’activité opérationnelle dans les zones les plus isolées.
C’est cette capacité à anticiper, à s’adapter et à durer qui confère à l’intendance sa dimension stratégique, bien au-delà de sa fonction de soutien. Par son organisation rigoureuse et sa maîtrise des flux, elle garantit la continuité des opérations dans les environnements les plus exigeants. De quoi assurer aux forces engagées les conditions nécessaires pour remplir leurs missions avec constance, efficacité et sérénité, quelles que soient les contraintes du terrain.
















