Signe de l'intense activité diplomatique sur cette crise, le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec son homologue américain Donald Trump et avec les présidents libanais Michel Aoun et égyptien Abdel Fatah al-Sissi, puis avec le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohamed ben Salmane ainsi qu'avec le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.
Selon la Maison-Blanche, Donald Trump et Emmanuel Macron se sont "mis d'accord sur la nécessité de travailler avec les alliés pour contrer les activités déstabilisatrices du Hezbollah et de l'Iran dans la région".
Auparavant, la présidence française avait, elle, uniquement affirmé que M. Macron avait évoqué "la situation au Moyen-Orient, les intérêts et les moyens de stabiliser la région et de construire la paix", précisant qu'il "poursuivra ces échanges avec d'autres dirigeants internationaux dans les prochains jours". Paris envisage de réunir le groupe international de soutien au Liban, "en fonction de l'évolution de la situation", mais aucune date n'a encore été fixée.
M. Macron cherche à trouver une issue à la crise libanaise ouverte par la démission surprise annoncée à Riyad par M. Hariri le 4 novembre. Le Premier ministre libanais est ensuite resté en Arabie saoudite jusqu'à son arrivée, accompagné de son épouse, samedi à Paris où il a été reçu par le président français.
A l'issue d'un entretien et d'un déjeuner, M. Hariri a confirmé qu'il regagnerait Beyrouth dans "les jours prochains et participerai(t) à la fête nationale" le 22 novembre. "Et de là-bas, je ferai connaître ma position, après m'être entretenu avec le président Michel Aoun", a-t-il dit dans une brève déclaration en français. "Vous savez que j'ai présenté ma démission et on en discutera au Liban", a-t-il précisé ensuite en arabe.
L'annonce de sa démission-choc avait très rapidement été perçue comme un nouveau bras de fer entre l'Arabie saoudite sunnite, considéré comme un important soutien de M. Hariri, et l'Iran chiite, grand allié du Hezbollah libanais. Le fait qu'il reste en Arabie Saoudite avait soulevé de nombreuses questions. Le président libanais Michel Aoun avait accusé les Saoudiens de le retenir en "otage", ce que l'intéressé a démenti à plusieurs reprises.
Ancienne puissance mandataire du Liban, la France a joué les médiateurs et M. Macron a invité à Paris M. Hariri et sa famille afin de tenter de sortir de l'impasse. Le président Macron avait précisé qu'il le recevait "en tant que Premier ministre" , sa démission n'étant pour le moment pas reconnue au Liban.
Saâd Hariri a salué samedi le rôle de la France, qui "prouve son attachement au Liban et à sa stabilité", et la présidence française a mis l'accent sur sa volonté de "contribuer à apaiser les tensions dans la région".
La venue à Paris de M. Hariri a été "expressément saluée" samedi par le ministère allemand des Affaires étrangères, qui a appelé "toutes les parties à réduire les tensions". Riyad a décidé de rappeler son ambassadeur en Allemagne pour protester contre des déclarations du ministre des Affaires étrangères Sigmar Gabriel, qui avait laissé entendre que M. Hariri subirait l'influence de Riyad, a annoncé samedi l'agence officielle saoudienne SPA.
"Ces déclarations sont hasardeuses, fondées sur des informations erronées et ne servent pas la stabilité dans la région", a déclaré le ministère saoudien des Affaires étrangères. Jeudi, M. Gabriel avait déclaré lors d'une conférence de presse à Berlin avec son homologue libanais Gebrane Bassil que "le Liban risqu(ait) de retomber dans de graves confrontations politiques et peut-être militaires".
Proche de M. Aoun, Gebrane Bassil a de son côté prévenu qu'en cas d'ingérence étrangère, son pays risquait de connaître le même sort que la Syrie voisine. En annonçant sa démission, M. Hariri avait invoqué la "mainmise" du Hezbollah -membre du gouvernement et soutenu par l'Iran- sur la vie politique au Liban, et des craintes pour sa vie, au moment où Riyad, soutenu par les Etats-Unis, fulminait contre les ingérences prêtées au rival iranien dans la région.
Vendredi, le président Macron avait lui réaffirmé sa volonté de "dialoguer" avec l'Iran, qui a accusé Paris de "partialité" après les critiques de M. Le Drian à l'encontre de Téhéran.
Détenteur de la nationalité saoudienne, M. Hariri, 47 ans, possède une résidence à Riyad où sa famille est installée. Il a repris le flambeau politique à la mort de son père, Rafic Hariri, un ancien Premier ministre tué dans un attentat à Beyrouth en 2005 pour lequel cinq membres du Hezbollah chiite libanais sont accusés.