Analyse. Accord de pêche: l'avenir de la relation Maroc-UE en jeu

Emmanuel Dupuy, président de l'Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE).

Emmanuel Dupuy, président de l'Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE). . DR

On assiste à une véritable guerre médiatique depuis la publication par l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne d'un avis dans lequel il considère que "l'accord de pêche Maroc-UE est invalide". Aujourd'hui, c'est au président de l'IPSE de livrer sa lecture.

Le 22/02/2018 à 14h58

Ces derniers jours, plusieurs organisations européennes ont multiplié les sorties pour soutenir cet accord, voire exprimer leur crainte de voir la Cour de justice de l'Union européenne, qui doit statuer sur le sujet mardi 27 février, suivre l’avis de l’avocat général.

Aujourd’hui, c’est autour de Emmanuel Dupuy, président de l'Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE), de «regretter» que la relation entre l’Union européenne et le Maroc soit, de nouveau, «prise en otage», par la procédure judiciaire instruite par la Cour de justice de l’UE.

Dans une tribune publiée par le site d’information «La Tribune Afrique» et dont se fait écho l’agence MAP, il fait observer que l’accord de pêche Maroc-UE aux ramifications autant économiques que diplomatiques, engage plus spécifiquement 11 des 28 Etats de l'UE, eu égard à leur intérêt pour la pêche au large des côtes marocaines.

«La pêche est devenue un facteur déterminant dans le renforcement du pilier sud de la politique européenne du voisinage», souligne-t-il.

Emmanuel Dupuy ne manque pas non plus de rappeler les conclusions d’une étude d'experts, spécialistes des questions maritimes. Celle-ci relève que l'UE importe à hauteur de 1,2 milliard d'euros de produits de la pêche provenant du Maroc, tandis que Bruxelles n'a exporté que 135 millions d'euros, en 2016.

Ce sont ainsi plus de 80.000 tonnes de poissons que les flottes européennes pêchent au large des côtes marocaines, chaque année, pour un bénéfice estimé à 80 millions d'euros, a-t-il indiqué, notant que l’étude confirme également que la stratégie «Maroc bleu» (ndlr: Halieutis) est un des atouts de la coopération eurafricaine, dans une logique liant l'Europe à l'Afrique, via la Méditerranée, grâce à la «profondeur stratégique» africaine du Maroc.

Comme l’ont déjà fait remarquer plusieurs experts des questions européennes à plusieurs occasions, le président de l’IPSE souligne également que la relation Maroc-UE est devenue aussi «optimale, notamment en matière de lutte antiterroriste, de sensibilisation contre l'extrémisme violent, d'actions menées en matière de dé-radicalisation et de mobilisation contre les trafics de migrants». Il revient également sur le rôle important que joue le Maroc dans le dossier de la migration.

C’est dans ce contexte qu’Emmanuel Dupuy affirme «gager» que «la décision du 27 février prochain, à l'aune des quatre dernières années engagées à travers la coopération multilatérale UE/ Maroc, soit motivée par un raisonnement rationnel et pragmatique».

Cette nouvelle sortie ne fait que confirmer la mobilisation dans les coulisses de l’Union européenne pour éviter qu’une décision de la Cour de justice fasse du tort à l’UE elle-même, dans le domaine maritime, mais surtout dans les autres domaines où la coopération avec le Maroc est stratégique pour les 25 pays membres.

Par Younès Tantaoui
Le 22/02/2018 à 14h58