La réaction émotionnelle, tout à fait compréhensible, est en partie retombée, de même que la réaction institutionnelle, qui va cependant probablement prendre plus d’ampleur dans les jours qui suivent, en raison de l’irrespect profond dont a fait preuve le Parlement européen vis-à-vis de notre souveraineté, et qui ne devra pas rester impuni.
Place maintenant à une nouvelle réponse, qui contraste avec celles qui prédominent actuellement, en cela qu’elle ne s’inscrit pas dans une démarche défensive, mais bien au contraire dans une perspective offensive, celle de l’inversion accusatoire. Car pour démanteler les mensonges à foison que comporte la résolution européenne, nous avons d’excellents juristes et experts au Maroc qui le font et l’ont très bien fait.
Mais comme le disait feu Sa Majesté le Roi Hassan II: «Il ne faut pas perdre de temps à avancer des arguments de bonne foi face à des gens de mauvaise foi».
Cela étant dit, passons désormais à la deuxième étape.
Première question: où en est l’Europe concernant la liberté d’expression et la liberté des médias?
Sur ce sujet, l’Union européenne, grand défenseur de la liberté devant l’Éternel, et sanctuaire des droits et de la liberté d’expression, n’a pas hésité un instant à ordonner la fermeture de plusieurs médias pour des raisons politiques et idéologiques, et ce, sans qu’aucun de ces médias n’ait violé aucune loi ni législation. Je parle bien entendu de Russia Today et de Sputnik, qui se sont vu interdits de diffuser sur les ondes européennes, et dont les chaines vidéo sur YouTube ont été supprimées. Quant aux autres plateformes telles que Rumble ou Odysee, il faut désormais un VPN pour pouvoir accéder aux chaines de ces deux médias sur le sol européen.
Une décision à tous les niveaux arbitraire du point de vue du droit, mais qui semble-t-il n’a pas ôté le sommeil à nos amis du Parlement européen. «Faites ce qu’on vous dit, mais ne faites pas ce qu’on fait», voilà le nouvel adage de ces élus, dont la probité est somme toute discutable pour bon nombre d’entre eux, vu les multiples scandales de corruption qui éclatent depuis plusieurs années au sein de cette institution.
Le crime de RT et de Sputnik? Proposer une autre version des faits concernant le conflit en Ukraine, et servir d’instrument de propagande pour le Kremlin. La liberté d’expression oui, mais seulement quand vous êtes d’accord avec nous. Au moins ça a le mérite d’être clair désormais. Quant à la propagande que tout Etat qui se respecte doit mener pour la défense de ses intérêts, n’est-ce pas la raison d’être de chaine comme Euronews? LCI? BFM TV? Ou encore la BBC?
Deuxième volet, celui du délit d’opinion, des procès équitables et de la liberté des journalistes. Citons à ce propos les cas de deux personnages emblématiques, à savoir Julian Assange et Edward Snowden.
Les deux sont des lanceurs d’alertes et des défenseurs des droits et des libertés des citoyens, qui pour le coup et contrairement au cas du Maroc, sont réellement des prisonniers d’opinion. Les deux ont dénoncé, à leurs risques et périls, des crimes abjects et des violations inacceptables des droits des citoyens, commis par le gouvernement américain mais pas que. Et il se trouve qu’Oncle Sam veut la peau des deux.
Le premier a trouvé dans un premier temps refuge à l’ambassade d’Equateur en 2012 à Londres, avant d’être livré en 2019 aux autorités britanniques, pour être incarcéré en attendant son extradition vers les Etats-Unis, où il risque environ 176 ans de prison, voire même la peine de mort.
Le deuxième a trouvé asile en 2013 en Russie, cette terre présentée par les médias occidentaux comme le «Mordor». Cela, après avoir dénoncé, preuves à l’appui, l’existence de plusieurs programmes de surveillance de masse mis en place par la NSA.
Ces programmes d’écoutes électroniques et d’espionnage de masse ont ciblé non seulement les citoyens américains et européens, mais aussi des chefs d’Etats européens, pourtant fidèles alliés voire même vassaux pour beaucoup d’entre eux de Washington. À côté de ça, Pegasus c’est du pipi de chat.
La réaction du Parlement européen? ...
Autre phénomène, les deux lanceurs d’alertes ont pourtant à maintes reprises déposé des demandes d’asile auprès de plusieurs pays européens, sans qu’aucun n’ait jamais accepté de le leur accorder. Imaginez un instant que ces deux lanceurs d’alertes aient étés russes ou même marocains. Ils auraient dans ce cas été accueillis les bras ouverts, avec des passages à n’en pas finir sur tous les plateaux TV, avec des tapis rouges et des bouquets de fleurs.
Alors oui, nous en tant que citoyens marocains, nous demandons, fermement, au Parlement européen de faire respecter la liberté d’expression et des médias sur le sol européen, en exigeant la réouverture des chaines arbitrairement interdites par les autorités européennes, et la libération de Julian Assange, qui mérite un procès équitable et transparent. Nous proposons, dans le cadre des accords de collaboration qui nous lient, d’envoyer des observateurs marocains pour assister et veiller au bon déroulement de son procès sur le sol européen.
En attendons, nous tenons à exprimer notre profonde inquiétude concernant la dérive autoritaire que connait l’Europe depuis quelques années, et qui empêche, par des moyens souvent illégaux, toute voix dissonante de s’exprimer librement. Nous invitons ainsi les autorités européennes à faire preuve de retenue, et à faire le bon choix, celui de la liberté d’expression et des médias, mais avant tout, celui du respect de la souveraineté de leurs partenaires, ainsi que de tous les Etats du monde. Car en attendant, ce Parlement est «européen» et aucunement «mondial».