Les images parlent d’elles-mêmes, surtout les expressions des visages. Lors de l’échange de déclarations au palais Chigi avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune, la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, n’a pu cacher son étonnement, teinté d’un sourire narquois. En effet, Tebboune venait d’affirmer qu’Alger et Rome partageaient des positions concordantes sur le dossier du Sahara occidental. Meloni a d’abord écarquillé les yeux, comme pour signifier à l’assistance et aux caméras que cette déclaration était un mensonge flagrant. La position officielle de l’Italie, bien connue, est en réalité bien plus proche d’un soutien au plan d’autonomie marocain pour le Sahara.
Malgré cela, Tebboune a persisté dans son usage du faux, affirmant que les deux pays appuyaient «les efforts de l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour parvenir à une solution politique juste, conformément au droit international, permettant au peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination.»
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Cette dernière déclaration fut visiblement la goutte d’eau qui fit déborder le vase pour Giorgia Meloni. Elle a alors lancé un regard désapprobateur à son interlocuteur, ou plutôt à celui qui s’était transformé en un prétendu ministre des Affaires étrangères du Polisario.
Les manœuvres grossières de Tebboune, à l’opposé de tout tact diplomatique, pourraient bien être interprétées comme un manque de respect flagrant envers les autorités italiennes. L’Algérie semble vouloir forcer la main de l’Italie sur le dossier du Sahara.
En effet, prenant d’abord la parole, Giorgia Meloni avait fait état, en parlant des dossiers régionaux et internationaux, de discussions bilatérales ayant porté sur le Sahel, la Libye, la Syrie, la situation à Gaza et le conflit russo-ukrainien. À aucun moment le Sahara n’a été mentionné dans sa déclaration conjointe avec Tebboune. Cela implique que l’Italie a soit refusé d’aborder la question, soit opposé une fin de non-recevoir catégorique à toute demande d’alignement ouvert sur les positions anti-marocaines du régime algérien.
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Cette fermeté italienne s’est clairement traduite dans le texte du communiqué final. Si l’Algérie a réussi à y insérer un paragraphe sur le Sahara, l’Italie a veillé à ce que la formule propagandiste de «l’autodétermination du peuple sahraoui» n’y figure pas.
Dans ce jeu diplomatique douteux orchestré par le président algérien, Giorgia Meloni était en position de force. Elle est parfaitement consciente de la faible légitimité interne de Tebboune et de l’isolement international de l’Algérie, quasiment en rupture avec la plupart de ses voisins du Maghreb, du Sahel et même d’Europe. Ce sont ces deux fardeaux, auxquels s’ajoute la corruption inhérente au régime algérien, qui ont poussé Tebboune à chercher un bol d’air frais de l’autre côté de la Méditerranée, loin de ce qui ressemble à sa prison à ciel ouvert.
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L’Italie est certes dépendante du gaz naturel algérien, qui a suppléé celui de la Russie, son ex-premier fournisseur. L’Algérie a beau accorder à l’Italie des prix préférentiels les plus bas sur le marché international du gaz, sans parler des contrats signés entre les deux pays dans le domaine énergétique et celui de l’armement.
Bien que l’Italie dépende du gaz naturel algérien, qui a remplacé les approvisionnements russes, et malgré les prix préférentiels consentis par Alger, sans oublier les accords énergétiques et d’armement, ces avantages n’ont pas suffi à l’Algérie. Elle n’a pu utiliser cette prétendue «coopération stratégique» comme levier pour tenter d’acheter à l’Italie – troisième puissance industrielle européenne – une prise de position sur le Sahara marocain, comme elle l’aurait fait avec le Zimbabwe ou le Mozambique. Une telle attitude humiliante est inacceptable pour l’Italie, car elle porterait atteinte à la souveraineté d’un autre État, de surcroît un ami et partenaire économique majeur pour l’Italie comme pour l’Union européenne.
Autant dire que Tebboune a reçu un cinglant revers. Par ailleurs, il s’est également distingué lors d’un autre discours devant des entrepreneurs italiens, affirmant, au mépris de l’intelligence artificielle et humaine, que l’Algérie possède «le plus grand réseau autoroutier d’Afrique et deviendra bientôt un leader continental en matière de voies ferroviaires».








