Affaire Brahim Ghali: l’attitude déloyale de l’Espagne suscite de l’incompréhension et des interrogations au Maroc

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Un haut responsable à la diplomatie marocaine a déploré "l’attitude déloyale" des autorités espagnoles qui ont accueilli en catimini le chef du Polisario sous la fausse identité d’un citoyen algérien, portant le nom de Mohamed Benbatouche.

Le 24/04/2021 à 16h38

Arancha González Laya, la cheffe de la diplomatie espagnole, est bien trop optimiste quand elle affirme que l’hospitalisation à Logroño du patron du Polisario, Brahim Ghali, n’aura pas d’impact sur "les excellentes relations" entre l’Espagne et le Maroc. La ministre espagnole des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération, a fait cette déclaration à la presse, vendredi 23 avril 2021 à Madrid, à l’issue d’une réunion avec son homologue palestinien Riad Al Maliki.

Après avoir confirmé la présence de Brahim Ghali sur le sol espagnol "pour des raisons strictement humanitaires", Arancha González Laya a déclaré: "bien sûr que cette question n’entrave, ni ne perturbe les excellentes relations que l’Espagne entretient avec le Maroc". Et d’ajouter, le Maroc est "un voisin, un ami et un partenaire privilégié" dans tous les domaines et "cela ne change pas".

Interrogé par Le360, un haut responsable dans la diplomatie marocaine s’étonne, d’abord, des contradictions inhérentes aux propos de la ministre espagnole.

"En accueillant en catimini le chef des séparatistes, les autorités espagnoles n’ont pas considéré le Maroc comme un ami et un partenaire privilégié pour reprendre les termes utilisés par Mme Arancha González Laya". Et de continuer: "l’Espagne sait très bien que la question du Sahara est existentielle pour le Royaume du Maroc. Pourquoi dès lors a-t-elle préféré manœuvrer, pour ne pas dire jouer, dans le dos du Maroc?"

Notre source déplore "une attitude déloyale qui contredit l’esprit de partenariat et de bon voisinage entre les deux pays". Et il précise, "Cette attitude suscite de l’incompréhension et des interrogations au Maroc".

Le haut responsable marocain rappelle également, "nous échangeons avec les autorités espagnoles dans un esprit de confiance. Lorsqu’il s’agit de dossiers qui revêtent de l’importance pour l’Espagne, à l’instar du terrorisme ou de l’immigration, l’interaction avec le Maroc se fait en toute transparence. Et quand il s’agit d’un dossier dont l’Espagne mesure parfaitement l’importance pour le Maroc, notre voisin du nord manœuvre dans les coulisses". Notre source s’interroge alors, "Où sont la confiance et le partenariat stratégique?".

"Quand on prétend être un partenaire stratégique, on n’est pas complice avec les ennemis de ce partenaire", déplore le haut responsable à la diplomatie marocaine qui ajoute, "Le Maroc prend acte d’une attitude déloyale".

La source marocaine précise que "le coefficient humanitaire mis en avant par l’Espagne pour accueillir le chef des séparatistes aurait pu être compris s’il avait été assumé".

Le haut responsable à la diplomatie marocaine s’interroge également sur les raisons qui ont poussé l’Espagne à faire entrer Brahim Ghali en Espagne sous une fausse identité. "De quoi l’Espagne a-t-elle peur? De quoi a-t-elle honte?" Et de préciser, "Pourquoi l’exécutif espagnol essaie de contourner les contraintes du judiciaire?".

A ce sujet, il convient de préciser que Brahim Ghali fait l’objet de plusieurs plaintes, déposées en Espagne, à la fois par des citoyens espagnols et marocains. Ce samedi 24 avril, l’Association canarienne des victimes du terrorisme a rendu public un communiqué pour sommer les autorités espagnoles d’arrêter Brahim Ghali, tout en rappelant qu’un mandat d’arrêt a été promulgué contre lui par José de la Mata, juge à la cour centrale de l’Audience nationale, pour "assassinats, enlèvements, mitraillages de Canariens, terrorisme, génocide et crime contre l’humanité".

Le haut responsable marocain interrogé par Le360 affirme espérer "que l’Espagne pourra s’affranchir des reliques peu glorieuses du passé et agir loin de tout chantage dans ce dossier". Il formule le vœu que "l’Espagne puisse agir en partenaire loyal du Maroc".

Par Mohammed Boudarham
Le 24/04/2021 à 16h38